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L’art du conteur

Strasbourg
Opéra national du Rhin
05/07/2014 -  
Lieder et Mélodies de Schubert, Loewe, Schumann, Liszt, Weill, Wolf et Fauré
Stéphane Degout (baryton), Simon Lepper (piano)


S. Degout (© Julien Benhamou)


Lors de son précédent passage à Strasbourg, en 2011, Stéphane Degout nous avait laissé le souvenir d’un jeune baryton nanti d’une voix de belle envergure, et de surcroît fort bon comédien, incarnant magnifiquement les errances psychologiques du rôle-titre d’Hamlet d’Ambroise Thomas. En récital cette fois, la voix nous paraît plus limitée en projection. Mais peut-être Stéphane Degout a-t-il tenu lui-même à réduire la voilure, en vue de l’exercice forcément plus intimiste d’une soirée de Lieder et Mélodies avec piano.


Première partie allemande artistement composée, faisant la part belle au genre de la Ballade romantique, narrations épiques que l’on trouve ici sous la plume de six compositeurs différents. Stéphane Degout se mue en récitant et en conteur, incarnant des personnages multiples avec une belle versatilité et surtout une maîtrise de la langue allemande d’une clarté et d’une précision étonnantes. Nul besoin de se référer au programme de salle pour comprendre chaque péripétie. Deux sommets du genre avec l’inquiétant Der Zwerg de Schubert et les allusions horribles d’Edward de Loewe. Deux tableaux vivants ensuite : la grande fresque babylonienne du Belsatzar de Schumann et le portrait plus intimiste des Drei Zigeuner de Franz Liszt. Ensuite une rare et morbide Ballade vom ertrunkenen Mädchen (Ballade de la jeune fille noyée) de Kurt Weill sur un texte de Bertolt Brecht, hommage à Rosa Luxemburg assassinée, dont le statisme glauque s’enchaîne avec la frénésie mieux connue du Feuerreiter d’Hugo Wolf, qui donne à l’accompagnateur Simon Lepper de belles occasions de briller.


Une voix aussi éminemment francophone nous devait aussi quelques chefs-d’œuvre de la mélodie française, représentés en début de seconde partie par Automne et surtout un Horizon chimérique complet de Fauré. Moins de surprises qu’auparavant, tant Stéphane Degout est simplement parfait dans ce répertoire qu’il nous restitue avec une évidence qui se passe de tout commentaire. La théâtralité précédente n’est plus de mise, l’incarnation s’intériorise, voire peut paraître éventuellement moins impliquée, mais la perfection du style s’impose.


Trois Sonnets de Pétrarque plus risqués en fin de programme, où l’écriture de Liszt prend des allures opératiques italiennes qui font apparaître quelques tensions : l’intendance du souffle devient davantage perceptible, le timbre est parfois moins homogène et quelques duretés inconnues auparavant peuvent apparaître. Attention à ne pas compromettre trop vite d'aussi beaux moyens par des prises de rôle inconsidérées. On devine ici des tentations verdiennes qui pourraient s’avérer dangereuses si elles se concrétisaient prématurément.



Laurent Barthel

 

 

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