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Un siècle de musique de chambre Normandie Deauville (Salle Elie de Brignac) 04/20/2014 - Thomas Adès : Quintette pour piano et cordes (*)
Leos Janácek : Quatuor n° 2 «Listy důvěrné» (&)
Philippe Hersant : Trio avec piano «Variations sur La sonnerie de Sainte-Geneviève-du-Mont de Marin Marais» (#) Pierre Fouchenneret (#) (violon), Bruno Philippe (#) (violoncelle), Guillaume Bellom (#), Jonas Vitaud (*) (piano), Quatuor Hermès (* &): Omer Bouchez, Elise Liu (violon), Yung-Hsin Chang (alto), Anthony Kondo (violoncelle)
J. Vitaud et le Quatuor Hermès (© Claude Doare)
Il y a dix-huit ans déjà que sous l’égide d’Yves Petit de Voize, organisateur de concerts passionné au flair infaillible pour débusquer les jeunes talents, se réunissaient aux alentours de Pâques à Deauville ceux qui étaient alors l’espoir de la musique de chambre française et qui en sont aujourd’hui l’establishment. Les concerts ont lieu dans la magnifique salle de vente des yearlings de Deauville récemment entièrement restaurée et qui se révèle être un lieu idéal, de confort et d’acoustique, pour la musique de chambre. Les concerts du dimanche matin n’ont ni le succès public, ni ne sont le rendez-vous assez mondain que peuvent être ceux du soir. Ils ont contre eux de commencer à 11 heures, peut-être en ce jour de Pâques de rivaliser pour l’horaire avec la messe comme le rappelaient les cloches de l’église voisine s’invitant à midi au beau milieu du final du quatuor de Janácek. Ils ont pour eux d’être gratuits et en l’occurrence, compte tenu de l’intérêt du programme, les absents qui ont eu bien tort auront droit à une session de rattrapage grâce à la diffusion prévue le 28 avril sur France Musique.
Deux formations de structures bien différentes se partageaient ce concert. La première, un quatuor constitué et fonctionnant comme tel, le très jeune Quatuor Hermès, premier prix des concours internationaux de Lyon et de Genève, a été pour beaucoup la révélation de ce premier week-end. La seconde, constituée pour l’occasion avec des jeunes musiciens soutenus par la Fondation Singer-Polignac comme pour l’ensemble des musiciens de ce festival, réunissait Guillaume Bellom (piano), Pierre Fouchenneret (violon) et Bruno Philippe (violoncelle).
Un siècle de musique de chambre, débordant même sur la première année du XXIe pour le Quintette pour piano et cordes de Thomas Adès (né en 1971), qui ouvrait ce passionnant programme. Ce compositeur britannique, dont l’opéra The Tempest est parmi les œuvres lyriques les plus marquantes de ce début de siècle, a réussit une œuvre fascinante dans laquelle, en un vaste mouvement unique, le quatuor dialogue de façon concertante avec le piano dont la partie complexe laisse deviner la patte d’un compositeur pianiste lui-même. Une écriture lumineuse et lyrique ayant la volonté d’exploiter un matériel thématique de façon assez classique, jamais académique. Le Quatuor Hermès et le pianiste Jonas Vitaud n’ont fait qu’une bouchée de ces difficultés donnant une interprétation très prenante de cette œuvre admirable. Cependant, c’est dans la complexité de l’écriture et de la structure même du Second Quatuor «Lettres intimes» de Janácek que l’on a pu apprécier au mieux les qualités de concentration, d’équilibre, ainsi que l’ample et lumineuse sonorité du Quatuor Hermès et surtout la déjà très belle maturité et la discipline dont ils font preuve, parfaitement menés par leur premier violon dans une partition dont la grande difficulté est de donner une unité à une successions d’humeurs et de climats.
L’œuvre de Philippe Hersant (né en 1948) qui terminait en beauté ce concert, datant de 1998, a une structure très ordonnée dans la forme de variations sur le célèbre thème de La Sonnerie de Sainte-Geneviève-du-Mont de Marin Marais, un thème à la fois génial et entêtant, idéal pour ce genre d’exercice. Le compositeur, présent dans la salle, a dû se réjouir de la perfection de l’interprétation de son œuvre qui réserve de belles difficultés et exige du trio une grande virtuosité.
Olivier Brunel
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