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Flamboyante mais sérieuse

Geneva
Victoria Hall
05/09/2012 -  
Ludwig van Beethoven: Sonate n° 13, opus 27 n° 1 «Quasi une fantasia»
Serge Prokofiev: Sonate n° 6, opus 82
Franz Liszt: Sonate en si mineur

Yuja Wang (piano)


Y. Wang (© Felix Broede)


Il fut un temps où la Russie donnait l’impression de produire des pianistes en grande quantité, tous capables de manger d’une seule bouchée des œuvres complexes et gagnant tous les prix internationaux. Cette époque est révolue et c’est maintenant la Chine qui peut se vanter d’avoir pris cette place puisque, rappelons-le, il y a plus de pianistes amateurs chinois que les populations de la Suisse et de l’Autriche confondues.


Pour se faire un nom parmi les Lang Lang, Yundi, et la masse de tous ceux qui sont derrière, il faut bien sur une technique impeccable mais également ce petit quelque chose de spécial qui distingue et définit un artiste. Même si la jeune Yuja Wang n’a que 25 ans et continuera encore à évoluer, il est incontestable après ce premier récital genevois qu’elle a une patte bien à elle.


Sa principale qualité est un jeu d’une clarté remarquable. Quels que soient les nuances de son piano ou la vitesse à laquelle elle joue, toutes les notes sont audibles et la variété et la palette des harmoniques souhaitées par un Liszt ou un Prokofiev n’en ressortent qu’avec plus de richesse. Dans les passages où les compositeurs ont écrit une cascade de notes, elle garde une capacité à maintenir une ligne mélodique claire et continue même lorsque le compositeur a écrit une cascade de notes.


Elle est stylistiquement plus proche d’un Michelangeli, artisan d’une certaine perfection sonore que de l’expression exagérée et assez narcissique d’un Lang Lang. Il suffit pour en être convaincu de voir la concentration dont elle fait preuve lorsqu’elle joue et la discrétion, voir l’absence de ses rubatos. La Treizième Sonate « Quasi une fantasia » de Beethoven est-elle vraiment une pièce pour elle ? Sa lecture très stricte est bien sévère mais l’Adagio con espressione bénéficie d’un phrasé d’une belle amplitude et le passage fugué de l’Allegro vivace de sa capacité à structurer les plans sonores. Elle est cependant plus dans son élément dans une remarquable Sixième Sonate de Prokofiev où elle fait ressortir la violence et les dissonances de cette première sonate de guerre sans jamais saturer le son et en faisant ressortir la complexité des plans sonores. La Sonate de Liszt souffre peut-être de ne pas être conçue en un seul jet. Elle joue cette œuvre plus comme un série de moments que comme un tout organique mais à nouveau, sa capacité à développer la polyphonie de la redoutable fugue centrale est exemplaire et la coloration des pages finales aux tonalités un peu troubles est de toute beauté.


Acclamé par un public plus jeune que par habitude, Wang donne en bis des Variations sur « Carmen » transcrits par Horowitz à en rendre jaloux tous les pianistes de la salle, une Mélodie de Gluck mais surtout un Tea for two plein de charme qu’Art Tatum aurait adoré et enfin une Valse de l’Opus 64 de Chopin.


Les salles de concert suisses lui sont familières puisqu’elle s’est déjà produite au Festival de Verbier, à celui de Lucerne sous la direction de Claudio Abbado et qu’elle est déjà l’affiche du festival de St-Prex à coté de pianistes comme Murray Perahia ou Jean-Yves Thibaudet. Ne nous y trompons pas, elle a toute sa place à côté de ses glorieux ainés et on ne peut qu’espérer qu’elle devienne également une habituée de Genève.



Antoine Leboyer

 

 

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