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Un déluge d'émotions Vienna Staatsoper 10/08/2000 - et 12, 16 octobre 2000 Richard Wagner : Tristan und Isolde Gösta Winbergh (Tristan), Matti Salminen (Koenig Marke), Waltraud Meier (Isolde), Peter Weber (Kurwenal), Geert Smits (Melot), Mihoko Fujimura (Braengane), Herwig Pecoraro (Ein Hirt), Michael Roider (Seemann), Marcus Pelz (Steuermann) Chor und Orchester der Wiener Staatsoper, Semyon Bychkov (direction musicale) Les premières mesures du Prélude laissaient déjà présager une soirée inoubliable : piani de velours, tempo démesuré, silences suspendus... L’orchestre restera dans cet état de grâce tout le long des trois actes, conduit avec maestria par Semyon Bychkov. Waltraud Meier est souveraine dans le rôle d’Isolde : impressionnante dans les aigus, d’une grande mobilité expressive, elle maîtrise véritablement son personnage et prend le temps de poser ses interventions avec naturel. Et ce qui la rend infiniment précieuse, c’est qu’elle parvient quand il le faut, à se fondre dans la sublime ligne orchestrale tissée par Bychkov. Le timbre riche et sensuel de sa confidente Brangaene est tout aussi émouvant. Mihoko Fujimura faisait là ses débuts au Staatsoper, et on ne peut que souhaiter la réentendre au plus tôt. Les rôles masculins sont aussi très beaux, et si Gösta Winbergh semble un rien en retrait au début de l’opéra, il convainc totalement dans le dernier acte. Il faut dire que chanter Tristan en face de Waltraud Meier, monopolisant à elle seule l’immense scène du Staatsoper, ne doit pas être une mince affaire. Matti Salminen est quant à lui tellement crédible dans le rôle du roi Marke, qu’on passera sans histoire sur sa fâcheuse manie de faire claquer trop systématiquement les consonnes en fin de phrase. Avec un tel plateau, Bychkov peut oser et réussir sans problème les nuances les plus extrêmes - les fortissimi orchestraux sont inouïs, et par miracle ne couvrent pas les chanteurs. Il nous livre les moindres raffinements de la partition, sans que jamais cette lecture analytique ne tarisse l’étonnante expressivité de cette musique. Si l’on ajoute que les éclairages soulignaient avec efficacité le déroulement dramatique du livret (grâce à eux le temps et l’espace semblent se figer durant la scène du philtre), on comprendra que l’extase des amants fut largement partagée par le public. Du reste personne ne semble s’être plaint de la durée inaccoutumée de la représentation, dépassant de 40 minutes l’horaire programmé!
Dimitri Finker
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