Back
Le rire du théâtre Nantes Théâtre Graslin 05/22/2014 - et 24, 26*, 28, 30 mai, 1er, 3 (Nantes), 13, 15, 17 (Angers) juin 2014 Wolfgang Amadeus Mozart : Die Zauberflöte, K. 620 James Creswell (Sarastro), Olga Pudova (La Reine de la nuit), Elmar Gilbertsson (Tamino), Marie Arnet (Pamina), Ruben Drole (Papageno), Mirka Wagner (Papagena), Eric Huchet (Monostatos), Katia Velletaz (Première Dame), Emilie Renard (Deuxième Dame), Ann Taylor (Troisième Dame), Tyler Duncan (Premier Prêtre, Orateur), Gijs Van der Linden (Second Prêtre, Premier Homme d’armes), Guy-Etienne Giot (Second Homme d’armes), Camille Dattin, Hermine Loubert, Anne-Cécile Robert/Cyprien Fricaud, Philippine Quentin, Capucine Rabouille (Trois enfants)
Chœur d’Angers Nantes Opéra, Maîtrise de la Perverie, Xavier Ribes (direction des chœurs), Orchestre national des Pays de la Loire, Mark Shanahan (direction musicale)
Patrice Caurier et Moshe Leiser (mise en scène), Christian Fenouillat (décors), Agostino Cavalca (costumes), Christophe Forey (lumières)
C’est avec une reprise d’une production qui avait déjà connu un certain succès que le Théâtre Graslin referme sa saison, La Flûte enchantée revisitée par le duo Patrice Caurier et Moshe Leiser auquel Angers Nantes Opéra se montre fidèle, à rebours des autres scènes françaises boudant cet équipage pourtant célébré dans toute l’Europe. Sans doute l’Ouest a-t-il encore raison sur le jacobinisme dans cette mise en scène qui rend hommage au théâtre populaire de Schikaneder avec un sens comique très enlevé.
Le public nantais ne s’y est pas trompé, venu nombreux stimuler ses zygomatiques avec les gags qui parsèment généreusement le spectacle, à l’instar de ces animaux en peluche répondant aux sortilèges des clochettes de Papageno. La lecture proposée ne craint pas le premier degré et, sans effacer la dimension initiatique de l’œuvre, la met à la portée du spectateur, estimant que le rire est aussi un chemin pour accéder au savoir. A rebours des partisans de la profusion de moyens et des appuis des outils non théâtraux, on fait ici exclusivement confiance aux planches, ménageant des clins d’œil à des techniques jugées aujourd’hui surannées, presque façon carton-pâte. L’ensemble n’en dégage pas moins une indéniable fraîcheur qui serait consensuelle si la barque du comique n’était parfois chargée à l’excès, déséquilibrant pour des palais un peu fins l’équilibre émotionnel de l’œuvre. A n’en pas douter, sans fausse pudeur, le propos s’adresse aux néophytes.
L’excellente acoustique du Palais Graslin ne pardonne pas. Certains solistes, au demeurant riches de qualités, s’y laissent prendre, renvoyant une impression d’inadéquation au style mozartien, à l’exemple du Tamino incontestablement lyrique d’Elmar Gilbertsson, vibrant un peu au-delà de l’élégante réserve où l’on cantonne généralement le personnage. Marie Arnet lui répond avec une Pamina honnête et presque touchante. Olga Pudova affronte sans détour une Reine de la nuit à l’impact indéniable, alors que James Creswell se révèle plus approximatif en Sarastro. Ruben Drole ne craint pas les excès en Papageno, tirant sans honte profit des ficelles de la régie, tandis que Mirka Wagner s’acquitte d’une Papagena convenable et Eric Huchet d’un Monostatos qui assume les effets de sa partie vocale. Le trio des Dames mêle le bon – les deux premières, Katia Velletaz et Emilie Renard – et le moins sûr – Ann Taylor. Recrutés au sein de la Maîtrise de la Perverie, les trois enfants prennent un plaisir certain à la scène. Préparés par Xavier Ribes, les chœurs de la maison remplissent leur office, évitant de céder à l’emphase. A la tête de l’Orchestre national des Pays de la Loire, Mark Shanahan, mozartien sensible, manque cependant d’autorité, audible dans une cohésion qui frôle çà et là les limites.
Gilles Charlassier
|