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Haendel en version parodique

Toulon
Opéra
04/07/2015 -  et 10, 12 avril 2015
Georg Friedrich Haendel : Giulio Cesare, HWV 38
Sonia Prina (Giulio Cesare), Roberta Invernizzi (Cleopatra), Teresa Iervolino (Cornelia), Monica Bacelli (Sesto), Daniela Pini (Tolomeo), Benedetta Mazzucato (Nireno), Riccardo Novaro (Achilla), Pierre Bessière (Curio), Sophia Johnson, Hélène Megy, Nathalie Dodivers, Laetitia Lefebvre, Palmira Venzetti, Claude Allain, Pascal Carbon, Julien Pastorello, Nicolas Sitkèvitch, Steve Terruzy (comédiens)
Orchestre de l’Opéra de Toulon, Rinaldo Alessandrini (direction musicale)
Frédéric Andrau (mise en scène), Luc Londiveau (scénographie), Jérôme Bourdin (costumes), Ivan Mathis (lumières)


(© Frédéric Stephan)


Si le baroque fait désormais parti du répertoire courant de la plupart des théâtres lyriques français, souvent grâce au partenariat ou la résidence d’un ensemble «spécialisé», l’Opéra de Toulon n’avait encore jamais porté à la scène Jules César de Haendel, et la gageure n’en est que plus significative. Les forces de la maison sont indéniablement plus accoutumées à Verdi et au corpus italien – remarquablement mis en valeur en particulier par le directeur musical Giuliano Carella – qu’à la basse continue, et Rinaldo Alessandrini a tenté de leur rendre l’idiome haendélien moins allophone: on n’évaluera pas le résultat à l’aune des canons esthétiques aujourd’hui en vigueur.


Le travail d’expressivité ne démérite nullement et se révèle attentif au plateau vocal, dominé par la Cléopâtre nuancée de Roberta Invernizzi. Nonobstant le ridicule scénographique dont elle est affublée, on ne peut rester insensible à l’intensité qui palpite dans le «Se pietà», livrant une vibrante imploration, empreinte d’une noblesse jamais démentie, tout comme le «Piangerò», défaite de l’orgueil, mais non de la musique. On retiendra également le solide Achille de Riccardo Novaro, au grain nourri. Teresa Iervolino enveloppe Cornélie d’un timbre chaleureux quand Monica Bacelli insuffle à Sextus ce qu’elle peut de vindicatif. Mentionnons encore l’honnête Curio de Pierre Bessière. Dans cette distribution placée sous le signe des femmes, où les castrats s’actualisent en mezzos et contraltos plus qu’en contre-ténors, Daniela Pini dessine un Ptolémée androgyne autant que le Nirenus de Benedetta Mazzucato, lesquels ne le cèdent en rien au Jules César de Sonia Prina, soulignant sans réserve les contrastes de registres, faute sans doute d’être en mesure rester dans les limites d’une certaine homogénéité vocale, au diapason d’une production caricaturant et parodiant l’Antiquité, aux confins du bon goût.


Car Frédéric Andrau a choisi de détourner le livret de son sérieux historique, pour en privilégier l’irrévérence sous-jacente. Les sens du spectateur sont généreusement mis à contribution, jusqu’à l’olfaction avec le fumet du poulet rôti, au milieu d’une orgie de couleurs et grimaces. Un tel parti pris ne manque pas d’intérêt, et l’anachronisme possède des vertus que d’autres ont déjà révélées. Mais l’on ne sent guère dans cette vaste bouffonnade de propos plus consistant que ses propres préférences humoristiques, habillant les souverains égyptiens d’une nudité de latex, avec seins et verge à l’avenant. Du moins conservera-t-on un vestiaire de toges accrédité par l’histoire, à rebours de modernisations aseptisées dans le visuel autant que la dramaturgie. On ne peut pas gagner sur tous les tableaux.



Gilles Charlassier

 

 

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