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Par le trou de la serrure Liège
Palais Opéra
04/19/2012 - et 22*, 24, 26, 28 avril, 1er, 3, 5, 8 mai 2012
Giuseppe Verdi : La Traviata
Annick Massis*/Sabina Puértolas (Violetta), Xavier Cortes (Alfredo Germont), Giovanni Meoni (Giorgio Germont), Alexise Yerna (Flora Bervoix), Cristiano Cremonini (Gastone di Letorières), Julie Bailly (Annina), Roger Joakim (Barone Douphol), Ziyan Afteh (Dottore Grenvil), Patrick Delcour (Marchese d’Obigny), Marcel Arpots (Giuseppe), Iouri Lel (Un domestico di Flora), Marc Tissons (Un commissionario)
Chœurs de l’Opéra royal de Wallonie, Marcel Seminara (chef des chœurs), Orchestre de l’Opéra royal de Wallonie, Luciano Acocella (direction)
Stefano Mazzonis di Pralafera (mise en scène), Edoardo Sanchi (décors), Kaat Tilley (costumes), Franco Marri (lumières)
Avant Manon en juin, avec une inattendue June Anderson dans le rôle-titre, l’Opéra royal de Wallonie reprend sa Traviata de 2009. Applaudie dans Le Comte Ory à Marseille le mois passé, une de ses rares apparitions en France, Annick Massis assure le spectacle avec style et autorité. Sa Violetta gagne en épaisseur au cours de la représentation, bien que sa mort n’émeuve pas totalement, peut-être à cause d’un chant légèrement trop surveillé pour conférer à cette ultime scène son impact dramatique. Néanmoins, sa prestation affiche un niveau tout à fait estimable: métier maîtrisé, ligne nuancée, timbre mémorable, encore que les graves séduisent moins que le reste du registre. En la saluant chaleureusement à l’issue de la représentation, le public ne se trompe pas.
Par contre, Xavier Cortes peine à marquer de son empreinte le rôle d’Alfredo : aucune faute de goût, aucune insuffisance vocale mais un contour flou et un manque rédhibitoire de relief. Confier Giorgio Germont à Giovanni Meoni frôle l’erreur de casting car si le baryton possède de solides atouts, le chant manque de graves et de poids – au lieu d’un patriarche, il s’agit d’un grand frère. Préparés par Marcel Seminara, les Chœurs de l’Opéra royal de Wallonie restent fidèles à eux-mêmes, c’est-à-dire scrupuleux et impliqués, tandis que les petits rôles s’avèrent plutôt bien distribués. Figurent notamment quelques artistes belges habitués de la maison comme Alexise Yerna (Flora Bervoix). L’Orchestre de l’Opéra royal de Wallonie attend sans doute avec impatience de retrouver la fosse du théâtre, dont les travaux de rénovation s’achèvent dans les tous prochains mois, tellement il perd en qualité de timbre et en densité dans l’acoustique du Palais Opéra. Luciano Acocella, qui l’a déjà dirigé dans Maria Stuarda en 2008 et I Capuleti e I Montecchi en 2010, obtient néanmoins de sa part discipline et homogénéité. Le chef opte pour une dynamique plutôt franche et des tempi certes un peu trop tranquilles au début mais globalement prestes. La texture, aérée, permet d’apprécier les interventions précises et évocatrices des bois.
Pour Stefano Mazzonis di Pralafera, qui règle la mise en scène, les « bourgeois de "notre Traviata" sont des voyeurs, des gens qui se posent en moralisateur et se comportent de manière hypocrite ». Voilà qui justifie les trous de serrure percés dans le décor et les fauteuils de salle de spectacle placés sur scène. Si les bourgeois se livrent à leurs vices et à leurs libations sans complexe, la critique reste gentiment irrévérencieuse, malgré quelques poitrines féminines furtivement dénudées. Visuellement peu original, parfois littéral, comme ces camélias stylisés sur une des parois du décor, le spectacle se conforme une fois de plus à ce que l’Opéra royal de Wallonie propose habituellement mais il comporte son lot de bonnes idées comme ce lit, gigantesque dans le premier acte, de taille moyenne ensuite puis ridiculement petit dans le troisième, celui, justement, dans lequel s’éteint Violetta. Belle image de son déclin.
Sébastien Foucart
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