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C'est la faute à Rousseau

Geneva
Grand Théâtre
01/27/2012 -  et 29, 31* janvier 2012
Giovanni Battista Pergolesi: La serva padrona
Jean-Jacques Rousseau: Le Devin du village

Sophie Gordeladze (Serpina), Bruno Balmelli (Uberto), Dominique Dupraz (Vespone), Mark Milhofer (Colin), Daniel Djambazian (Devin), Norma Nahoun (Colette), Barbara Goldenberg, Marion Grange, Inès Berlet, Rémi Ortega, Jean-Nicolas Lucien (chœur des villageois)
Orchestre de l'Opéra-Studio de Genève, Jean-Marie Curti (direction musicale)
Ivo Guerra (mise en scène et décors), Marina Harrington (costumes), Simon Trottet (lumières)


(© GTG/Yunus Durukan)


2012 marque le tricentenaire de la naissance de Jean-Jacques Rousseau. Genève, ville natale du philosophe, se devait de fêter cet anniversaire. De nombreux événements sont prévus tout au long de l'année, avec en point d'orgue la création, en septembre, d'un opéra sur la vie de Rousseau (JJR, citoyen de Genève) composé par Philippe Fénelon, sur un livret de Ian Burton et dans une mise en scène de Robert Carsen. L'ouvrage donnera le coup d'envoi de la saison 2012-2013 du Grand Théâtre. En attendant cette première, la scène lyrique genevoise vient de proposer une combinaison originale: La serva padrona de Pergolèse couplée au Devin du village de Jean-Jacques Rousseau.


Rousseau musicien? On oublie peut-être un peu vite que l'auteur des Rêveries du promeneur solitaire et du Contrat social était aussi compositeur et théoricien de la musique. Il a notamment écrit un système de notation chiffré, rédigé un dictionnaire de la musique et participé à L'Encyclopédie de Diderot; il a aussi composé des cantates, des symphonies, un Salve Regina et des recueils de chansons. Et surtout, il a été à la fois l'auteur et le compositeur, pour la première fois dans l'histoire de la musique, d'un intermède, Le Devin du village (1752), particulièrement apprécié par le roi Louis XV et qui connut un succès retentissant. La serva padrona, quant à elle, fut créée en 1733, par un Pergolèse alors âgé de 23 ans. La popularité de l'œuvre fut telle qu'une troupe italienne la jouait encore à Paris en 1752, devant un Rousseau de 40 ans, déjà fervent partisan de l'opéra-bouffe italien. La «Querelle des bouffons» faisait alors rage dans la capitale française. Rousseau écrira son Devin pour apporter sa contribution au débat, lui qui vouait une haine féroce à Rameau, figure marquante de l'opéra français.


La serva padrona et Le Devin du village ont été présentés par l'Opéra-Studio de Genève, fondé en 1982 par le chef d'orchestre Jean-Marie Curti. L'ensemble ambitionne de proposer des ouvrages lyriques en dehors des scènes traditionnelles et de soutenir les jeunes musiciens, qu'ils soient chanteurs ou instrumentistes. Avec peu de moyens mais avec une énergie et un enthousiasme débordants, la troupe s'est lancée crânement dans l'aventure de ce diptyque, qui plus est au Grand Théâtre, une consécration. Les deux mini-opéras se déroulent dans un dispositif unique - une scène en bois surélevée - dans le décor même du Richard III de Giorgio Battistelli, qui occupe tout le plateau. Le metteur en scène et décorateur Ivo Guerra a été particulièrement inspiré par les rôles féminins, faisant de la Serpina de La Serva une punkette à la tignasse rousse et de la Colette du Devin une bimbo aguicheuse. Si l'ouvrage de Pergolèse, petit bijou de l'opéra-bouffe et modèle de concision, enchante par sa légèreté et sa veine comique, l'œuvre de Rousseau, passé les quarante premières minutes, plonge l'auditeur dans l'ennui le plus total. La musique et l'esthétique dramatique ont terriblement vieilli. Certes, il faut savoir gré à Jean-Marie Curti d'avoir voulu réhabiliter Rousseau musicien, mais il n'est pas sûr que l'exécution intégrale de son Devin serve la cause du compositeur. D'autant que la comparaison, directe et immédiate, avec La serva est particulièrement cruelle. Des coupes auraient été judicieuses. Car en sortant du Grand Théâtre, on ne peut s'empêcher de penser que rendre hommage à Rousseau c'est bien, mais plutôt par ses écrits que par ses partitions.



Claudio Poloni

 

 

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