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Une pastorale très XVIIe

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
12/09/2000 -  et 10* , 12 décembre 2000
Marc-Antoine Charpentier : La Pastorale de Noël
Valérie Gabail, Hanna Bayodi, Brigitte Pelote (sopranos), Gemma Coma-Alabert (mezzo-soprano), Armand Gavriilides (contre-ténor), Jean-François Novelli (ténor), Luc Coadou et Jean-Louis Georgel (barytons)
Les Talens Lyriques Christophe Rousset, (direction musicale)
Compagnie de danse baroque l'Eventail. Thierry Bosquet (décors et costumes), Jean-Philippe Corrigou, (lumières), Marie-Geneviève Massé (chorégraphie), Philippe Lénaël (mise en scène)


Ce spectacle d'une très belle qualité musicale et d'une grande recherche sur le plan scénique, présente d'emblée un intérêt majeur : faire prendre conscience, en ce temps de Noël, à quel point les représentations culturelles que l'on peut se faire d'un événement marquant de l'histoire peuvent différer d'une époque à l'autre. Cette Pastorale de Noël de Marc-Antoine Charpentier, donnée par les Talens Lyriques sous la direction de Christophe Rousset et dans une mise en scène de Philippe Lénaël, met en correspondance au moins quatre époques et quatre mondes différents : le nôtre bien entendu avec sa façon bien à lui de faire revivre le passé, mais aussi le XVIIe siècle français, l'Antiquité, et l'époque de la naissance du Christ. C'est donc un jeu de références très complexe et quelque peu vertigineux ! Philippe Lénaël s'en explique d'ailleurs fort bien disant avoir voulu "proposer une vision historique imaginaire dans une alliance du style pictural italien (pour le décor et les bergers) et du style décoratif français inspiré de Bérain (pour les anges)". Suivant une des tendances de notre temps, le metteur en scène joue donc ici la carte historique et tente de faire revivre une Pastorale telle qu'elle fut peut-être donnée du temps de Marc-Antoine Charpentier dans une composition scénique souvent extrêmement belle et étonnamment picturale : très bien servi par le travail sur les lumières de Jean-Philippe Corrigou, Philippe Lénaël fait de la scène le cadre de tableaux successifs, allant parfois jusqu'à figer volontairement, quelques instants, le geste des danseurs et chanteurs, ce qui accentue la référence à la peinture de cette époque. On songe à le Nain notamment ou à Georges de la Tour ; mais c'est aussi le XVIIe siècle qui est présent, avec le genre de la Pastorale dans son acception typique de cette époque, avec bergers et bergères, texte en vers et danses. Ici thème de la Nativité oblige, interviennent aussi les anges et tout ce petit monde devise en chantant et dansant sur la venue imminente du Christ. Des costumes, on ne sait dire à quoi exactement ils font référence, si ce n'est à une certaine idée du berger qui semble aussi marquée par le XVIIe que par le XVIIIe siècle. Quant à l'Antiquité et au temps du Christ, ils sont suggérés par le décor –colonnes brisées et portiques en ruine- et aussi par l'étonnante crèche poussée au milieu de la scène par les anges vers la fin du spectacle. Le plus remarquable au milieu de tout cela, c'est la qualité intemporelle de la musique, finalement la grande unificatrice de toutes ces références croisées. Jouée par un ensemble extrêmement restreint de musiciens, deux dessus de viole, deux flûtes à bec, une basse de viole, un théorbe, un clavecin et un petit orgue. Chantée par un ensemble aussi limité d'artistes, alternativement solistes et artisans de petits chœurs volubiles d'anges ou de bergers. Tous donnent une interprétation très savoureuse et musicalement parfaite de l'œuvre de Marc-Antoine Charpentier ; composée aux alentours de 1670, celle-ci représente une synthèse très nouvelle de la Pastorale profane et de l'Histoire sacrée et s'attache autant à toucher, voire à plaire qu'à faire comprendre, en profondeur, le sens de cette histoire sainte. "Movere, delectare, docere", tels n'étaient-ils pas les trois objectifs de cet art rhétorique encore très vivant à l'époque de Charpentier ? Indéniablement ce spectacle intéresse et plaît à l'esprit et à l'œil. On sera un tout petit peu plus réservé sur sa capacité à émouvoir, sans doute en raison de l'abondance de sollicitations qui détournent de l'essentiel.




Florence Trocmé

 

 

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