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Le remède de Haydn

Paris
Théâtre Artistic Athévains
01/09/2012 -  et 10, 12, 13, 15, 16, 17, 19, 20, 21, 22, 24, 25, 26 (Paris), 29 (Neuchâtel) janvier, 2, 3, 4, 5, 7, 9, 10, 11, 12, 14, 16, 17, 18, 19, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 28, 29 février, 1er, 2, 3, 4, 6, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 15, 16, 17, 18, 22, 23, 26 (Paris), 29 (Vevey) mars, 29 juin (Pontoise) 2012, du 18 décembre au 12 février 2013
Joseph Haydn : Lo speziale, Hob.XXVIII.3 (adaptation Andrée-Claude Brayer)
Jean-François Chiama (Sempronio), Karine Godefroy (Grilletta), Laurent Herbaut (Volpino), Xavier Mauconduit (Mengone)
Orchestre-Studio de Cergy-Pontoise: Jean-Marie Poupelin (hautbois), Norbert Vergonjanne (cor), Romain Sénac (violon), François Martigné (alto), Guillaume Martigné (violoncelle), Andrée-Claude Brayer (pianoforte et direction)
Anne-Marie Lazarini (mise en scène), François Cabanat (décor, lumières), Dominique Bourde (costumes, surtitrage)




Après La Traviata à Cergy en 2005 puis Le Mariage secret à l’Artistic Athévains au printemps 2007, la même équipe artistique réinvestit le petit théâtre de la rue Richard-Lenoir jusqu’à fin mars pour L’Apothicaire (1768), l’un de ces opéras de Haydn dont on parle toujours mais qu’on ne monte jamais, même si le Châtelet présentera dès mars prochain Orlando paladino (mis en scène par Kamel Ouali et dirigé par Jean-Christophe Spinosi).


De ces trois actes, une ouverture, douze numéros et le livret intégral ont fini par refaire surface au fil des ans, mais il manque tout le début du troisième, principalement un air, un récitatif et un duo. Depuis la première reprise de l’ouvrage en 1895 à Dresde, qui fut aussi la première production d’un opéra de Haydn depuis la mort du compositeur, diverses solutions et reconstitutions ont été proposées pour assurer la cohérence dramaturgique et musicale du propos. André-Claude Brayer, qui a adapté la partition pour un petit effectif (hautbois, cor et trio à cordes) qu’elle dirige depuis le clavier d’un pianoforte moderne (réalisé par le facteur Philippe Jolly), a choisi, pour sa part, un autre air de Haydn (avec l’accompagnement du seul pianoforte) et un duo extrait de Bastien et Bastienne de Mozart.


Du «dramma giocoso» de Goldoni, Haydn a exclu les personnages «sérieux» et resserré l’intrigue autour de quatre figures de caractère bouffe. Evoquant aussi bien Così fan futte (avec non pas un, mais deux faux notaires) que Le Barbier de Séville (un tuteur, l’apothicaire Sempronio, qui veut épouser sa pupille, Grilletta, et deux prétendants, Mengone et Volpino, jamais en manque d’idées pour s’introduire dans sa demeure et le berner), l’action se prête à un ton léger: Ouverture étincelante, délicieux quatuor conclusif de l’acte II, pittoresque air «Salamelica» lorsque l’acte III tourne à la turquerie.


Dans des toiles peintes vénitiennes en trompe-l’œil de François Cabanat, qui se charge lui-même de les éclairer, Anne-Marie Lazarini situe l’action au moment de l’une de ces marées hautes d’hiver («acqua alta») caractérisant la cité des Doges. Avant l’Ouverture et durant les entractes, l’orage gronde et on entend la pluie tomber sur les musiciens, installés sur scène en léger surplomb côté jardin: en livrée d’époque après avoir abandonné d’incontournables capes noires et masques blancs, ils se protègent avec leurs journaux... de notre temps (La Repubblica, L’Unita, ...). Le parti pris n’est pas absurde, mais tend à casser le rythme d’un spectacle (d’une heure et demie) donné sans interruption, qui gagnera sans doute en dynamisme au fil des soirées et matinées. En outre, la mise en scène parvient globalement bien à s’accommoder des contraintes inhérentes à une alternance de récitatifs (la plupart secco) et d’airs, toujours plus difficiles à faire vivre que les rares ensembles vocaux (pour l’essentiel les finales des trois actes).



X. Mauconduit, K. Godefroy, J.-F. Chiama, L. Herbaut
(© Marion Duhamel)



La Venise du XVIIIe se retrouve également dans les costumes de Dominique Bourde et dans une scénographie minutieuse, où l’étal en plein air sous une tenture regorge de pots, bocaux, flacons et bols, jusqu’au plat à saignée qui n’est pas oublié, et, pour le clin d’œil humoristique, un mixeur électrique. Un surtitrage est projeté sur le mur de la maison du barbon et de sa protégée: dans une élégante police de caractères (mais avec quelques coquilles et un excès de répliques répétées), la traduction, très recherchée, vise délibérément à surprendre, collant étroitement au texte original ou, au contraire, s’en éloignant beaucoup.


Parfois un peu trop couverte par le sextuor instrumental, au sein duquel le violon apparaît comme le maillon faible, la distribution réunie pour l’occasion s’en tire bien, sans le filet d’un orchestre complet et dans une petite salle où il est impossible de tricher. Deux se montrent d’emblée à leur meilleur: Karine Godefroy, qui tend toutefois à forcer dans l’aigu, et Laurent Herbaut qui, reprenant un rôle travesti confié à l’origine à une mezzo (sans doute parce que Haydn ne disposait pas d’autre chanteur), confère l’autorité de sa voix baryton au prétentieux Volpino. Un peu en difficulté au début, notammment dans l’air «Questa e un’altra novita» du premier acte, avec son grand écart entre les registres aussi cocasse que périlleux, Jean-François Chiama campe ensuite un Sempronio solide et crédible; de même, Xavier Mauconduit monte en puissance pour offrir une incarnation vocalement et scéniquement convaincante de Mengone, ce jeune premier d’une nature un peu particulière, courageux... mais pas téméraire pour conquérir sa belle.


S’il ne dispense donc pas un remède radicalement efficace contre la morosité ambiante, cet Apothicaire mérite toutefois une visite. A noter qu’après la représentation du 3 février, Marc Vignal, qui a consacré à Haydn une monographie de référence (Fayard), animera une conférerence-débat sur le compositeur.


Le site du Théâtre Artistic Athévains



Simon Corley

 

 

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