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Des Noces enlevées

Dijon
Auditorium
05/17/2014 -  et 19, 21*, 23 mai 2014
Wolfgang Amadeus Mozart : Le nozze di Figaro K.492
Thomas E. Bauer (Comte Almaviva), Sarah-Jane Brandon (Comtesse Almaviva), Maria Savastano (Susanna), Riccardo Novaro (Figaro), Olivia Vermeulen (Cherubino), Anna Maria Panzarella (Marcellina), Paolo Battaglia (Bartolo), Emanuele Giannino (Basilio), Joseph Shovelton (Don Curzio), Magali Arnault Stanczak (Barbarina), Erick Freulon (Antonio)
Chœur de l’Opéra de Dijon, Mihály Menealos Zeke (chef de chœur), Orchestre Dijon Bourgogne, Ashok Gupta (pianoforte), Jonathan Cohen (direction musicale)
Richard Brunel (mise en scène), Catherine Ailloud-Nicolas (dramaturgie), Chantal Thomas (scénographie), Axel Aust (costumes), Dominique Borrini (lumières)


Il y a toujours avec les coproductions portées sur les baptismaux par le festival d’Aix-en-Provence une crainte que la magie du Théâtre de l’Archevêché se trouve garrotée par un dais de bois et de pierre à la place de la brise céleste et des cigales. Mais, à l’instar d’une Traviata immortalisée mais non momifiée par la caméra qui a su trouver ses marques dans le format de l’Auditorium de Dijon, Les Noces de Figaro réglées par Richard Brunel, que l’on avait déjà chroniquées au moment où la Provence les avait étrennées (voir ici), se sont également adaptées à la scène bourguignonne.


Car si la transposition du château d’Almaviva au cœur d’un bureau d’avocat où rivalités et jalousies s’écrasent sur les cloisons en plexiglas reprend des scripts largement confirmés, le travail du metteur en scène français, qui ne s’y enferme pas – la chambre de la comtesse ne subit pas la trahison de l’actualisation – vaut surtout pour une direction d’acteurs animée où respire la confiance donnée aux interprètes – et ce n’est pas ici un vain mot. A titre d’exemple, on peut citer l’expression de victoire, le fameux «Hai già vinta la causa», que Susanna s’empresse de lancer à Figaro, sans prendre garde d’avoir attendu la fermeture de la porte pour que le comte n’entende point cette duplicité: vérité musicale et justesse dramatique ne font qu’un, jusque dans les jeux de masque dans le jardin auxquels la scénographie donne corps, parfois aux limites de la lisibilité immédiate. Evoquons encore la poésie des lumières de Dominique Borrini, qui conservent la trace de reflets d’arbres que l’on crût naturels, quand bien même les cotillons de la liesse finale débordent de contemporanéité quelque peu frelatée. Mais que ces menues réserves n’altèrent pas notre plaisir devant un spectacle solide et de bonne facture.


Côté voix, le poids des timbres se fait plus sensible ici que dans les gosiers légers qu’affectionnait Aix. Thomas E. Bauer impose une gravité et une densité qui mûrit significativement le Comte, sans posséder l’insinuante autorité d’un Peter Mattei. Sarah-Jane Brandon colore la Comtesse d’une certaine aura de mélancolie qui répond aux attendus du rôle. Ancienne pensionnaire de l’Atelier lyrique de l’Opéra de Paris, Maria Savastano pétille d’une fraîcheur très soubrette en Susanna quand le Figaro de Riccardo Novaro affirme autant de vitalité que de présence théâtrale. Cherubino blond et adolescent à s’y méprendre, Olivia Vermeulen récolte un succès mérité pour sa musicalité sympathique. La Marcellina légèrement élimée comme on l’imagine campée par Anna Maria Panzarella répond au Bartolo sanguin de Paolo Battaglia. Emmanuele Giannino et Don Curzio ne cèdent pas à la caricature de leurs Basilio et Don Curzio respectifs, tandis que Magali Arnault Stanczak séduit avec sa Barbarina aérienne, qui contraste avec l’Antonio d’Erick Freulon.


A la tête de l’Orchestre Dijon Bourgogne, Jonathan Cohen se montre soucieux de révéler les saveurs de la partition, même si elles peinent quelque peu à s’épanouir alors que la mise en place pourrait gagner en alacrité. Le pianoforte d’Ashok Gupta commente sans céder au bavardage et les Chœurs de l’Opéra de Dijon, préparés par Mihály Menealos Zeke, contribuent à l’honnêteté d’un travail qui mérite malgré tout d’être saluée. Notons enfin que, nonobstant la tourmente que l’on sait, la production tournera à Saint-Etienne du 15 au 21 juin prochains avec un cast identique, à l’exception de Comte de David Bizic.



Gilles Charlassier

 

 

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