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Invitation à la valse

Berlin
Philharmonie
09/09/2017 -  et 10 septembre 2017
Ferruccio Busoni : Tanz-Walzer, opus 53
Béla Bartók : Concerto pour violon n° 2, Sz. 112
Jean Sibelius : Symphonie n° 2 en ré majeur, opus 43

Gil Shaham (violon)
Berliner Philharmoniker, Susanna Mälkki (direction)


S. Mälkki, G. Shaham


Comme l’avait signalé Sir Simon Rattle lors de la conférence de presse dévoilant la saison à venir du Philharmonique (voir ici), seule une femme dirigera le prestigieux orchestre au cours de la saison 2017-2018: il s’agit de la Finlandaise Susanna Mälkki. Après des débuts berlinois remontant au mois de mars 2008 dans des œuvres de Webern et de Stravinsky, la voici présente pour deux concerts dans le cadre de la Musikfest 2017 qui confirmèrent trois talents éclatants: celui de l’orchestre bien sûr, celui du soliste et celui de la cheffe.


Car, dès ces merveilleuses et si rarement données Tanz-Walzer de Busoni (qui fit d’ailleurs une longue partie de sa carrière à Berlin, y étant même décédé en 1924 comme en témoigne la plaque apposée sur son dernier domicile sis sur la Viktoria-Luise Platz), créées par les Berliner Philharmoniker sous la baguette du compositeur le 13 janvier 1921, on est totalement séduit par la direction de Susanna Mälkki. Alliant souplesse et autorité naturelle, elle laisse l’orchestre vivre cette musique avec une liberté dont ce dernier profite pleinement au fil des diverses séquences d’une pièce qui se veut un hommage à Johann Strauss fils. La finesse des cordes précède avec une certaine onctuosité certains emportements de l’orchestre tout entier avant qu’un passage quasi mahlérien ne permette aux divers solistes (parmi lesquels on soulignera l’excellente prestation du clarinettiste Wenzel Fuchs) d’étinceler au sein d’une entrée en matière des plus convaincantes.


Le violoniste américain Gil Shaham est une «vieille» connaissance du Philharmonique de Berlin avec lequel il débuta en 1988 (il jouait alors le Concerto de Sibelius sous la direction de Sir Colin Davis). La vigoureuse poignée de mains puis, au moment des saluts, la chaleureuse accolade et les propos échangés avec Daniel Stabrawa, Konzertmeister du soir, témoignaient de cette gentillesse sincère, le soliste ne se départant jamais de son sourire juvénile, quand bien même il aurait à interpréter le Second Concerto (1937-1938) de Bartók. Mais que sont les difficultés techniques pour Gil Shaham, lui qui a notamment enregistré les deux Concertos de Bartók sous la baguette de Pierre Boulez (Deutsche Grammophon)? Dès les pulsations inaugurales de la harpe, l’archet est ferme et enchaîne sans hésitation mais avec toujours une grande justesse interprétative les phrases méditatives et certains passages véritablement diaboliques. L’orchestre, conduit par la baguette à la fois directive et précise de Susanna Mälkki, éclate avec une vigueur et des accents qui ne sont pas sans évoquer le fameux Concerto pour orchestre du compositeur hongrois. C’est au contraire un Andante tranquillo tout en lyrisme qui succède au premier mouvement, le scintillement de la harpe et du célesta faisant écho au jeu ciselé de Shaham. Quant à l’Allegro molto conclusif, il fait figure de promenade de santé pour le soliste, la musique dansant à qui mieux-mieux sur ce faux rythme de valse à trois temps, la fougue initiale reprenant la dessus jusqu’à une incroyable dernière envolée. Triomphalement applaudi, Gil Shaham offrit au public – et à Susanna Mälkki qui, pour l’occasion, resta sur scène en partageant la chaise d’un des premiers violons – la célèbre Gavotte tirée de la Troisième Partita en mi majeur de Bach: un prolongement trop bref de l’excellence de ce soliste si attachant!


On se souvient de la magnifique interprétation que Sir Simon Rattle avait donnée à Paris de la Deuxième symphonie de Sibelius en février 2010 à la tête des Berliner Philharmoniker. À ce jeu-là, affinités finlandaises aidant peut-être, Susanna Mälkki releva le défi avec panache et, disons-le, une indéniable réussite. Inutile d’insister sur les détails ou les passages qui nous subjuguèrent grâce à des pupitres ce soir superlatifs – le legato des cordes, les accents ou les pizzicati rageurs des contrebasses, la souveraine beauté des quatre cors... Attachons-nous bien davantage à la conception qu’a pu avoir Mälkki de cette grande symphonie: elle a choisi de dérouler sous nos yeux une vaste fresque où chaque mouvement n’est que le prolongement du précédent et, donc, où la cohérence de l’ensemble (qui ne fait pour autant jamais passer au second plan les détails orchestraux) prime sur tout autre considération. Les traits sont abrupts, les silences et césures parfaitement respectés, la grandiose coda conclusive n’effaçant pas le souvenir d’un deuxième mouvement tout en subtilité: Susanna Mälkki donne l’impression d’être à chaque instant une fine lame dont, encore une fois, la précision gestuelle fait toujours mouche. Un superbe concert qui nous donne envie de revoir prochainement cette cheffe à la tête des Berlinois: pour la saison 2018-2019 peut-être?


Le site de Susanna Mälkki
Le site de Gil Shaham
Le site de l’Orchestre philharmonique de Berlin



Sébastien Gauthier

 

 

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