About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Strasnoy ouvre Le Bal

Paris
Théâtre du Châtelet
01/13/2012 -  
Benjamin Britten : Four Sea Interludes from Peter Grimes, opus 33a – Passacaglia from Peter Grimes, opus 33b
Oscar Strasnoy : Le Bal (création française)

Miriam Gordon-Stewart (Rosine), Fabrice Dalis (Alfred), Trine Wilsberg Lund (Antoinette), Ann-Beth Solvang (Miss Betty), Chantal Perraud (Mademoiselle Isabelle), Hugo Oliveira (baryton)
Orchestre national de France, Anu Tali (direction)
Matthew Jocelyn (mise en espace), Hermenegildo Sabat (illustrations projetées)


O. Strasnoy (© Guy Vivien)


Vingt-deuxième édition pour Présences, le «festival de création musicale de Radio France»: conçue par Marc-Olivier Dupin, avant son remplacement par Jean-Pierre Le Pavec a la tête de la direction de la musique, et Roland David, la programmation de cette édition, hormis une création de Vincent Manac’h, s’organise comme de coutume autour d’une personnalité, en l’occurrence Oscar Strasnoy (né en 1970). Cette année marque cependant un important changement, car l’accès à la plupart des manifestations devient payant (10 ou 15 euros selon les concerts), sauf pour les moins de 28 ans. Même s’il est trop tôt pour affirmer que cette décision surprenante aura une incidence sur la fréquentation, malgré une soirée inaugurale qui a peiné à remplir le parterre et la corbeille, renoncer à la gratuité jusqu’alors en vigueur, c’est revenir sur un symbole fort dans un contexte où l’accès à la culture et, tout spécialement, à la musique contemporaine devrait demeurer une priorité.


Du 13 au 22 janvier au Châtelet, quatorze programmes permettront au public français de découvrir l’univers du compositeur argentin, ou du moins d’en approfondir la connaissance: The End, quatrième et dernière partie du cycle Sum, fut ainsi créée dans le cadre de Présences 2009, le festival d’Aix-en-Provence a produit en 2010 la première d’Un retour et Cachafaz a été présenté dans plusieurs théâtres français, dont l’Opéra Comique en décembre de la même année. Présences passe en revue toutes les facettes d’un catalogue très diversifié, mais le monde lyrique est particulièrement à l’honneur tout au long du festival: Geschichte/L’Histoire («opérette a cappella»), Un retour (cf. supra), Fabula et L’Instant, sans oublier Préparatifs de noces avec B et K, «cantate profane» que Strasnoy assimile lui-même à un «quasi opéra», et son arrangement de Didon et Enée de Purcell.


Le concert d’ouverture contribue aussi à ce panorama, avec la première française d’un ouvrage en un acte, Le Bal (2008-2009), commandé par l’Opéra de Hambourg où il fut créé en mars 2010 sous la direction de la Generalmusikdirektorin Simone Young. C’est ici aussi une femme qui est à la baguette, Anu Tali (née en 1972), face à l’Orchestre national de France. Fallait-il prévoir, malgré la brève durée de l’œuvre (une petite heure), un lever de rideau – à peine 25 minutes de musique suivies immédiatement d’un entracte? Et pourquoi avoir choisi ces extraits symphoniques de Peter Grimes (1945) de Britten, dont le rapport avec la programmation du festival ne saute pas immédiatement aux yeux? Ces questions se font d’autant plus jour que dans les quatre «Interludes marins», la direction très appliquée de l’Estonienne demeure bien prosaïque et dépourvue de poésie, même si elle se montre ensuite nettement plus à son avantage dans la rigueur de la «Passacaille». Mais nul doute, à sa décharge, que l’essentiel du temps de répétition a été dévolu au Bal.


Gracieusement mis à la disposition des spectateurs (et par ailleurs surtitré), le livret du metteur en scène canadien Matthew Jocelyn est tiré du roman éponyme (1930) d’Irène Nemirovsky (1903-1942). Adapté en son temps au cinéma, il décrit l’émancipation d’Antoinette, 14 ans, qui, méprisée par ses parents, médiocres parvenus à l’ascension aussi rapide que d’origine douteuse, sabote ce qui devait constituer leur apothéose sociale, un bal méticuleusement organisé par la mère, Rosine, auquel la jeune fille s’était vu interdire de paraître: sur un coup de tête, elle jette dans la Seine les invitations qu’elle devait poster. Le jour venu, aucune de ces personnalités aux noms pittoresques et fantaisistes ne se présente, si ce n’est la tante Isabelle, professeur de piano, alias «Notre Dame des gammes». Entre grincements à la Gombrowicz et absurdité à la Ionesco, cette déconvenue jette une lumière crue sur la vacuité et les illusions d’une famille au sein de laquelle elle parvient enfin à s’affirmer.


Crédité d’une «mise en espace», le librettiste, en réalité, ne va pas au-delà de l’alignement des six chanteurs (dont trois avaient participé à la création) derrière leurs pupitres et de quelques jeux de scène. En revanche, au fil du déroulement de l’opéra, comme dans une sorte de bande dessinée, des caricatures baroques et colorées du dessinateur argentin d’origine uruguayenne Hermenegildo Sabat (né en 1933) sont projetées sur un grand écran au-dessus de l’orchestre. Strasnoy se met indéniablement au diapason des grincements du texte et des images, mais le sentiment dominant est que l’essentiel ne se passe pas dans les voix: il s’agit davantage d’une conversation en musique, qui «fonctionne» certainement très bien sur scène (et se trouve dès lors desservie en version de concert) et qui laisse peu de place aux épanchements lyriques, sinon peut-être à la fin de la quatrième scène, lorsque Rosine se prépare pour la fête, moment de rêve et de nostalgie, non dépourvu de second degré. Comme dans Cachafaz, mais de façon moins systématique et provocatrice, le compositeur revendique une certaine hétérogénéité: les références, et même les citations – le troisième mouvement de la Première Symphonie de Mahler vient ainsi en écho à la clarinette volontiers klezmer du petit quintette de musiciens du bal (avec accordéon et banjo) – ne s’installent toutefois jamais durablement, l’orchestre, nonobstant de courts morceaux de bravoure, demeurant cantonné à un commentaire de l’action.


Le site du festival «Présences 2012»
Le site d’Oscar Strasnoy
Le site de Hermenegildo Sabat
Le site de Miriam Gordon-Stewart
Le site de Fabrice Dalis
Le site de Trine Wilsberg Lund
Le site d’Ann-Beth Solvang



Simon Corley

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com