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Piano superstar

Baden-Baden
Festspielhaus
03/20/2014 -  
Wolfgang Amadeus Mozart : Sonates pour piano n° 5, K. 189h [K. 283], n° 4, K. 189g [282] et n° 8, K. 300d [310]
Frédéric Chopin : Ballades n° 1, opus 23, n° 2, opus 38, n° 3, opus 47, et n° 4, opus 52

Lang Lang (piano)


L. Lang (© Manolo Press)


Le grand vaisseau du Festspielhaus de Baden-Baden est comble du haut en bas pour un «simple» récital de piano : voilà le témoin le plus tangible d’un vedettariat en pleine action. Cet effet Lang Lang, dont il faut concéder l’ampleur au plus formidable de nos draineurs d’intérêt pour la chose pianistique aujourd’hui, a des côtés indéniablement positifs.


Malheureusement cette attractivité ne s’accompagne pas de la sérénité propice aux grands concerts. Côté public on déplorera une concentration incertaine, qui certes ne va pas jusqu’au bavardage mais se trahit quand même par une invraisemblable quantité de râclements de bronches de tous timbres et hauteurs, multiples foyers d’activité expectorante dont la dissémination stéréophonique rend la récurrence obstinée encore plus horripilante. Côté soliste, on sait que la sobriété des mimiques et des attitudes n’est pas un des points forts de Lang Lang, mais finalement on est plutôt surpris par une relative retenue. Bien sûr le pianiste ne peut s’empêcher de nous montrer assez souvent à quel point la musique qui sourd de ses doigts semble le ravir, le tourmenter, le surprendre, l’angoisser, voire l’emmener vers des sommets d’extase... Mais ces démonstrations restent relativement canalisées et d’une spontanéité apparente qui aide à les faire pardonner. Toujours au registre de cette sensation d’improvisation soigneusement entretenue, le curieux enchaînement, au cours d’une première partie toute entière consacrée à Mozart, de l’Allegro conclusif de la Sonate K. 282 avec le début de la plus célèbre Sonate K. 310. Pourquoi pas ? Mais du coup le public ne sait plus vraiment où il en est, et applaudira le reste du programme en restant décalé d’un mouvement...


Que dire du Mozart de Lang Lang ? Déjà qu’il est courageux pour un pianiste virtuose de cette trempe de consacrer l’intégralité d’une première partie de récital à une musique aussi pauvre en notes. Et le pianiste chinois semble réellement aimer Mozart, auquel il essaye de donner un maximum de relief avec une conscience claire de ce que peut être un classicisme pondéré. On apprécie la clarté du jeu, plutôt économe en utilisation de la pédale, ainsi que la bonne logique des constructions. Et pourtant on reste assez généralement sur sa faim, du fait d’une impression diffuse de lecture trop cursive, comme si la différence n’était pas complètement faite avec des cahiers de Clementi. Appréciation certes sévère pour un jeu aussi joli et sensible, mais qui manque encore de maturité et, peut-être plus grave encore, d’ambition apparente de mûrir.


Seconde partie Chopin plus attendue, avec quatre Ballades dont la Première irrite tout particulièrement. Manque de concentration initial, excusable, avec une vilaine pédale oubliée sur le premier trait, mais surtout ensuite une exaspérante propension à ralentir dès qu’il y a peu de notes et à accélérer frénétiquement dès qu’il y en a beaucoup. Funambulisme ou trapèze volant, on ne sait trop, mais en tout cas on est au cirque! Ensuite, de Ballade en Ballade, Lang Lang paraît se bonifier, en gardant toujours le péché mignon de resserrer le tempo dès que la virtuosité augmente, mais à meilleur escient. Pleinement convaincante enfin, la Quatrième Ballade, joliment chantée au début et d’une aisance digitale incroyable à la fin. Bravo l’athlète ! C’est ce que semble clamer un public pleinement satisfait du numéro. Et pourtant il y a beaucoup plus que cela ici : un vrai souffle romantique, une vie intense et trépidante, servis pas des doigts certes infaillibles mais aussi au service d’une interprétation qui se tient.


Deux bis, finement choisis. Un extrait des Davidsbündlertänze de Schumann (Zart und singend), fort bien chanté, effectivement, et l’Intermezzo n° 2 de Manuel Ponce, musique agréable associant évidence schubertienne et miasmes latins. Et puis le souriant pianiste s’en va, après avoir définitivement mis l’immense majorité du public dans sa poche. Beaucoup reviendront l’écouter (et tousser ?) lors de son prochain passage, c’est certain.



Laurent Barthel

 

 

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