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Folies bourgeoises

Milano
Teatro alla Scala
07/04/2014 -  et 7, 10, 12, 15, 17, 19, 21 juillet 2014
Gioachino Rossini : Le Comte Ory
Juan Diego Flórez*/Colin Lee (Le Comte Ory), Roberto Tagliavini (Le Gouverneur), José Maria Lo Monaco*/Chiara Amarù (Isolier), Stéphane Degout*/Nicola Alaimo (Raimbaud), Aleksandra Kurzak*/Pretty Yende (La Comtesse de Formoutier), Marina De Liso (Ragonde), Rosanna Savoia (Alice)
Coro del Teatro alla Scala, Bruno Casoni (préparation), Orchestra del Teatro alla Scala, Donato Renzetti (direction musicale)
Laurent Pelly (mise en scène, décors et costumes), Christian Räth (reprise de la mise en scène) Joël Adam (lumières)


(© Brescia/Amisano-Teatro alla Scala)


Après avoir vu le jour à Lyon en février, la mise en scène du Comte Ory de Rossini signée Laurent Pelly débarque à la Scala de Milan, coproducteur du spectacle, dans une distribution entièrement différente. Pour sa première incursion dans l’univers du maître de Pesaro, l’artiste français livre une production faite de nombreux clins d’œil, pleine d’ironie et de dérision, qui déclenche peut-être moins de fous rires que sa désormais très célèbre Fille du Régiment, mais qui n’en demeure pas moins d’une grande subtilité. Se référant expressément à Chabrol et à Bunuel, Laurent Pelly tourne le dos au Moyen-Age du livret pour transposer l’action à notre époque, dans une salle des fêtes d’une petite ville de province dans laquelle on s’ennuie à mourir et où les habitantes sont réunies pour écouter les conseils prodigués par un gourou indien, yogi et fakir à la fois, pendant que les maris sont à la guerre, en Afghanistan ou au Mali. Sous leur allure respectable de grandes bourgeoises, les dames sont vite émoustillées, d’autant que le gourou joint le geste à la parole... Le second acte se déroule dans la demeure de la comtesse de Formoutier, où, par un astucieux glissement de décor de cour à jardin, on passe en un tournemain d’une pièce à l’autre. La scène où les chevaliers du comte Ory arrivent déguisés en nonnes puis s’enivrent est particulièrement hilarante, de même que le célèbre trio final, dans le lit de la comtesse, où tout est ici très explicite. Bref, un spectacle plein d’idées et sans temps mort, où l’humour règne en maître, mais qui n’a pas eu l’heur de plaire à tous les spectateurs de la première milanaise, l’équipe de production ayant dû subir les foudres d’une partie du public. Le mécontentement est peut-être à rechercher dans une production pouvant sembler par trop française dans ses références.


Annoncé souffrant d’une trachéite, Juan Diego Flórez n’en a pas moins assuré la première représentation, mais a d’ores et déjà annulé sa participation aux deux suivantes, laissant sa place au ténor de la seconde distribution, Colin Lee. Le chanteur péruvien a escamoté quelques aigus et ne s’est aventuré dans aucune cadence, mais malgré son indisposition, il a fait preuve d’un style souverain et d’une incroyable assurance dans les vocalises, comme à son habitude dans ce répertoire, sans parler d’une excellente diction française. La Comtesse de Formoutier d’Aleksandra Kurzak est une belle surprise, la chanteuse se révélant aussi bonne actrice dans son personnage de bourgeoise austère et hystérique, voulant préserver les apparences à tout prix mais qui, l’ennui aidant, est vite tentée de céder aux avances d’Ory et de son page. Le rôle est extrêmement difficile sur le plan vocal, mais la soprano polonaise s’en tire avec les honneurs, en dépit d’aigus un peu raides. Malgré un bon phrasé et une voix de velours, l’Isolier de José Maria Lo Monaco est un peu en retrait. Parmi les rôles secondaires, il convient de signaler avant tout le Raimbaud plein de verve et à la voix bien timbrée de Stéphane Degout et la Ragonde bigote plus vraie que nature de Marina De Liso. Dans la fosse, Donato Renzetti se montre peu inspiré au démarrage, lourd et scolaire, couvrant souvent les chanteurs au demeurant, pour finir par se laisser emporter par la légèreté et la pétulance de la musique de Rossini.



Claudio Poloni

 

 

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