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Les commères sont à la fête

Lausanne
Opéra
06/06/2014 -  et 8, 11, 13, 15* juin 2014
Otto Nicolai : Die lustigen Weiber von Windsor
Valentina Farcas (Frau Fluth), Eve-Maud Hubeaux (Frau Reich), Michael Tews (Sir John Falstaff), Oliver Zwarg (Herr Fluth), Benoît Capt (Herr Reich), Céline Mellon (Anna Reich), Attilio Glaser (Fenton), Stuart Patterson (Sparlich), Sacha Michon (Dr. Cajus), Jean-Luc Borgeat (Le thérapeute)
Chœur de l’Opéra de Lausanne, Véronique Carrot (préparation), Orchestre de Chambre de Lausanne, Frank Beermann (direction musicale
David Hermann (mise en scène), Clara Pons (assistante à la mise en scène), Rifail Ajdarpasic (décors), Ariane Isabell Unfried (costumes), Fabrice Kebour (lumières)


(© Marc Vanappelghem)


Attention, événement : l’Opéra de Lausanne vient de créer la sensation en exhumant les très rares Joyeuses Commères de Windsor d’Otto Nicolai, musicien entré dans la légende comme le fondateur de l’Orchestre Philharmonique de Vienne. Le spectacle est une réussite sur toute la ligne et devrait contribuer à réhabiliter une œuvre injustement tombée dans l’oubli, même dans l’espace germanophone. L’opéra Die lustigen Weiber von Windsor, d’après Shakespeare, a vu le jour à Berlin en mars 1849. Le compositeur décède deux mois plus tard, à 39 ans seulement, et ne verra donc pas le succès de son ouvrage un peu partout en Europe. Un succès de courte durée cependant, car le Falstaff de Verdi en 1893 viendra sonner le glas de la partition de Nicolai. Une partition traversée de bout en bout par une riche veine mélodique, avec une musique se voulant légère et délicate. En l’écoutant, on pense aussi bien à Mozart qu’à Rossini, à Weber comme à Offenbach, Nicolai se réclamant à la fois de l’école allemande et de la tradition italienne. L’Ouverture, pétillante à souhait, est emblématique de l’œuvre et figure d’ailleurs régulièrement au programme des concerts symphoniques.


David Hermann a choisi de transposer l’action dans les années 1970 : deux voisines, Frau Fluth et Frau Reich, se retrouvent dans un bar cossu et s’aperçoivent qu’elles ont toutes les deux reçu la même lettre enflammée d’un mystérieux Sir John Falstaff... Les commères décident alors de tendre un piège au goujat, Frau Fluth profitant en outre de l’occasion pour attiser la jalousie de son mari. Le metteur en scène a supprimé tous les dialogues, tirés pratiquement tels quels de Shakespeare, et a ajouté à la production un psychothérapeute (rôle parlé tenu avec beaucoup d’humour par le comédien Jean-Luc Borgeat), dans le cabinet duquel viennent consulter les époux Fluth parce que leur couple bat sérieusement de l’aile. On l’aura compris, Falstaff est vu ici comme l’objet de tous les désirs et de toutes les convoitises, un fantasme qui, d’ailleurs, est dissimulé par un rideau pendant une bonne partie du spectacle. La transposition est ingénieuse, elle fonctionne à merveille et le psychanalyste s’insère tout naturellement dans la production, avec la fonction aussi de résumer l’action en français.


A la tête de l’Orchestre de chambre de Lausanne, Frank Beermann tient le plateau bien en main et offre une lecture alerte et vive, sans aucun temps mort. La distribution est parfaitement homogène et de très haut niveau. S’y détache néanmoins la soprano roumaine Valentina Farcas, qui incarne une Frau Fluth bon chic bon genre et névrosée, qui mène tout son petit monde à la baguette et qui sait exactement ce qu’elle veut, n’hésitant pas une seconde à tromper son mari avec le chevalier bedonnant. Oliver Zwarg campe avec flegme et avec un timbre bien projeté un époux débonnaire, un peu dépassé par les événements. On retiendra aussi la voix ample et grave de la jeune mezzo suisse Eve-Maud Hubeaux en Frau Reich, alors que son mari est incarné par un Benoît Capt au chant particulièrement élégant. Les amoureux ne sont pas en reste, avec Attilio Glaser en Fenton au timbre ardent et Céline Mellon en Anna aux vocalises parfaitement assurées. Seul le Falstaff de Michael Tews est légèrement en retrait sur le plan vocal. Il ne reste plus qu’à espérer que cette splendide production saura retenir l’attention d’autres théâtres lyriques. Ce qui serait amplement mérité pour Les Joyeuses Commères de Nicolai.



Claudio Poloni

 

 

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