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Macbeth en peinture Toulon Opéra 04/25/2014 - et 27, 29 avril 2014 Giuseppe Verdi : Macbeth Giovanni Meoni (Macbeth), Ingela Brimberg (Lady Macbeth), Mikhail Kolelishvili (Banco), Aurélie Ligerot (une dame d’honneur), Roman Shulackoff (Macduff), Giorgio Trucco (Malcolm), Antoine Abello (Un médecin), Jean-François Verdoux (Un sicaire, Un héraut), Carla Fratini (Première apparition), Théo Ballon (Seconde apparition), Ballet de l’Opéra de Toulon
Chœur de l’Opéra de Toulon, Christophe Bernollin (chef de chœur), Orchestre de l’Opéra de Toulon, Giuliano Carella (direction musicale)
Jean-Louis Martinoty (mise en scène), Bernard Arnould (décors), Daniel Ogier (costumes), François Thouret (lumières), Gilles Papain (vidéos), Ronan Barrot (auteur des tableaux projetés)
(© Frédéric Stéphan)
Original florentin de 1847 ou révision parisienne de 1865, les productions du Macbeth de Verdi se doivent de choisir. Celle que Jean-Louis Martinoty a créée pour Bordeaux en janvier 2012 – avant d’aller à Nancy la saison suivante – réalise un compromis en gardant de la seconde mouture «La luce langue», air que l’on sacrifierait difficilement, même sur l’autel de la rigueur musicologique, tant il offre une tribune virtuose autant que théâtrale à la nouvelle reine, ainsi que les moins nécessaires ballets, tandis que la scène finale se condense en son écriture primitive, faisant tomber le rideau sur la dépouille de Macbeth.
La profusion scénographique de la mise en scène a fait couler beaucoup d’encre, sans doute au diapason d’une imagerie noire qui fait entrer Shakespeare dans le refuge de Goya par le truchement de tableaux de Ronan Barrot projetés au fil de la soirée. L’économie visuelle de l’ensemble présente cependant une indéniable cohérence, démultipliant par des effets de miroirs le vacillement moral puis psychologique du couple royal. Mais l’effet de reprise se fait un peu trop sentir dans une réalisation et une direction d’acteurs plutôt relâchées.
A défaut d’avoir le grain et la noirceur du rôle, Giovanni Meoni fait un Macbeth honnête et solide. Si d’aucuns pourraient attendre plus d’aura ou de perfection vocale de la part de Lady Macbeth, Ingela Brimberg a du moins pour elle une maîtrise technique à même de lui permettre de révéler autant l’audace de la souveraine et de l’épouse avide que la vulnérabilité de la somnambule en proie à ses remords, la vaillance du soprano comme le dramatisme du spinto.
Le reste du plateau fait la part belle aux couleurs slaves, plus qu’à l’idiome italien. Ainsi en est-il du Banco en mal de nuances de Mikhail Kolelishvili. Il faut attendre la seconde partie pour que le Macduff de Roman Schulackoff trouve le chemin de la justesse et de la vigueur – son ultime air recueille un succès mérité. Peu de gloire luira sur le Malcolm correct mais banal incarné par Giorgio Trucco. Aurélie Ligerot réserve une dame d’honneur convenable, comme peuvent l’être Antoine Abello et Jean-François Verdoux, membres du chœur de la maison – l’un médecin, l’autre sicaire et héraut. Mentionnons également les deux apparitions dévolues à Carla Fratini et Théo Ballon qui ne trébuchent point sur leurs juvéniles gosiers, exercés à la Maîtrise du Conservatoire de Toulon.
Doué d’un sens du drame comme du style, Giuliano Carella impulse à l’orchestre de l’Opéra de Toulon une énergie sensible dans le premier acte – même si les couleurs pourraient s’y déployer avec un soupçon d’ampleur supplémentaire – mais qui tend à se disperser au fil de la soirée. A ce coup de fatigue passager, les effectifs choraux de la maison ont répondu un peu trop conséquemment. Mais ne doutons pas que le travail réalisé par le chef italien au sein de la maison toulonnaise saura se faire à nouveau entendre.
Gilles Charlassier
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