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Nantes Théâtre Graslin 01/21/2001 - et 19 janvier 2001 Gottfried von Einem : Le Procès, opéra en deux actes et neuf tableaux, opus 14 (création française)
John Hurst (Josef K.), Ksenija Skacan (Mademoiselle Bürstner, La femme de l’huissier, Leni), Greg Ryerson (Le garde, un passant, l’ecclésiastique, le fabricant), Antoine Normand (Titorelli), René Linnenbank (Albert K.), Christian Davesnes (L’avocat Huld), Eric Martin-Bonnet (Le juge d’instruction, l’exécuteur des peines), Yann-Armel Quemener (Le greffier en chef), Nicolas Brisson (Franz), Jacques Laingui (L’huissier de justice), Claude-Simone de Kainlis (Madame Grubach), Bertrand Cardiet (Un jeune garçon, premier jeune homme, premier homme), Andrew Bennett (Deuxième jeune homme, deuxième homme), Guy-Etienne Giot (Troisième jeune homme, troisième homme), Guillaume Zabé (Un étudiant), Jean-Pierre Payrat (L’adjoint du directeur), Jean Fischer (Willem, un homme), Christine Sinibaldi (Une jeune bossue) Orchestre national des Pays de la Loire, Merion Powell (direction) Eric Chevalier (mise en scène, décors, costumes, lumières)
Vous avez une heure et cinq minutes de retard! reproche le juge d’instruction à l’accusé Josef K. Mais le public, passablement irrité, devra attendre une heure et quart le début de la représentation, en raison d’un mouvement social portant sur la réduction du temps de travail à l’Opéra de Nantes. Avant de découvrir K… de Philippe Manoury à l’Opéra Bastille dès le 7 mars prochain, la création française du Procès de von Einem, inspiré voici près de cinquante ans par le même Kafka, n’en a pas moins tenu toutes ses promesses.
Il faut d’abord saluer la scénographie à la fois lisible et intelligente d’Eric Chevalier. Un plan incliné révèle au fur et à mesure le labyrinthe dans lequel K. se perd au cours des épisodes successifs. Les décors, les costumes et les accessoires évoquent les années au cours desquelles Kafka écrivit son roman. Quelques clins d’œil bienvenus font allusion à Bacon ou à M le maudit. Deux réserves doivent toutefois être exprimées : la longueur des changements de plateau vient parfois casser le rythme et la direction d’acteurs semble parfois inaboutie (quoique le livret, qui ménage fort peu de scènes d’action, ne facilite pas les choses).
D’une présence physique et musicale étonnante dans le rôle de K., John Hurst, faisant également preuve d’une diction parfaite, domine une distribution vocale globalement satisfaisante, dans laquelle se distinguent plus particulièrement Ksenija Skacan qui, conformément à l’usage, chante les trois rôles féminins principaux, et quelques seconds rôles masculins très convaincants (Greg Ryerson, Eric Martin-Bonnet, René Linnenbank, Christian Davesnes).
L’Orchestre national des Pays de la Loire, dont tous les musiciens se joignent aux chanteurs pour les saluts finaux sur la scène, tient vaillamment son rôle. La difficulté de la mise en place explique sans doute un manque d’ironie, de mordant et de rebond, mais il est indéniable que l’Australienne Merion Powell, d’ordinaire chef du chœur de l’Opéra de Nantes, rend justice aussi fidèlement que possible à l’esprit de cette œuvre.
On ne peut donc que regretter de voir une initiative originale et couronnée de succès limitée à deux représentations, d’autant qu’elle s’inscrit dans un bel ensemble pédagogique de manifestations connexes (cinéma, conférences, exposition).
Simon Corley
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