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Une Veuve joyeuse et sans âge

Avignon
Opéra-Théâtre
12/29/2012 -  et 30, 31 décembre 2012
Franz Lehár : La Veuve joyeuse
Sophie Marin-Degor (Missa Palmieri), Nadia Popoff (Ludivine Gombert), Caroline Gea (Manon), Julie Mauchamp (Olga Kromska), Armando Noguera (Prince Danilo), Francis Dudziak (Baron Popoff), Julien Behr (Camille de Coutançon), Jean-Claude Calon (Figg), Bernard Imbert (Lerida), Olivier Dejean (D’Estillac), Jean-François Baron (Bogdanovitch), Xavier Seince (Kromski), Pascal Canitrot (Pritsch)
Jacques Duparc (mise en scène), Eric Belaud (chorégraphie), Christophe Vallaux (décors), Marc Bohan (costumes), Philippe Grosperrin (lumières)
Ballet et Chœurs de l’Opéra-Théâtre d’Avignon, Aurore Marchand (direction des chœurs), Orchestre lyrique de région Avignon-Provence, Benjamin Pionnier (direction musicale)


(© Cédric Delestrade/ACM-Studio/Avignon)


Incontournable succès de l’opérette viennoise, La Veuve joyeuse s’invite sur la scène de l’Opéra-Théâtre d’Avignon pour les trois dernières soirées de 2012. Selon un usage qui s’est perdu au gré de l’internationalisation croissante de la planète lyrique, l’ouvrage est présenté dans sa version française due à Robert de Flers et Gaston de Caillavet. Dans cette immédiateté théâtrale retrouvée, on mesure combien la pièce pastiche les folklores – de l’Autriche avec la valse, des Balkans, dans un mélange magyaro-slave, et de la France avec le cancan pour lequel l’internationalisme des distributions vocales tend trop souvent à faire oublier qu’il est chanté dans la langue de Molière. Ce sens de l’imitation, Benjamin Pionnier l’a bien compris et le met remarquablement en valeur, se délectant tour à tour des alanguissements sirupeux, de la vigueur rythmique et de la gaillardise en jupons levés. Le chef français sait combien cette musique légère s’avère remarquablement écrite, et que le rire et l’esprit voisinent plus langoureusement que des battues négligées le laissent accroire. Attentif à l’idiosyncrasie des forces de l’Orchestre lyrique de région Avignon-Provence, il assure une cohésion entre les pupitres, aussi indispensable à la pétillance de la partition que plaisante à l’oreille.


Il trouve dans la délicieusement efficace mise en scène de Jacques Duparc un partenaire visuel au même diapason. A Tours l’année précédente, on avait apprécié dans Dédé le travail de l’homme de théâtre, l’un des seuls à s’intéresser sincèrement à un répertoire tombé en désuétude, celui de la musique lyrique légère à la française du début du vingtième siècle – opérette et comédie musicale. Sans chercher d’inutile actualisation, il réalise une émoustillante adaptation d’une fraîcheur sans âge. L’on n’est pas déçu par les décors dessinés par Christophe Vallaux: le palais éclatant de blancheur et d’artificiel snobisme, les pittoresques chorégraphies fortement teintées d’Europe centrale au deuxième acte réglées par Eric Belaud ou les froufrous carmin du dernier. C’est surtout une captivante direction d’acteur qu’il convient de saluer, et que sait s’approprier avec un délicieux cabotinage Francis Dudziak. Un sens jamais bégueule du calembour et de l’assonance porté jusqu’à l’absurde – «Son Excellence» déclinée selon les situations et les contextes textuels devient «Son Impuissance», «Son Arrogance», «Son Omnipotence» ou «Son Incontinence» – fait du nécessairement ivre Figg de Jean-Claude Calon un majordome aussi jubilatoire que l’inconsistance de son maître.


Cette excitation des zygomatiques compense une diction souvent perfectible chez plus d’un. L’effort d’intelligibilité pénalise l’interaction avec l’auditoire que l’on souhaiterait sans médiation – n’est-ce pas le génie de ce répertoire que l’on devrait toujours donner en langue vernaculaire? On appréciera malgré tout la piquante Missa Palmieri composée par Sophie Marin-Degor, élégante d’acidulité. Armando Noguera touche par son lyrisme un peu maladroit, tout comme Julien Behr en Camille de Coutanceau. Ludivine Gombert minaude une Nadia Popoff leste à moitié. Caroline Gea et Julie Mauchamp incarnent de satisfaisantes Manon et Olga Kromska. Les seconds rôles masculins complètent convenablement le plateau – Bernard Imbert (Lerida), Olivier Dejean (D’Estillac), Jean-François Baron (Bogdanovitch), Xavier Seince (Kromski), Pascal Canitrot (Pritsch) – de même que les chœurs préparés par Aurore Marchand. Imparfait çà et là, ce spectacle ne manque cependant pas sa cible: rendre heureux, et c’est l’essentiel.



Gilles Charlassier

 

 

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