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Les tréteaux de maître Sivadier Lille Opéra 05/14/2013 - et 16, 18, 21, 23, 26*, 28, 30 mai, 2 juin 2013 Gioacchino Rossini : Il barbiere di Siviglia Taylor Stayton (Le comte Almaviva), Tiziano Bracci (Bartolo), Eduarda Melo (Rosine), Armando Noguera (Figaro), Adam Palka (Basile), Jennifer Rhys-Davies (Berta), Oliver Dunn (Fiorello)
Chœur de l’Opéra de Lille, Yves Parmentier (chef du chœur), Orchestre de Picardie, Antonello Allemandi (direction)
Jean-François Sivadier (mise en scène), Alexandre de Dardel (scénographie), Virginie Gervaise (costumes), Philippe Berthomé (lumières), Cécile Kretschmar (maquillages)
(© Frédéric Iovino)
Fidèle à son esthétique, Jean-François Sivadier réussit encore son coup. Le metteur en scène exploite progressivement un plateau garni au départ de presque rien, comme s’il partait d’une feuille blanche. Quelques stores vénitiens et un éclairage expert suffisent pour évoquer un intérieur tandis que pour représenter un jardin au clair de lune, Figaro tient quelques branches d’arbre sous un ballon blanc pendant que le comte Almaviva chante sa sérénade – la simplicité à l’état pur. Les costumes inscrivent la scénographie à l’époque contemporaine mais l’actualisation ne constitue pas le trait dominant de cette mise en scène qui épate avant tout grâce à son ton personnel et cohérent. Le public applaudit les trouvailles humoristiques, ni vulgaires ni faciles, encore que l’idée de la mousse à raser provenant d’un gâteau à la crème reste un classique. Réglé au millimètre, ce théâtre virevoltant et comme improvisé emporte l’adhésion mais Jean-François Sivadier échoue à nous surprendre après des Noces de Figaro (2008), une Carmen (2010) et un Couronnement de Poppée (2012) du même calibre.
La distribution ne réunit pas le meilleur mais un bel esprit de troupe y règne. Barbe de trois jours, regard malicieux et sourire ravageur, Armando Noguera signe un Figaro au charisme irrésistible. Chanteur complet et excellent comédien, le baryton argentin met la salle dans sa poche, au point que, emportés par lui, les spectateurs se mettent à entonner des «Olé!» à la fin de l’entracte et lors des saluts. En comparaison, le comte Almaviva de Taylor Stayton manque un peu d’étoffe, moins à cause d’une vocalisation agile et élégante que d’une voix relativement mince. La Rosine plus roturière qu’aristocratique d’Eduarda Melo a du mérite: cette soprano à la voix acidulée compense par son talent de comédienne un chant virtuose bien que diversement séduisant – aigus peu goûteux.
Sans tirer vers la caricature, Tiziano Bracci déploie la panoplie d’un bon Bartolo – bonhomie, verbe haut, autorité factice – et possède les ressources nécessaires pour éviter de se prendre le pied dans le tapis. Le Basile d’Adam Palka n’offre guère mieux qu’un chant monochrome et caverneux tandis que la Berta déjantée de Jennifer Rhys-Davies attire la sympathie grâce à sa physionomie dont elle joue d’ailleurs volontiers. L’Orchestre de Picardie n’évolue pas en première division mais, sous la direction d’un Antonello Allemandi tout à son affaire, il sonne avec effervescence, légèreté et cohésion. Quant à Emmanuel Olivier, il dispense au clavecin un accompagnement savoureux durant les récitatifs, qui séduisent en fin de compte autant que le reste. Figaro le fera d’ailleurs applaudir par un public conquis.
Sébastien Foucart
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