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Humanisme à l’heure anglaise

Strasbourg
Palais de la Musique et des Congrès
11/10/2011 -  
Benjamin Britten : Sinfonia da Requiem, Op. 20
Michael Tippett : A Child of Our Time

Rebecca Evans (soprano), Patricia Bardon (alto), Krésimir Spicer (ténor), Andrew Foster Williams (basse)
Chœur de l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg, Catherine Bolzinger (chef de chœur), Orchestre Philharmonique de Strasbourg, Carlo Rizzi (direction)


C. Rizzi


Ce programme de concert britannique fonctionne à merveille, autant par ses proportions idéales que par le dialogue qui peut s’y instaurer entre deux ouvrages d’ailleurs presque contemporains l’un de l’autre. L'œuvre de Britten, Sinfonia da Requiem composée en 1940 par un compositeur émigré aux Etats-Unis, paraît d’une noirceur prémonitoire quant aux horreurs de la période de guerre en cours. C’est là le Requiem orchestral de Britten, signé par un jeune compositeur qui y jette son inspiration quelque peu en vrac, avec une créativité prodigieuse. La tragédie mondiale ambiante semble s’y doubler de forts conflits intérieurs, un aspect autobiographique que l’on retrouvera moins dans le War Requiem, œuvre plus tardive et accomplie mais d’une sincérité plus fabriquée, somme toute plus « artiste ». Ici la détresse semble s’exprimer à l’état brut, rugosité que l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg restitue bien, en particulier dans le Dies Irae central, cravaché sans faiblir par Carlo Rizzi. Un beau passage de bravoure collectif, où s’illustrent notamment les trompettes de Jean-Christophe Mentzer et Daniel Stoll. Les deux autres volets sont tout aussi efficacement construits, la brièveté de l’œuvre se portant par ailleurs garante d’une intensité d’exécution maximale de la part d’un orchestre qui paraît s’y impliquer constamment avec beaucoup d’attention.


D’une envergure plus large, l’oratorio de Tippett A Child of Our Time donne l’occasion au Chœur de l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg, préparé par Catherine Bolzinger, de se confronter à une œuvre techniquement problématique, de multiples difficultés d’intonation paraissant dans l’ensemble assez bien surmontées. De la part d’une formation chorale d’amateurs de bon niveau, la qualité de ce travail accompli mérite d’être saluée. Ce que l’on perd parfois en précision se trouve compensé par une vraie ferveur, perceptible en particulier dans les spirituals successifs que Tippett a dispersés dans sa partition. Avec cet oratorio humaniste on se trouve là encore face à une géniale ébauche, où Tippett n’est pas encore parvenu au sommet de son art en matière d’écriture chorale (on trouvera par exemple dans The Midsummer Marriage des ensembles encore plus vertigineux, splendeurs dont on ne trouve dans A Child of Our Time que les prémisses, encore que très clairement identifiables déjà). Mais la densité de cette œuvre, relativement brève, du moins en regard de l’appareil orchestral et choral qu’elle requiert, s’avère toutefois gratifiante. Tout n’y paraît pas d’une égale inspiration mais rien n’y est maladroit non plus et la sensibilité d’écorché vif qui sous-tend tout l’édifice reste un gage d’adhésion immédiate de la part du public, même lors d’une toute première écoute. Là encore Carlo Rizzi ne s’embarrasse pas trop de détails et va d’emblée à l’essentiel, y compris quand il s’agit d’accompagner un quatuor de solistes plutôt brut de timbre et d’élocution (un anglais difficilement déchiffrable en général) où brille un peu trop isolément la soprano Rebecca Evans, aux prises avec une partie très exposée mais d’une magnifique ampleur.


Somme toute une soirée qui devrait avoir atteint au moins un objectif important : convaincre un public d’abonnés qu’autant Britten et Tippett sont des compositeurs essentiels.



Laurent Barthel

 

 

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