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Un Così pour Despina et Alfonso

Toulon
Opéra
11/22/2015 -  et 24, 27 novembre 2015
Wolfgang Amadeus Mozart : Così fan tutte, K. 588
Marie-Adeline Henry (Fiordiligi), Marie Gautrot (Dorabella), Anna Kasyan (Despina), Leonardo Ferrando (Ferrando), Alexandre Duhamel (Guglielmo), Riccardo Novaro (Don Alfonso)
Chœur de l’Opéra de Toulon, Christophe Bernollin (chef de chœur), Orchestre de l’Opéra de Toulon, Darell Ang (direction musicale)
Gilles Bouillon (mise en scène), Bernard Pico (dramaturgie), Nathalie Holt (décors), Marc Anselmi (costumes), Marc Delamézière (lumières)


(© Frédéric Stéphan)


Une semaine après les massacres terroristes du 13 novembre, les répercussions se font toujours aussi vives, et l’Opéra de Toulon en témoigne pour sa matinée de première de Così fan tutte le dimanche 22, que les contrôles à l’entrée, plus soucieux de zèle procédurier que d’efficacité – à laquelle on finit par les soumettre –, retardent de près d’une demi-heure. En ces terres que le soleil n’est pas le seul à brunir, l’hommage aux victimes substitue, en guise de recueillement, l’élan patriotique de La Marseillaise à la gravité intime d’une minute de silence.


Importée de Tours où elle avait été donnée la saison dernière, la production de Gilles Bouillon inscrit la leçon de Don Alfonso dans des pastels renouvelant l’illusion napolitaine, que Nathalie Holt a dessinés pour l’agrément de l’œil. Les costumes imaginés par Marc Anselmi jouent de la théâtralité, tout en modérant la caricature où l’on pourrait enfermer le médecin et le notaire grimés par Despina, quand les lumières Marc Delamézière ménagent un équilibre en artifice et élégance. D’aucuns discuteront le panneau de fausse verrière qui tombe régulièrement des cintres pour ponctuer l’espace à la façon d’un thème récurrent dont la fonction serait à déterminer, tandis que la direction d’acteurs semble laisser une relative latitude aux interprètes, au gré de leurs complexions respectives.


Applaudie récemment dans le rôle-titre d’Armide à Nancy ou en Chérubin – chez Massenet – à Montpellier, Marie-Adeline Henry sait nourrir Fiordiligi d’une authentique intensité dramatique, évidente dans le «Per pietà», où elle se révèle supérieure à un «Come scoglio» qui semble malmener le confort d’une tessiture au médium généreux. Annoncée malade en début de représentation, Marie Gautrot ne laisse pour autant que difficilement deviner le charme d’une voix à la consistance rendue sans doute inégale par son indisposition passagère. L’incarnation ne laissera vraisemblablement guère de trace indélébile. C’est, de fait, celle d’Anna Kasyan qui retient finalement l’attention. Ni colibri, ni timbre fatigué, sa Despina dévoile un tempérament qui contraste avec les pâles domestiques que l’on entend souvent. Avec rondeur et éclat, elle sait distiller un parfum de coquetterie lyrique dans ses airs, quand les costumes médical ou notarial lui font chercher des ressources peut-être plus convaincantes dans le premier que la difficile nasalité étranglée du second – dont elle prend le risque, ce qu’il convient de reconnaître.


Le versant masculin de la distribution s’avère plus égal. Homonyme de son personnage, le ténor italo-uruguayen Leonardo Ferrando se montre prometteur: frémissant de juvénilité, l’assurance du timbre çà et là hésitante recèle aussi celle de l’amant et contribue à sa crédibilité. En Guglielmo qu’il a déjà rodé ailleurs, Alexandre Duhamel n’a pas ces scrupules, et affirme une crâne virilité qui ne doute pas de ses attraits sur la gent féminine. La solidité désormais confirmé de son métier résonne avec évidence dans le virtuose «Rivolgete» que les représentations tourangelles avaient eu l’intelligence de faire retentir, et rend superflus les sauts bondissants où la mise en scène égare le baryton français. Dans la plénitude de ses moyens, Riccardo Novaro résume idéalement la mesure d’un Don Alfonso qui tire les ficelles de l’intrigue. Préparés par Christophe Bernollin, les Chœurs de l’Opéra de Toulon remplissent leur office, de même que la fosse, sous la baguette attentive de Darell Ang.



Gilles Charlassier

 

 

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