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Un Requiem sur les sommets Verbier Salle des Combins 08/01/2013 - Giuseppe Verdi : Messa da Requiem
Maria Agresta (soprano), Daniela Barcellona (mezzo-soprano), Piotr Beczala (ténor), Ildar Abdrazakov (basse)
Coro del Teatro Regio di Torino, Claudio Fenoglio (chef de chœur), Orchestre du Festival de Verbier, Gianandrea Noseda (direction)
M. Agresta, D. Barcellona, P. Beczala, G. Noseda (© Aline Paley)
Bicentenaire oblige, le prestigieux festival de Verbier, niché à 1500 mètres d’altitude dans les Alpes suisses, n’a pas oublié de célébrer Verdi lors de sa vingtième édition. Une semaine après un concert qui donnait à entendre le premier acte d’Otello avec une distribution de grand luxe – Anna Netrebko et Aleksandrs Antonenko dirigés par Valery Gergiev –, c’est la Messa da Requiem qui résonnait ce soir sous la tente des Combins.
Grand habitué des lieux, c’est Gianandrea Noseda qui conduit les jeunes musiciens de l’Orchestre du Festival de Verbier, ainsi que le Chœur du Teatro Regio de Turin dont il est le directeur musical. C’est un moment exceptionnel de musique pure que le chef italien offre à un public venu de tous les continents, dans une lecture du chef-d’œuvre de Verdi qui révèle toute la splendeur d’une partition entre ombre et lumière, tension et mystère. Dirigeant de manière passionnée, il semble ressentir cette musique dramatique avec toutes ses entrailles, chantant et lançant ses bras dans son dos pour diriger les solistes, lesquels ne le voient pas plus qu’il ne les voit. Saluons aussi une formation qui, même si ses cordes manquent encore de profondeur dans les tutti, s’avère bien souvent étincelante, notamment les cuivres – une vraie surprise.
De l’excellent quatuor vocal, l’on retiendra en premier lieu le nom Maria Agresta, qui semble promise à un brillant avenir. La soprano italienne possède l’exact profil pour porter cette partition au firmament: souplesse, grain voluptueux à la fois céleste et pulpeux, souffle, piani éthérés... Remplaçant Francesco Meli initialement annoncé, le ténor polonais Piotr Beczala offre une voix puissante, un timbre de toute beauté, des aigus solaires et une musicalité de tous les instants. Son «Ingemisco» fait passer le frisson en rendant palpable l’espoir angoissé du pécheur, dans des mezza voce et des retenues de phrasé de toute beauté.
La basse russe Ildar Abdrazakov atteint aussi l’excellence avec, en sa faveur, un grain de voix somptueux, une ligne de chant superbe et une noblesse dans l’accent et l’émission qui ravissent. Nous nous rappellerons de son «Confutatis», où les pizzicati des contrebasses ont rythmé avec une bouleversante douceur sa douloureuse complainte. Quant à la mezzo italienne Daniela Barcellona, elle fait valoir sa voix ferme et chaleureuse, aux graves splendides, et un grand art des nuances – ce qui mérite d’être relevé pour une tessiture qui en manque souvent. Avec sa consœur et compatriote, elle livre des duos fort équilibrés qui s’unissent bien dans un «Recordare» pétri d’émotion et retrouvent la même alchimie dans l’«Agnus Dei».
Enfin, le Chœur du Teatro Regio de Turin, remarquablement préparé par Claudio Fenoglio, donne le meilleur de lui-même, vraie masse en fusion parfaitement intégrée au vivier orchestral. C’est un triomphe amplement mérité qu’ont reçu tous les artistes au moment des saluts.
Le site du festival de Verbier
Emmanuel Andrieu
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