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Le concerto «strasbourgeois»

Strasbourg
Palais de la Musique et des Congrès
01/24/2013 -  
Wolfgang Amadeus Mozart : Concerto pour violon n° 4, K. 218
Anton Bruckner : Symphonie n° 7

Veronika Eberle (violon)
Orchestre philharmonique de Strasbourg, Claus Peter Flor (direction)


V. Eberle (© Bernd Noelle)


On peut compter sur Claus Peter Flor pour installer une électricité particulière lors de chacune de ses apparitions au pupitre de l’Orchestre philharmonique de Strasbourg, passages peu fréquents mais réguliers (voir ici et ici). Cette petite silhouette dépourvue de spectaculaire fascine une fois de plus comme peu d’autres, encore qu’elle ne dirige pas du tout pour la salle (on s’avoue particulièrement sensible à cette économie de gestes gratuits) mais magnétise en revanche complètement l’orchestre, semblant en permanence tracter entre elle et les musiciens une multitude de fils invisibles et prodigieusement tendus. Et le résultat est à l’envi : on aura rarement entendu à Strasbourg un orchestre d’un grain aussi luxueux, une telle richesse des cordes et une aussi généreuse plénitude des cuivres (regroupés dans une formation favorable ce soir-là, fermement ancrée autour de la trompette de Vincent Gillig et du trombone de Nicolas Moutier). Et surtout on apprécie qu’aucun relâchement ne soit perceptible au cours d’une Septième Symphonie de Bruckner pourtant davantage pesante qu’allante, toute entière vouée à la densité des phrasés et la beauté du son. Vision délibérément architecturale, qui conforte peut-être trop les brucknériens fervents dans leur fantasmes cosmogoniques, mais qui s’apprécie comme un tout remarquablement cohérent. Point culminant : un Adagio envoûtant, magistralement construit, qui s’achève par un choral de cuivres d’une beauté calme et suspendue, hors du temps.


En première partie, un « petit » Mozart, conformément à une tradition éprouvée (on pourrait cependant imaginer bien d’autres appariements avec Bruckner, compositeur si délibérément particulier dans sa gestion du temps musical). Anecdotiquement le choix du Quatrième Concerto pour violon, dont le troisième mouvement cite une musette qualifiée par Wolfgang et Leopold Mozart de «strasbourgeoise» dans leur correspondance, peut se justifier aussi par cet ancrage local peu connu. Il s’agit évidemment d’une belle œuvre, la plus mélancolique des cinq voire six auxquelles se résume le violon concertant chez Mozart, que la jeune violoniste allemande Veronika Eberle investit sans la bousculer, se contentant d’en dérouler les phrases confortablement, avec un sens très mesuré de la sonorité à la fois ronde et pas débordante. Le résultat est joli, amoindri par un relatif manque d’autorité quand même, déficit imputable aussi à une timidité devenue de rigueur aujourd’hui dans ce répertoire, considéré comme trop fragile pour s’y installer carrément et donner un vrai poids à l’archet. Un Szeryng ou un Grumiaux, naguère merveilleux dans ces œuvres, y passeraient sans doute pour trop lourds aujourd’hui selon nos critères esthétiques du moment. Et pourtant... Cantonnés à un rôle d’accompagnateurs relativement sommaire, les musiciens de l’orchestre ont du mal à trouver leurs marques dans une formation restreinte qui leur est devenue peu coutumière, surtout quand Claus Peter Flor leur demande çà et là un peu plus d’implication, voire deux ou trois incises d’un humour haydnien qui parfois déstabilisent cette exécution, probablement trop facile à oublier sitôt le dernier trait de violon évanoui.


En bis, la rare Sonate pour violon seul de Prokofiev, ou du moins son Tema con variazioni median, dont la sobriété mais aussi la virtuosité mesurée siéent bien à Veronika Eberle, artiste que l’on souhaiterait cependant pouvoir entendre ultérieurement dans un répertoire plus consistant.



Laurent Barthel

 

 

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