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Politiquement très incorrect

Toulon
Opéra
01/27/2017 -  & 29*, 31 janvier 2017
Giuseppe Verdi: Un ballo in maschera
Alexandrina Pendatchanska (Amelia), Svetlana Sanders (Ulrica), Anna Maria Sarra (Oscar), Gaston Rivero (Riccardo), Dario Solari (Renato), Federico Benetti (Samuele), Nika Guliashvili (Tomaso), Mikhael Piccone (Silvano)
Orchestre et chœur de l’Opéra de Toulon, Rani Calderon (direction musicale)
Nicola Berloffa (mise en scène), Fabio Cherstich (décors), Valeria Donata Bettella (costumes), Marco Giusti (lumières)


F. Benetti & S. Sanders (© Frédéric Stéphan)


Cette production du Bal masqué est importée du Teatro Fraschini de Pavie. Nicola Berloffa, le metteur en scène, explique dans une interview accordée à la presse italienne qu’il base son travail sur l’ambiguïté schizophrénique (sic) de cette œuvre et son kaléidoscope d’environnements variés où alternent légèreté, intrigue politique, drame, scène d’amour platonique, folklore et occultisme. Jusque-là, rien que nous ne sachions déjà. Plus contestables, en revanche, sont les moyens utilisés pour la transposition de ce thriller à la société américaine du milieu du XIXe siècle (rappelons que Verdi, à contrecœur certes, avait déjà modifié le cadre de l’histoire et les personnages principaux, passant de la Suède aux Etats-Unis, et de Gustave III au comte de Warwick, gouverneur de Boston). Nous voilà aujourd'hui à Washington en 1865. Cette prétention de nous faire voyager dans l’« imaginaire historique et visuel de ce que pourrait être un drame romantique dans le Washington du milieu du XIXe siècle » devient très vite irritante et le résultat, au fond, n’est qu’une carte postale d’un goût douteux. La reconstitution du Théâtre Ford de Washington où l’on nous montre l’assassinat d’Abraham Lincoln présent dans une loge d’avant-scène, tient lieu de fil conducteur. C’est peu pour les intentions. Beaucoup plus graves, tous les clichés, les poncifs réducteurs d’un « folklore » américain dont la représentation caricaturale donne un parfum nauséabond à cette sauce d’un autre âge. Tout, ou presque, y passe: les Amish, les Indiens armés de leurs arcs ou de leurs tomahawks, les cowboys pointant sans cesse leurs « bâtons qui crachent le feu » et tirant sans relâche sur de gros cigares, pour ne citer que quelques exemples... Et c’est bien là tout le problème de ces pseudo-mises en scène qui n’offrent aucune perspective, classique ou nouvelle. On fait dans la surenchère décorative sans pertinence, gratuite et, dans ce cas, politiquement très incorrecte.


Fort heureusement, l’exécution musicale rachète cette production. La Bulgare Alex Penda, qu’on ne présente plus, est une Amélia de bonne facture: comédienne convaincante à la voix ample et riche en nuances servie par une solide technique où alternent avec assurance déclamation et douceur. Pourtant, on se demande parfois si ce rôle n’est pas un peu trop lourd pour elle. Le Riccardo de l’Uruguayen Gaston Rivero possède la pugnacité, la vaillance, et le timbre requis mais la tessiture accuse un trou béant dans le passage du medium au grave. Le Renato de Dario Solari, l’autre Uruguayen de cette distribution, ne manque pas de prestance et le chanteur est à l’aise dans ce rôle de baryton verdien malgré un timbre qui manque un peu d’éclat. Anna Maria Sarria en Oscar est tout à fait à sa place dans cet emploi avec sa pétulance, et une agilité vocale de bon aloi dans les quelques acrobaties de ses deux airs. Contralto typique de l’école russe, Svetlana Sanders (Ulrica) rassemble les suffrages du public avec la puissance vocale et les graves ténébreux et profonds attendus. Enfin, Federico Benetti (Samuele), Nika Guliashvili (Tomaso), et Mikhael Piccone (Silvano) complètent consciencieusement une distribution assez homogène dont la qualité a le mérite de faire un peu oublier une «mise en scène» affligeante.


On ne saurait passer sous silence la direction élégante et précise du chef israélien Rani Calderon qui parvient à tirer de l’orchestre un son racé, parfois impétueux et assourdissant, ni la prestation du chœur, tout à fait digne de louanges.



Christian Dalzon

 

 

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