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Choc des générations

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
03/19/2013 -  et 16 (Lisboa), 18 (Barcelona), 21 (Bratislava), 23 (Zagreb), 24 (Interlaken), 28 (Aix-en-Provence) mars 2013
Ludwig van Beethoven : Concerto pour piano n° 4 en sol majeur, opus 58 – Symphonie n° 7 en la majeur, opus 92

Leif Ove Andsnes (piano)
Gustav Mahler Jugendorchester, Herbert Blomstedt (direction)


H. Blomstedt (© Martin U. K. Lengemann)


Qui pourrait croire que Herbert Blomstedt, né en juillet 1927, va désormais sur ses quatre-vingt six ans? A le voir arriver sur scène, fringant, l’œil malicieux sous le sourcil broussailleux, on a plutôt l’impression d’avoir affaire à un éternel jeune homme, revigoré qui plus est par l’orchestre qui lui fait face. Il faut dire que, lorsque viennent s’asseoir les membres de l’Orchestre des jeunes Gustav Mahler), on ne peut qu’être frappé par leur très grande jeunesse – nombreux sont ceux qui n’ont pas vingt ans – et par la très importante féminisation de l’effectif, notamment dans les pupitres de cordes. Le concert de ce soir, le seul malheureusement qui ait lieu à Paris, prenait place au sein d’une grande tournée européenne de près de deux semaines au cours de laquelle Herbert Blomstedt doit les diriger dans deux programmes différents (outre celui donné ce soir, un autre associe au Quatrième Concerto de Beethoven la Quatrième Symphonie d’Anton Bruckner).


Ce soir, donc, place à Ludwig van Beethoven (1770-1827) et à lui seul, à travers deux de ses œuvres les plus emblématiques. Le Quatrième (1806) occupe une place tout à fait originale parmi les cinq Concertos, qu’il s’agisse de l’entrée du piano, de la noirceur du mouvement lent, ou du caractère extrêmement primesautier du troisième. A ce jeu-là, on peut se demander si Leif Ove Andsnes est le soliste idéal. Certes, comme on avait déjà pu le remarquer dans Mozart, le jeu du pianiste norvégien ne souffre aucune critique technique: les phrases s’enchaînent sans difficulté, le discours est d’une parfaite évidence, les pièges des cadences n’en sont pas... En revanche, comme dans Mozart d’ailleurs, où est l’émotion? Où sont les sentiments? Où est la jeunesse du compositeur qui, lors de la création du concerto, avait tout juste trente-six ans? D’emblée malheureusement, Andsnes s’attache à mettre une distance entre l’œuvre et lui qui conduit à une interprétation où tout est certes parfaitement en place (même les trilles, nombreux, sont ajustés au millimètre près) mais qui est également beaucoup trop lisse. De même, les appogiatures ne revêtent aucunement le caractère de surprises tellement la régularité du jeu du soliste permet d’anticiper ce qui sera fait dans les secondes à venir. Cela est d’autant plus dommage que Blomstedt, dirigeant sans baguette ni estrade, semble pour sa part vouloir instiller davantage de nervosité et de fantaisie, profitant il est vrai d’un orchestre à l’énergie bouillonnante.


Et quelle énergie! La seconde partie du concert, consacrée à la Septième Symphonie (1813), fut pour sa part du plus haut niveau. Retrouvant cette fois-ci estrade et baguette, Herbert Blomstedt aborde pourtant le premier mouvement (Poco sostenuto – Vivace) de façon un peu trop retenue alors que, à partir du Vivace, on aurait préféré davantage de débordements. Mais, dès le deuxième mouvement, on ne pouvait que tresser des louanges à l’orchestre – quels musiciens! – et au chef qui, en quarante minutes à peine, enleva cette œuvre géniale. L’Allegretto débuta ainsi de la plus belle des façons par le célèbre leitmotiv, joué à bonne allure (pour une fois...) par des violoncelles et des contrebasses (les quatre du concerto ayant été rejointes par quatre consœurs) dont les mouvements sont dignes de la houle des Berliner Philharmoniker. Par ailleurs, quel hautbois solo et, plus largement, quels pupitres de vents! Dans un tempo idéal, Blomstedt dirigea le troisième mouvement avec une joie communicative, l’orchestre suivant sans faille son entrain, à l’image de la jeune Konzertmeisterin ukrainienne, Diana Tishchenko. Quant à l’Allegro con brio, même si on aurait secrètement souhaité que les basses vrombissent davantage vers la fin du mouvement, il emporta tout sur son passage et souleva l’enthousiasme du public.


En dépit du martellement des pieds des musiciens et des applaudissements en mesure du public, Herbert Blomstedt n’offrit pas de bis: on n’en attendra pas moins avec une vive impatience la prochaine venue tant de l’orchestre que du chef dans les salles de concert parisiennes.


Le site de l’Orchestre des jeunes Gustav Mahler
Le site de Leif Ove Andsnes


Sébastien Gauthier

 

 

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