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Oratorio de saison (2) Paris Théâtre des Champs-Elysées 12/23/2011 - et 6 (London), 17 (Utrecht) décembre 2011 George Frideric Handel : Messiah, HWV 56
Elizabeth Watts (soprano), Timothy Mead (contre-ténor), Nicholas Mulroy (ténor), Lisandro Abadie (baryton)
Choir of the Enlightenment, Orchestra of the Age of Enlightenment, Laurence Cummings (direction)
L. Cummings (© Sheila Rock)
En cette période de l’année, on aurait bien entendu, pour une fois, Pierné (Les Enfants à Bethléem), mais même Berlioz (L’Enfance du Christ) et Britten (A Ceremony of Carols) ne semblent pouvoir rivaliser avec les vastes partitions chorales que Bach et Haendel ont consacrées, exactement à la même époque, à la naissance et, au-delà, à la place centrale du Christ dans la foi chrétienne: une programmation qui répond visiblement aux attentes du public, car tout autant que la veille à Sainte-Clotilde pour l’Oratorio de Noël par le Chœur de Radio France, il s’est rendu très nombreux au Théâtre des Champs-Elysées pour Le Messie (1741), donné avec surtitrage dans le décor en noir et blanc (mais sur fond d’un rouge intense) de La Flûte enchantée qui y est par ailleurs présentée jusqu’au 26 décembre.
Il est vrai que la venue de l’Orchestre de l’Age des Lumières – avant son retour, toujours avenue Montaigne, dans le répertoire romantique (Roméo et Juliette de Berlioz le 26 février avec Mark Elder) puis moderne (un programme Fauré/Debussy/Ravel le 4 juin avec Simon Rattle – suffisait à susciter l’intérêt, car la formation britannique, un quart de siècle après sa fondation, se range parmi les meilleures à s’être spécialisées dans les instruments d’époque. Elle se montre digne de ce statut tout au long de la soirée, imposant une homogénéité, une précision et une régularité qui ne sont pas toujours de mise dans les phalanges de même obédience, sans pour autant renoncer à un vrai plaisir de faire de la musique, qu’extériorise de façon toujours aussi radieuse Chi-chi Nwanoku, première contrebasse solo. Mais celui qui doit avant tout être salué, c’est le premier trompettiste, qui, debout au devant de la scène, livre un solo absolument parfait de technique et de musicalité dans l’air «The trumpet shall sound», encore que cette performance n’apporte toutefois pas grand-chose à sa notoriété, car depuis la saison dernière, où les programmes de salle du Théâtre des Champs-Elysées sont devenus gratuits, ils ne fournissent hélas plus la liste détaillée des membres des ensembles qui s’y produisent.
Dirigeant depuis le clavecin un effectif de taille moyenne (vingt-quatre cordes), Laurence Cummings (né en 1968) privilégie l’exactitude sur le souffle et l’imagination, notamment durant la première partie. Plutôt vive, la battue se révèle parfois sèche et cassante, dramatisant volontiers le propos, ne serait-ce que par sa manière d’enchaîner les numéros sans interruption, comme pour lutter contre l’impression lisse et étale qui tend à s’installer. Réduit à vingt-deux chanteurs, l’impeccable «Chœur des Lumières» tire parti de cette modeste dimension pour s’illustrer par sa transparence, sa souplesse et son tranchant.
Au sein du quatuor soliste, Nicholas Mulroy est sans doute celui qui convainc le moins: sans séduction particulière, la voix du ténor anglais, à la ligne de chant et aux vocalises pas toujours très élégantes, tend à s’engorger dans l’aigu, souffrant, dans le duo «O death, where is thy sting?» de la troisième partie, de la comparaison avec Timothy Mead. Le contre-ténor brille quant à lui par sa puissance, sa chaleur, son style irréprochable et ne faillit pas quand il est quasiment à découvert dans l’air «He was despised» de la deuxième partie, de même qu’Elizabeth Watts dans l’air «I know that my Redeemer liveth» de la troisième partie. Dynamique et engagée, non contente de faire valoir un timbre agréable, la soprano est celle qui s’efforce le plus de conférer à la musique et au texte un caractère expressif. Seul de la distribution à ne pas être anglais, Lisandro Abadie tire bien son épingle du jeu, vocalisant certes de façon un peu raide mais mettant en valeur une voix claire et longue, qui gagne en densité au fil du concert: après sa prestation dans le rôle-titre de Cachafaz de Strasnoy l’année dernière qui est restée dans toutes les mémoires, le baryton argentin confirme qu’il est un artiste polyvalent.
Le site de l’Orchestre de l’Age des Lumières
Le site d’Elizabeth Watts
Le site de Timothy Mead
Le site de Nicholas Mulroy
Le site de Lisandro Abadie
Simon Corley
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