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Charlot musicien

Strasbourg
Palais de la Musique et des Congrès
02/14/2013 -  et 15 février 2013
Charlie Chaplin : Modern Times
Orchestre philharmonique de Strasbourg, Timothy Brock (direction)


T. Brock


Le principe du «ciné-concert», projection cinématographique d’un classique du cinéma muet assortie d’un accompagnement musical assuré par une vraie formation «live», en l’occurrence ici un orchestre de chambre, a déjà été tenté plusieurs fois au sein des saisons de l’Orchestre philharmonique de Strasbourg, avec à terme la mise en forme notamment de ce cycle Charlie Chaplin, qui a su fidéliser son public (un Palais des Congrès comble pour deux soirées consécutives, ce qui n’est plus si fréquent, malheureusement...).


Le choix de Charlie Chaplin, outre évidemment la dimension de vrais chefs-d’œuvre du cinéma qu’il implique, est aussi judicieux parce que les musiques jouées sont ici, peu ou prou, signées par Charlie Chaplin lui-même. Ce talent de compositeur est connu mais reste de fait assez nébuleux, la part des choses avec l’intervention de multiples arrangeurs restant difficile à faire a posteriori. Il semble que Chaplin ait joué ici surtout un rôle inspirant, proposant des thèmes et laissant à d’autres la tâche de les mettre en forme et de les orchestrer. De là cependant à le considérer comme un inculte musical doté d’une forme de génie mélodique issue de nulle part, il semble qu’il y ait un pas difficile à franchir. Chaplin était apparemment un vrai musicien, même si son bagage technique était limité. Et ses partitions sont à aborder en tant que telles, même s’il s’agit d’œuvres d’atelier.


Inutile de revenir sur le génie jubilatoire des Temps modernes. Il y a là des séquences inoubliables de tendresse, de drôlerie, de jubilation comique (la scène de la «machine à manger», sommet absolu du genre...). Ici le film règne évidemment en maître, et les rires du public en attestent. Mais la soirée offre aussi une dimension «concert» indéniable, avec une partition intéressante à écouter, à analyser visuellement aussi, certaines particularités d’orchestration liées au genre de la musique de film apparaissant tout à fait singulières. Et puis aussi l’interaction globale est parfois surprenante, y compris quand les musiciens se prennent à rire eux aussi de ce qui passe sur l’écran au dessus d’eux.


Il s’agit, rappelons-le, d’un vrai film parlant, le choix de Charlie Chaplin d’en rester à sa fonction de mime restant purement d’ordre artistique. L’apport du son n’est cependant pas négligé, avec une celébrissime séquence de gargouillis stomacaux, restée d’anthologie, et une non moins drôlatique chanson inepte, où l’on entend Chaplin lui-même improviser un texte qui n’a aucun sens. A ce seul moment l’Orchestre philharmonique de Strasbourg se tait complètement, laissant la bande originale fonctionner seule, ce qui donne d’ailleurs le temps de ressentir a contrario tout le relief supplémentaire que peut apporter l’exécution réelle de la partition par des instruments physiquement présents. Un privilège que l’on doit ici pour l’essentiel à Timothy Brock, grand spécialiste de ce genre d’exécution, impeccablement synchronisée avec l’image d’ailleurs. Compositeur, musicologue, chef d’orchestre d’un pragmatisme jamais pris en défaut, c’est bien lui la cheville ouvrière de cette savoureuse soirée.



Laurent Barthel

 

 

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