About us / Contact

The Classical Music Network

Toulon

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Cendrillon ou la sociologie haute en couleur

Toulon
Opéra
01/24/2014 -  et 26, 28 janvier 2014
Gioacchino Rossini : La Cenerentola ossia la bontà in trionfo

José Maria Lo Monaco (Angelina), David Alegret (Don Ramiro), David Menéndez (Dandini), Evgeny Stavinskiy (Don Magnifico), Caroline Meng (Tisbe), Elisa Cenni (Clorinda), Jan Stava (Alidoro)
Chœur de l’Opéra de Toulon, Christophe Bernollin (chef de chœur), Orchestre de l’Opéra de Toulon, Edmon Colomer (direction musicale)
Jean-Philippe Clarac et Olivier Deloeuil (mise en scène, scénographie et costumes), Rick Martin (lumières)


(© Frédéric Stéphan)


Les ouvrages comiques présentent sur les sérieux et les fresques historiques l’avantage de se prêter à maintes adaptations et actualisations sans se donner la peine de forcer outre mesure le script. Ainsi en est-il de cette Cerenentola toulonnaise mise en scène par Jean-Philippe Clarac et Olivier Deloeuil. Signant décors et costumes, le duo ambitionne d’en souligner l’arrière-plan sociologique. Dans une maison semblable à un fragile colis de planches de bois – estampillé comme tel – Don Magnifico revêt l’écharpe bleue de quelque tifoso tandis qu’il a vainement épuisé l’héritage d’Angelina pour habiller ses deux filles avec robes et nœuds ridicules accentuant leur manque de grâce naturelle quand la Cendrillon paraît vêtue d’une robe XVIIe, comme un rêve dans lequel se glisse Ramiro, amateur de polo fringué pour l’occasion à l’avenant – mariage entre mirage ou réalité qui se résume, ainsi qu’il en est sans doute aujourd’hui des sentiments réduits à un conte de fées mercantilisé, en une pose vestimentaire. Peut-être la jalousie semi fraternelle et le caractère rustre du père sont-ils un peu unilatéralement soulignés, la dichotomie sociale vaguement façon Groseille-Le Quesnoy sous l’angle des sports passablement cliché, et les trots chorégraphiques ostensiblement tributaires de la comédie musicale. Mais l’énergie du spectacle emporte l’adhésion: c’est coloré, méridional avec le linge étendu aux fenêtres, l’inversion des rôles entre Dandini et le prince se fait aussi savoureuse que crédible, tant est si bien que le conte de Perrault revu par Rossini s’inscrit dans ce nouvel écrin avec un naturel au fond évident.


Dans le rôle-titre, José Maria Lo Monaco affirme irréfutablement la couleur requise, et dévoile une générosité ainsi qu’une fraîcheur de style qui témoignent de son expérience auprès des publics italiens. La virtuosité, franche, ne se caricature jamais, et si ses inflexions mélancoliques au début de la soirée se font aussi sobres que sincères, son «Non più mesta» conclut la soirée avec une allégresse communicative. Respectivement Tisbe et Clorinda, Caroline Meng et Elisa Cenni incarnent, par leur timbre légèrement acidulé, les deux sœurs avec le piquant nécessaire. Le Magnifico d’Evgeny Stavinskiy convainc par sa voix solide et son timbre homogène, tandis que David Menéndez, Dandini truculent et au métier impeccable, lui ravit la vedette, ainsi qu’au Ramiro de David Alegret – étroitesse et nasalisation de l’émission quand bien même il s’acquitte sans faute mais sans panache non plus de tous les contre-ut exigés. On ne s’attardera pas sur l’Alidoro sensiblement caverneux que réserve Jan Stava, ni sur le manque d’alacrité de la direction pourtant soignée d’Edmon Colomer à la tête d’un orchestre de la maison attentif. Préparés par Christophe Bernollin, les Chœurs de l’Opéra de Toulon se glissent dans des ensembles bien réglés à défaut d’être étourdissants – le fameux sextuor du second acte mérite une mention particulière. Une soirée honnête pour le plaisir des yeux, des oreilles, et des zygomatiques.



Gilles Charlassier

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com