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Pari audacieux, pari gagné

Geneva
Grand Théâtre
12/12/2012 -  et 14, 16, 19, 22, 27, 29, 31 décembre 2012
Arthur Honegger: Les Aventures du Roi Pausole
Jean-Philippe Lafont (Roi Pausole), Mark Milhofer (Taxis), Sophie Angebault (La Blanche Aline), Loïc Félix (Giglio), Ingrid Perruche (Diane à la houpe), Doris Lamprecht (Dame Perchuque), Elisa Cenni (Thiérette), Lamia Beuque (Mirabelle), Alexandre Diakoff (La Métayère)
Chœurs du Grand Théâtre de Genève, Ching-Lien Wu (préparation), Orchestre de la Suisse Romande, Claude Schnitzler (direction musicale)
Robert Sandoz (mise en scène), Gian Maurizio Fercioni (décors et costumes), Simon Trottet (lumières)


(© GTG/Yunus Durukan)


Audacieux, le pari de Tobias Richter, directeur du Grand Théâtre de Genève, de miser pour les fêtes de fin d’année sur un titre très rarement joué – Les Aventures du Roi Pausole d’Arthur Honegger – en lieu et place de la sempiternelle opérette d’Offenbach. Et réussi, à en juger en tout cas par les applaudissements enthousiastes qui ont accueilli tous les artistes au terme de la première représentation. Pourtant, le pari était loin d’être gagné d’avance. Car qui connaît encore aujourd’hui la musique d’Arthur Honegger, compositeur suisse (mais Parisien d’adoption) oublié même de ses compatriotes, lui qui figure pourtant sur leurs billets de 20 francs? De surcroît, auprès de ceux auxquels son nom dit quelque chose, il traîne une réputation de musicien austère et sévère, spécialiste de musique religieuse, la faute peut-être au Roi David ou à Jeanne d’Arc au bûcher, ses partitions les plus connues, au même titre que Pacific 231, qui reflète son amour pour les locomotives! Encore moins nombreux sont ceux qui savent qu’il a écrit trois opérettes, dont Le Roi Pausole justement, en 1929-1930. Le livret, basé sur un roman licencieux de Pierre Louÿs de 1901, a été rédigé par Albert Willemetz, parolier de Mistinguett et de Maurice Chevalier. La première eut lieu le 12 décembre 1930 au Théâtre des Bouffes-Parisiens et connut un immense succès; par la suite, l’ouvrage fut représenté plus de 500 fois.


L’histoire du Roi Pausole est truffée de jeux de mots. Souverain du royaume de Tryphème, Pausole possède un harem de 366 femmes, dont chacune devient la «Reine d’un jour», ou plutôt d’une nuit. Diane, une des femmes du harem, redouble d’efforts pour tenter de passer la soirée avec le roi. Mais celui-ci a d’autres préoccupations: sa fille bien-aimée, Aline, est tombée amoureuse du prince charmant (qui est en réalité une danseuse déguisée) et s'est enfuie avec lui. Giglio, le conseiller du roi, incite le souverain à partir à sa recherche avec lui et son fidèle serviteur Taxis, ce qui met en joie le roi, qui espère que ce voyage rendra sa vie moins monotone.


Pour sa première production lyrique d’envergure, le jeune metteur en scène suisse Robert Sandoz a réussi un joli coup. Son spectacle est très bien huilé et les différents tableaux s’enchaînent de manière fluide. Sans excès, mais avec finesse et intelligence, distillant çà et là de discrètes actualisations et des clins d’œil subtils, il nous fait passer du bleu paisible de la première partie, avec une piscine mobile (tout «baigne» au royaume de Pausole, même si chacun meurt d’ennui) au rouge écarlate de la seconde partie, où les quiproquos et les travestissements s’enchaînent à mesure que la morale et les interdits amplifient le désir, le démultipliant à l’envi. A la tête de l’Orchestre de la Suisse Romande en formation de chambre, Claude Schnitzler fait malheureusement preuve de trop de retenue et de prudence dans cette partition d’une grande richesse, qui va de la cantate avec fugue à la valse, en passant par le swing et le jazz, sans oublier un joli numéro de castagnettes ainsi que des pastiches de Gounod et d’Offenbach. Même s’il a depuis longtemps dépassé son zénith vocal, Jean-Philippe Lafont campe un Pausole à la fois roublard et désabusé, confondant de présence scénique et de verve comique. Le ténor Loïc Félix fait forte impression, aussi bon chanteur que comédien. Le reste de la distribution est à l’avenant, avec notamment la métayère impayable d’Alexandre Diakoff. Un beau spectacle de fêtes!



Claudio Poloni

 

 

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