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Sur la carte du tendre: «un rêve éthéré d’une autre vie»

Paris
Palais Garnier
12/07/2013 -  et 8, 10, 11, 13, 14, 15, 17, 18, 20, 22, 24, 25, 27, 28, 29, 30, 31 décembre 2013
Angelin Preljocaj: Le Parc
Wolfgang Amadeus Mozart: Symphonie n°36 en ut majeur «Linz», K. 425: Adagio – Adagio et Fugue en ut mineur, K. 546 – Danses allemandes, K. 571 – Concerto pour piano n° 14 en mi bémol majeur, K. 449: Andantino – Sérénade n° 13 «Eine kleine Nachtmusik», K. 525: Rondo – Divertimento n° 11 en ré majeur, K. 251: Andantino – Ein musikalischer Spass, K. 522: Presto – Concerto pour piano n° 15 en si bémol, K. 450: Andantino – Adagio et Fugue pour cordes d’après Bach, K. 404a: Adagio – Divertimento en si bémol majeur, K. 137: Allegro – Sérénade n° 7 «Haffner» en ré majeur, K. 248b [250]: Adagio – Concerto pour piano n° 23 en la majeur, K. 488: Adagio
Goran Vejvoda: Bande son aditionnelle

Aurélie Dupont*/Isabelle Ciaravola/Laëtitia Pujol/Alice Renavand, Nicolas Le Riche*/Karl Paquette/Benjamin Pech/Hervé Moreau/Stéphane Bullion, Ballet de l’Opéra national de Paris
Elena Bonnay*/Vessela Pelovska (piano), Orchestre de chambre de Paris, Koen Kessels (direction musicale)
Angelin Preljocaj (chorégraphie), Thierry Leproust (décors), Hervé Pierre (costumes), Jacques Chatelet (lumières)


A. Dupont, N. Le Riche (© Agathe Poupeney/Opéra national de Paris)


Premier ouvrage qu’il a spécialement conçu pour le ballet de l’Opéra de Paris, en 1994, Le Parc constitue l’une des plus grandes réussites d’Angelin Preljocaj, et c’est à juste titre qu’il revient régulièrement sur la scène de Garnier. D’une heure trente sans entracte, la pièce retrace la carte du tendre avec les codes en usage au siècle de Marivaux, de la séduction à l’abandon amoureux. Pour autant, il ne s’agit pas d’une reconstitution historique. Outre un langage chorégraphique éminemment contemporain, costumes «d’époque» et pages de Mozart sont ponctués dans le prologue, les intermèdes et l’épilogue par une bande son due à Goran Vejvoda, et sur laquelle évoluent quatre «jardiniers» – ce soir, énergique quatuor formé de Mallory Gaudion, Simon Valastro, Adrien Bodet et Adrien Couvez – dans un décor géométrique aux lignes épurées, insérant ainsi le songe galant dans la moderne urbanité. Ajoutons par ailleurs les poétiques éclairages imaginés par Jacques Chatelet, en particulier la nocturne bleuité du troisième acte constellé d’étoiles qui fondent au petit matin de l’amour.


La construction musicale du spectacle est des plus abouties. Passant sous silence la performance perfectible des interprètes, comme souvent dans les soirées de ballet où les répétitions musicales se trouvent négligées, on ne peut qu’admirer la subtile dramaturgie qui détermine les morceaux puisés dans le corpus mozartien. L’Adagio inaugural de la Symphonie «Linz» fonctionne comme un prélude solennel, repris avant le troisième acte, celui du dénouement, comme dans certains opéras – La Traviata pour ne citer que l’un des plus célèbres. Chacune des parties s’articule ensuite selon un schéma analogue, avec une ouverture pour ensemble à l’écriture resserrée, tels le K. 546 ou le K. 404a, des divertissements avant un duo sur un andante de concerto pour piano, dont l’intensité va grandissant, de celui du Quatorzième au mélancolique Vingt-troisième sur lequel est dansé la séquence du baiser, réputé pour être le plus long de l’histoire chorégraphique et devenu l’emblème du Parc: accrochée au cou de l’amant, l’aimée imprime avec ce baiser pour centre de gravité des rotations aussi hautement acrobatiques qu’émouvantes, magnifique métaphore du tourbillon amoureux.


Incontestablement ballet d’étoiles, la première distribue Nicolas Le Riche et Aurélie Dupont. Lui, d’une retenue touchante dans l’émoi encore innocent et d’une virilité aussi vigoureuse que fragile – outre celui du baiser, les portés ne se limitent pas à la performance physique. Elle, d’une élégance plus accessible que de coutume, papier glacé frissonnant de sentiments contenus. Sans doute cette soirée est-elle empreinte d’une émotion particulière, ultime première où ces deux étoiles brilleront ensemble, et l’ultime duo sur le K. 488 distille un peu de cette nostalgie que Cioran nommait «un rêve éthéré d’une autre vie».



Gilles Charlassier

 

 

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