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Ouverture franco-russe Colmar Eglise Saint-Matthieu 07/03/2014 - Felix Mendelssohn: Die Hebriden (Fingals Höhle), Ouverture en si mineur, opus 26
Piotr Ilyitch Tchaïkovski: Concerto pour violon en ré majeur, opus 35
Johannes Brahms: Symphonie n° 2 en ré majeur, opus 73 Vadim Gluzman (violon)
Orchestre national du Capitole de Toulouse, Tugan Sokhiev (direction musicale)
Grande figure de la vie musicale du XXe siècle, Evguéni Svetlanov est venu diriger à quatre reprises au festival de Colmar, de 1992 à 1995. Vladimir Spivakov, qui a admiré – et aidé à la fin de sa vie – le chef d’orchestre, a voulu lui rendre hommage, douze ans après sa disparition. Et comment mieux inaugurer cette vingt-sixième édition qu’en invitant l’Orchestre national du Capitole de Toulouse et son directeur musical, Tugan Sokhiev, nommé au Bolchoï de Moscou depuis janvier dernier, parfait exemple de la rencontre entre un son français et les mains passionnées d’une baguette russe?
Le programme de cette soirée d’ouverture en l’église Saint-Matthieu mêle tradition germanique et inspiration slave, mettant l’appétit avec Les Hébrides de Mendelssohn. Avec une grande économie de geste, le chef ossète fait vibrer la plénitude sonore de la phalange toulousaine, où résonnent les tutti chargés des humides et mystérieuses nébulosités de l’archipel écossais. Ce Mendelssohn-là, empreint d’une robuste dynamique, ne cède point aux charmes faciles de la sentimentalité pittoresque.
T. Sokhiev (© Erik Weiss)
Changement de décor avec le Concerto pour violon de Tchaïkovski où brille Vadim Gluzman. Dans une partition à la virtuosité exigeante et exposée, le soliste ne craint point la lumière et scintille d’un vibrato aussi fluide que riche d’harmoniques. La confrontation avec l’orchestre dans l’Allegro initial regarde davantage vers l’émulation que vers une surenchère compétitive, et préserve le son généreux de l’ensemble de toute vulgarité déplacée. La délicate Canzonetta chante ici avec un lyrisme expressif et équilibré, sobre et élégant, quand le finale éblouit d’une volubilité jamais superficielle. Si besoin en était auprès de certaines oreilles aristocratiques, Vadim Guzman et Tugan Sokhiev réhabilitent l’authentique noblesse de l’Opus 35 de Tchaïkovski. La «Gavotte en Rondeau» de la Troisième Partita de Bach constitue une confirmation de cet archet subtil qui ne sacrifie point le sentiment à la légèreté – la maîtrise discrète du rubato en témoigne.
La seconde partie de soirée offrait la démonstration d’un impeccable savoir-faire dans la Deuxième Symphonie de Brahms. Pour pastoral qu’il soit, l’Opus 73 révèle aussi une palette technique indiscutable que fait ressortir Tugan Sokhiev du maelström orchestral. Comment résister à la densité des basses – contrebasses et violoncelles s’épanouissent admirablement – quand les bois se détachent avec sensualité? Détails savoureux et puissance de la masse se déploient sous une baguette instinctive. Nul besoin d’autorité pour que chef et musiciens se comprennent, insufflant à la partition un naturel jubilatoire. Et hommage oblige, la variation Enigma choisie dans la plus célèbre page d’Elgar est dédiée à Svetlanov, suivant un bel exemple de foi artistique.
Le site du festival international de Colmar
Le site de Vadim Gluzman
Gilles Charlassier
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