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De Versailles à Sans-Souci

Versailles
Château (Galerie des Glaces)
01/21/2012 -  et 17 (Liestal), 23 (Martigny), 25 (Warszawa) janvier, 5 mars (Wien) 2012
Joseph Haydn : L’anima del filosofo ossia Orfeo ed Euridice: Ouverture, Hob.Ia.3 – Symphonie n° 92 «Oxford»
Carl Philipp Emanuel Bach : Symphonie en ré, Wq. 183/1, H. 663 – Concerto pour flûte en la, Wq. 168, H. 438
Johann Joachim Quantz : Concerto pour flûte n° 241, QV 5:174

Emmanuel Pahud (flûte)
Kammerakademie Potsdam, Trevor Pinnock (direction)





Une fête d’anniversaire: Louis XIV invite Frédéric II, qui aura trois cents ans le 24 janvier. Retour aux sources, en un sens, puisque comme tous les autres monarques européens, le souverain prussien s’est notamment inspiré de Versailles pour édifier son propre palais de Sans-Souci. Et étrange télescopage des siècles: intitulé «Frédéric II. Splendeurs de la Prusse», le spectacle marquant ce tricentenaire se déroule dans la galerie des Glaces, où fut proclamé l’Empire allemand en 1871 et signé le Traité de Versailles en 1919. Triple rendez-vous avec l’histoire franco-allemande, par conséquent, mais l’anticipation, pour ne pas dire la science-fiction, n’est pas loin non plus, puisque parmi les nombreuses peintures cohabitant avec les 357 miroirs, on remarque L’Ordre rétabli dans les finances (1662) de Charles Le Brun.


Si prestigieuse et chargée de mémoire soit-elle, la galerie conçue par Jules Hardouin-Mansart entre 1678 et 1684 constitue-t-elle pour autant le lieu idéal pour un concert? Etroite (un peu plus de 10 mètres), elle offre en revanche une impressionnante longueur (73 mètres) permettant d’installer une bonne soixantaine de rangées une fois déduit l’espace dévolu aux musiciens. Même si ceux-ci sont placés sur une très haute estrade – au point que debout, ils pourraient risquer de se heurter à un lustre – il ne fait guère de doute que depuis le fond, la vision est pour le moins lointaine et parcellaire. Quant au son, à en juger depuis les premiers rangs, il se déploie généreusement, mais la réverbération demeure tolérable.


Le royal programme est donné par l’Académie de chambre de Postdam – quoi de plus logique? – une formation née en 2001 de la fusion des ensembles à cordes Oriol et à vents Perseus. Si son directeur artistique, qui a succédé à Peter Rundel, Sergio Azzolini et Michael Sanderling, est depuis deux saisons Antonello Manacorda, ancien konzertmeister de l’Orchestre de chambre Mahler, c’est toutefois à Trevor Pinnock qu’échoit la responsabilité de la présente tournée européenne, de Suisse en Pologne ce mois-ci avant de jouer les prolongations en mars à Vienne.


De Versailles à Potsdam, le lien est évidemment Voltaire – d’où peut-être l’idée de débuter avec la brève Ouverture du rare opera seria en quatre actes L’Ame du philosophe ou Orphée et Eurydice (vers 1791-1795), jamais représenté ni intégralement publié du vivant de Haydn. Toujours est-il que depuis son continuo de clavecin, Pinnock donne d’emblée le ton: dynamique et sonore, martial même – il est vrai que les instruments d’époque de l’Académie de chambre de Potsdam, bois, cuivres et timbalier debout, n’ont pas besoin de plus que dix-huit cordes pour s’imposer dans cette acoustique avantageuse. Impossible d’évoquer le Berlin d’alors sans un hommage à Carl Philipp Emanuel Bach, qui y passa trente ans. La Symphonie en ré, première de l’ultime série de quatre composée en 1776, est cependant postérieure, datant de la période hambourgeoise. Qu’importe, car c’est toujours un régal que ce festival d’irrégularités métriques, d’ambiguïtés harmoniques et de ruptures de ton, avec une instrumentation et un traitement des motifs aussi recherchés que les modulations – un deuxième mouvement en mi bémol!


Emmanuel Pahud, membre de la Philharmonie de Berlin depuis 1993, tisse, lui aussi, un lien entre la France et l’Allemagne, d’autant qu’il vient de publier deux disques de concertos et sonates sertis dans un épais livret et sous-titrés «Le Roi flûtiste. Musiques à la cour de Frédéric le Grand» (EMI). N’arborant pas le costume XVIIIe sur lequel il apparaît en photo dans cet album et dans le programme de salle (au demeurant imprécis et visiblement – mal – traduit), le flûtiste a d’abord choisi de rester avec le plus doué des fils Bach. A l’instar de trois de ses quatre concertos pour flûte, le Concerto en la (1753) existe également dans deux autres versions où l’instrument soliste est le clavecin ou le violoncelle. Antérieure de près d’un quart de siècle, la musique est certes de facture plus traditionnelle que la symphonie tout juste entendue et offre au flûtiste français l’occasion de faire valoir sa virtuosité, mais comment résister à l’étonnant Largo con sordini, mesto central, sombre et expressif?


Après une demi-heure d’entracte, Pahud revient avec une autre personnalité indispensable pour compléter le panorama de ces temps prussiens: Johann Joachim Quantz, le flûtiste de la cour, à la fois théoricien, pédagogue et auteur extraordinairement prolifique de concertos, sonates en trio, sonates et solos pour son instrument. Plus convenue, malgré, ici aussi, un beau mouvement lent marqué Arioso e mesto, l’œuvre pâlit nettement de la comparaison avec la précédente. A tout seigneur, tout honneur, le bis ne pouvait être consacré qu’au roi lui-même, interprète mais aussi compositeur à ses heures, même si l’Allegro assai de son Troisième Concerto (en ut) reste assez proche du style de son maître Quantz.


A défaut d’avoir un rapport avec Berlin, la Quatre-vingt-douzième Symphonie «Oxford» (1791) de Haydn s’ouvre sur un répété, comme celle de C.P.E. Bach, a été écrite pour Paris, plus précisément les concerts de la Loge Olympique, et est ici confiée à un chef anglais. Elle a certes fière allure, mais à force de vigueur, Pinnock finit par avoir la main lourde, surtout dans ces hauts volumes qui contribuent à épaissir considérablement la pâte. Réactif et engagé, l’orchestre ne se révèle cependant pas nécessairement sous son meilleur jour, avec des cors un peu incertains et, surtout, un hautbois bien vert et criard.


Le 4 mai au Théâtre des Champs-Elysées, le public parisien pourra retrouver le fondateur – voici déjà quarante ans – de l’English Concert, cette fois-ci à la tête de la Philharmonie de chambre allemande de Brême pour un programme Beethoven et Schubert avec Maria João Pires.


Le site de Trevor Pinnock
Le site d’Emmanuel Pahud
Le site de l’Académie de chambre de Potsdam



Simon Corley

 

 

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