Back
Question without answer Paris Palais Garnier 11/13/1999 - et 15, 17*, 19, 22, 24, 26, 28 novembre 1999 Francis Poulenc : Dialogues des carmélites Patricia Racette (Blanche), Felicity Palmer (la Prieure, Mme de Croissy), Nancy Gustafson (la nouvelle Prieure, Mme Lidoine), Kathryn Harries (Mère Marie), Marie Devellereau (Soeur Constance), Richard Stilwell (le Marquis de la Force), William Burden (le Chevalier), Georges Gautier (l'Aumonier)
Francesca Zambello (mise en scène)
Orchestre de l'Opéra national de Paris, Seiji Ozawa (direction)
Après un quart de siècle à la tête de l'Orchestre symphonique de Boston, Seiji Ozawa abandonnera, en 2002, son orchestre pour se consacrer à l'opéra, à Vienne surtout. Heureux viennois (et pauvres bostoniens !) qui bénéficieront de l'un des plus grands chefs actuels, un chef à la direction incisive, acérée, toujours attentive et, qui par sa seule présence, transfigure une soirée d'opéra. Les parisiens aussi en profiteront, avec ces Dialogues des carmélites (puis La Damnation de Faust dans un an) qui trouvent, sous sa direction, une urgence et une tension permanentes.
Ces qualités ne se retrouvent pas dans le travail de Francesca Zambello : face à tous les tourments qui traversent les personnages, aux situations de chaos et de destruction qui les balayent, la mise en scène assure le minimum et le décor - deux grands panneaux mobiles - possède pour unique intérêt de s'adapter aux différents espaces, sans toutefois les caractériser clairement. Du fonctionnel, sans plus. Très à l'aise dans les "grosses productions" comme Billy Budd, Turandot ou Salammbô (toutes les trois à Bastille), l'américaine Francesca Zambello devient, dans ce drame intérieur, bien démunie et approximative.
La distribution se révèle parfaitement à la hauteur, très homogène et, bien qu'elle soit essentiellement anglophone, dotée d'une prononciation très correcte. Patricia Racette possède ce qu'il faut d'assurance et de fragilité, de luminosité et de d'angoisse pour incarner le conflit de la foi et de la peur qui caractérise Blanche. Nancy Gustafson prête l'exquise tendresse de son timbre à la nouvelle Prieure et Felicity Palmer ses talents dramatiques à la Prieure agonisante, même si le timbre est par moment trop dur. Seule Kathryn Harries semble manquer des sons graves qu'exige l'inflexible Soeur Marie. Mais une question se pose immédiatement : pourquoi ne pas avoir puisé dans le réservoir des jeunes chanteurs français ? L'Opéra de Paris a récemment (en 1989 et 1994) monté deux fois les Dialogues avec les membres de son Ecole d'art lyrique, on pouvait y voir Sylvie Brunet (superbe soprano aux apparitions trop rares), Béatrice Uria-Monzon (excellente chanteuse que l'on voit un peu trop exclusivement en Carmen), Natalie Dessay, Marie-Ange Todorovitch... Avec Marie Devellereau qui incarne à merveille Soeur Constance - la révélation de la soirée - une telle distribution aurait mis en lumière la qualité et la vigueur du jeune chant français dans une oeuvre essentielle du répertoire national.
Philippe Herlin
|