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Une Brünnhilde d’exception

Rennes
Opéra
02/07/2013 -  et 9, 11*, 13 février 2013
Richard Wagner : Die Walküre

Catherine Hunold (Brünnhilde), Sir Willard White (Wotan), Donald Litaker (Siegmund), Claire Rutter (Sieglinde), Kristina Hammarström (Fricka), Patrick Simper (Hunding), Marie-Paule Dotti (Gerhilde), Elodie Hache (Ortlinde), Sylvie Althapparo (Waltraute), Marie-Paule Bonnemason (Schwertleite), Sylvia Kevorkian (Helmwige), Sophie Pondijclis (Siegrune), Karine Audebert (Grimgerde), Eliska Weissova (Rossweise)
Orchestre symphonique de Bretagne, Claude Schnitzler (direction)


C. Hunold, C. Schnitzler, Sir W. White (© Laurent Guizard)


Cela pouvait paraître une gageure pour l’Opéra de Rennes que de mettre à l’affiche une Walkyrie. En fin de compte, on saluera le courage et la détermination de l’heureux Alain Surrans, qui a su réunir une distribution ayant pleinement rendu justice à la partition du maître de Bayreuth – pour une des plus enthousiasmantes exécutions de l’ouvrage qu’il nous ait été donné d’entendre. Plus «petit» opéra du pays, le théâtre breton ne pouvait bien évidemment pas accueillir 120 musiciens – quand bien même installés sur scène –, puisque nous assistions à une «simple» version de concert. Or, il s’avère que Wagner a écrit une mouture pour une soixantaine d’instrumentistes, version dite «de Cobourg» (Coburger Fassung), spécialement adaptée à la fosse de la cité allemande (qui a d’ailleurs prêté à Rennes le matériel d’orchestre), de taille identique à celle de la capitale bretonne. C’est donc cette version qui a été retenue.


Triomphatrice de la soirée – et révélation absolue –, la jeune Catherine Hunold s’avère une Brünnhilde d’exception. La soprano française prête à l’héroïne sa présence intense et son chant expressif, de bout en bout contrôlé et sans efforts sur toute la tessiture. D’emblée, avec les fameux «Hojotoho», elle prend tous les risques en se jetant avec véhémence dans ces meurtrières cascades martiales. Elle peut compter sur l’éclat de son timbre, la précision de ses attaques et des aigus dardés avec un inébranlable aplomb pour conférer à son personnage tout l’héroïsme qu’il requiert. Elle n’en émeut pas moins dans une poignante «Annonce de la mort» et s’impose, de fait, comme une des grandes Brünnhilde d’aujourd’hui.


Claire Rutter, dans le rôle de Sieglinde, offre également des moyens très impressionnants, quasi sans faille (à un ou deux aigus près), voire triomphants dans un magnifique «O hehrstes Wunder» à l’acte III, qu’on n’avait pas entendu depuis longtemps aussi puissamment et lyriquement épanoui. Pour autant, l’on devra nuancer en précisant que le timbre est malheureusement peu caractérisé. C’est un Siegmund de haute volée qu’elle trouve en Donald Litaker. Dès le récit du premier acte, avec son timbre magnétique et son exemplaire diction, son superbe engagement et sa belle musicalité, le ténor américain emporte l’adhésion. A 64 ans, il chante le rôle avec une vaillance et une endurance inouïes pour son âge, même si des traces de fatigue viennent tamiser l’éclat de son parcours au deuxième acte. La Fricka de Kristina Hammarström se hisse elle aussi au premier rang, avec son beau timbre sombre et égal, sa voix souple et sensuelle, et la passion d’une Junon sans trace de caricature. La basse allemande Patrick Simper offre un Hunding sonore et présent tandis que les huit Walkyries ont été choisies avec discernement.


Quant à Sir Willard White, il demeure à 66 ans l’un des plus magnifiques Wotan qu’on puisse entendre actuellement sur une scène lyrique, avec un phrasé et un legato exceptionnellement raffinés, modulant toujours magistralement de superbes piani (à la fin de «Der Augen leuchtendes Paar», notamment) et des déchaînements de puissance. Si les nuances de l’aigu, il faut le reconnaître, lui causent parfois quelques difficultés, on rend les armes devant ses graves somptueux et moirés, mais plus encore devant l’intelligence et l’intensité phénoménales avec lequel il dit son texte. Il aborde le grand monologue du II en Sprechgesang, avec des accents d’abattement et de désespoir qu’on avait jamais entendu de telle manière. De même, ses adieux au III ont provoqué une intense émotion parmi un auditoire visiblement bouleversé.


A la tête d’un Orchestre symphonique de Bretagne semblant galvanisé par l’enjeu de sa tâche, Claude Schnitzler dispense une envoûtante lecture symphonique du chef-d’œuvre wagnérien, conçu comme une grande musique de chambre, fluide, allante et mobile. Jouant en virtuose de la souplesse de cette formation réduite, le chef alsacien opte ainsi pour une lecture introvertie de la partition, sans rechercher la dimension surhumaine de la plupart des baguettes. Son traitement des violoncelles et des contrebasses est absolument magique, et l’on admire sa flexibilité et sa tendresse dans les épanchements romantiques, même si la genèse du grand souffle fait, en revanche, parfois défaut.


La soirée s’achève par un exceptionnel triomphe pour l’ensemble de l’équipe artistique: assurément, cette Walkyrie restera longtemps dans la mémoire des mélomanes bretons.


Le site de Catherine Hunold
Le site de Donald Litaker
Le site de Claire Rutter
Le site de Patrick Simper
Le site de l’Orchestre symphonique de Bretagne



Emmanuel Andrieu

 

 

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