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Encore en Russie

Paris
Salle Pleyel
01/06/2012 -  
Piotr Ilyitch Tchaïkovski : Concerto pour piano n° 1, opus 23
Serge Prokofiev : Cendrillon, ballet, opus 87, et suites, opus 107 à 109 (extraits)

Mikhaïl Rudy (piano)
Orchestre philharmonique de Radio France, Alexander Vedernikov (direction)


M. Rudy


Stravinski en octobre avec John Storgårds, Chostakovitch en novembre avec Jukka-Pekka Saraste, Prokofiev le mois dernier avec Vladimir Ashkenazy, Chostakovitch et Rachmaninov avec Kirill Karabits, Prokofiev et Chostakovitch avec Vasily Petrenko puis Rimski-Korsakov avec Rafael Frühbeck de Burgos le mois prochain, Scriabine avec Myung-Whun Chung (et Evgeny Kissin) puis Prokofiev et Stravinski avec Pablo Heras-Casado en mars: tout au long de la saison, le Philharmonique de Radio France offre un large panorama de la musique russe. Le programme du premier concert de 2012, associant un chef russe et un soliste devenu français mais originaire de l’ex-Union soviétique, ne déroge pas à la règle: débutant par le plus célèbre – peut-être – quoique pas le plus joué – sans doute – des concertos pour piano du répertoire, le Premier (1875) de Tchaïkovski et son majestueux frontispice, il n’a évidemment pas manqué de faire salle comble à Pleyel en ce vendredi soir.


Mikhaïl Rudy connaît évidemment l’œuvre à la perfection, ne serait-ce que pour l’avoir enregistrée il y a un peu plus de vingt ans à Saint-Pétersbourg sous la direction de Mariss Jansons (EMI). Mais si l’on apprécie toujours autant son jeu souple et moelleux, il est impossible de reconnaître le technicien dans ces notes avalées, ces traits savonnés, ces approximations trop nombreuses et ces défaillances répétées, tandis qu’il est vain de s’efforcer de retrouver le musicien dans cette interprétation plus prodigue de raideur que de poésie, affectée en outre de maints décalages avec un orchestre qui peine à suivre un rubato aussi imprévisible et qu’Alexander Vedernikov conduit sans grande subtilité. Par ses acclamations, le public parisien confirme toutefois que le pianiste demeure cher à son cœur mais c’est hélas pour obtenir un bis sommairement expédié, le Second des Nocturnes de l’Opus 27 (1835) de Chopin. Nul doute qu’il tiendra à prendre sa revanche de cette soirée dès le 21 mars prochain à la Cité de la musique, où il donnera des pages de Liszt et de Janácek parallèlement à la projection de La Métamorphose des frères Quay.


L’éclat de Roméo et Juliette a quasiment éclipsé les huit autres ballets de Prokofiev, à l’exception de la Suite scythe (Ala et Lolli), du Bouffon (Chout) et, plus encore, de Cendrillon (1944). Comme de nombreux autres chefs, Vedernikov a procédé à son propre panachage d’extraits du ballet intégral et des trois Suites (1946) que le compositeur en a lui-même tirées: seize numéros enchaînés attaca, près de trois quarts d’heure de musique, soit un bon tiers de la partition, suivant à peu près l’ordre du livret et incluant évidemment le «tube», à savoir l’entêtante valse du deuxième acte. Chefdirigent de l’Orchestre symphonique d’Odense depuis 2009, mais surtout ancien directeur musical du Bolchoï (2001-2009), où il a notamment dirigé Cendrillon en 2006, il a visiblement fait apprécier sa connaissance du terrain aux musiciens, qui lui réservent un bel accueil au moment des rappels. Mais si l’orchestre démontre à nouveau sa forme, à l’image du clarinettiste Jérôme Voisin, le résultat laisse globalement un sentiment mitigé, entre de courtes pièces de caractère mordantes et bien campées («La Dispute», «Le Prince et les cordonniers») et une tendance à rester au ras des pâquerettes ou à ouvrir trop largement les vannes, comme dans ce «Minuit» tonitruant qui finit par ressembler à une symphonie de guerre de Chostakovitch.



Simon Corley

 

 

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