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Enfer et paradis mozartiens Sisteron Cathédrale Notre-Dame-des-Pommiers 08/02/2013 - Wolfgang Amadeus Mozart : Exsultate, jubilate, K. 158a [165] – Requiem, K. 626
Sandrine Piau (soprano), Catherine Pillonel Bacchetta (alto), Mathias Reusser (ténor), Jean-Luc Waeber (baryton)
Ensemble vocal et instrumental de Lausanne, Michel Corboz (direction)
La qualité plutôt que la quantité, telle pourrait être la devise des Nuits de la citadelle. Les six manifestations de la cinquante-huitième édition, du 19 juillet au 9 août, restent ainsi fidèles à la vocation pluridisciplinaire de ce festival dont les origines remontent à la fin des années 1920 et qui, interrompu par la Seconde Guerre mondiale et ses destructions, se déroule sans solution de continuité depuis 1956: ballet – les conditions météorologiques ont hélas entraîné l’annulation des Ballets Jazz de Montréal, le 19 juillet –, théâtre – Le Roi se meurt avec Michel Bouquet et Juliette Carré – et, surtout, musique: Natalie Dessay et Shani Diluka, Viktoria Mullova entre classique et jazz, David Greilsammer et son Orchestre de chambre de Genève et, pour la quatorzième fois à Sisteron, Michel Corboz et son Ensemble vocal et instrumental de Lausanne.
Agé de 79 ans, le chef éprouve une légère difficulté à se déplacer, mais il ne se sert qu’à peine de la chaise haute installée face à son pupitre. Il n’est plus, depuis deux saisons, directeur artistique de la formation qu’il a fondée en 1961, mais cela ne change rien à l’affaire. Car ce programme Mozart, donné à guichets fermés en la cathédrale Notre-Dame-des-Pommiers (XIIIe), fait forte impression: voilà en effet un Requiem (1791) allant et dramatique mais sans pathos, tout en contrastes, du cri à la consolation, de l’enfer au paradis, entre violente scansion des petites timbales à l’ancienne et douceur angélique des cors de basset. Traçant un pont entre les ascendances baroques de l’œuvre et le Requiem allemand de Brahms, Corboz n’hésite cependant pas à user de nuances dynamiques inattendues, comme à la fin du «Lacrimosa», piano et non forte.
Mozartienne s’il en est, Sandrine Piau avait déjà démontré au début du concert, dans le redoutable Exsultate, jubilate (1773), la solidité de son style, la sûreté de son aigu, la perfection de son phrasé. Et si, dans le Requiem, elle ne domine pas le quatuor vocal, c’est simplement que ses trois partenaires sont d’un excellent niveau. L’interprétation est également portée par la pureté et la transparence des vingt-six choristes et par un ensemble instrumental de qualité, nonobstant sa taille modeste: avec la réverbération, douze cordes suffisent, même si elles luttent difficilement contre les quatre bois et cinq cuivres – de toute façon, le plateau disposé dans le chœur n’aurait guère pu en accueillir davantage, devant La Sainte Famille de Nicolas Mignard. A l’extrémité de chacune des nefs latérales, un grand écran permet aux spectateurs ne bénéficiant que d’une visibilité réduite – et même aux autres – de disposer des prises de vue réalisées par trois caméras, parfois sommaires, mais souvent intéressantes, notamment lorsqu’elles offrent des gros plans – de trois quarts – du chef, en état de grâce, ou – de côté – des musiciens. L’acoustique se révèle satisfaisante, quoique confuse dans les tutti lorsque le tempo est vif – l’intention était généreuse, mais ce n’était décidément pas une bonne idée que de reprendre en bis le «Dies iræ», d’autant que tout semblait dit à l’issue du «Lux æterna».
Le site des Nuits de la citadelle
Le site de l’Ensemble vocal et instrumental de Lausanne
Simon Corley
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