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Proche de la perfection

Paris
Salle Pleyel
09/17/2011 -  et 4 (London), 16 (Bonn) septembre, 21 octobre (New York) 2011
Ludwig van Beethoven : Missa Solemnis en ré majeur, opus 123

Helena Juntunen (soprano), Sarah Connolly (alto), Paul Groves (ténor), Matthew Rose (basse)
London Symphony Chorus, Joseph Cullen (chef de chœur), London Symphony Orchestra, Sir Colin Davis (direction)


C. Davis (© Matt Stuart)


Après avoir donné il y a quelques mois la Messe en ut majeur à la tête de l’Orchestre national de France, voici Sir Colin Davis de retour à Paris pour, cette fois-ci, diriger la monumentale Missa Solemnis. Chef-d’œuvre absolu dont la composition aura occupé Ludwig van Beethoven (1770-1827) pendant quatre ans (de 1819 à 1823) et dont la création triomphale (mais partielle) aura lieu lors d’un mémorable concert donné en mai 1824 au cours duquel la Neuvième symphonie était également créée, la Missa Solemnis est une vieille compagne du chef anglais. En effet, outre qu’il l’a déjà enregistrée au début des années 1990 pour Philips, il l’a notamment dirigée, voilà plus d’une décennie, le 31 juillet 1999 à la Cité de la musique, à la tête de l’Orchestre des jeunes de l’Union européenne (les solistes étaient alors Alison Buchanan, Sara Mingardo, Kenneth Tarver et Stephen Milling). Quant à l’équipe de ce soir, elle est on ne peut plus aguerrie puisqu’elle vient de donner la Messe au Royal Albert Hall de Londres, le 4 septembre dernier, dans le cadre des fameux «Proms», et la veille à la Beethovenfest de Bonn.


La recette d’une bonne interprétation de la Missa Solemnis est relativement simple: il suffit de quatre solistes de très haut niveau, d’un chœur rompu à toutes les difficultés possibles et imaginables, d’un orchestre au mieux de sa forme et d’un chef, un artisan pourrait-on dire, qui sache insuffler un véritable souffle à l’ensemble. Le fait est que tous ces éléments étaient réunis ce soir et qu’on aura assisté à une prestation véritablement exceptionnelle.


Et tout d’abord, quel chœur! Le London Symphony Chorus a tout bonnement été parfait de la première à la dernière note, consolidant son statut d’un des meilleurs chœurs actuellement en activité à travers le monde. La presque centaine de chanteurs, qui occupait, comme habituellement lors de ce type de manifestations, les gradins placés derrière la scène, a ainsi tour à tour parfaitement su faire preuve de violence, de retenue (le «Crucifixus etiam pro nobis» du Credo), de joie et d’explosion sonore (toujours dans le Credo, l’« Et resurrexit»). Marqué par une très grande cohésion de l’ensemble ou d’une seule partie de celui-ci (les voix masculines dans l’«Et incarnatus» du Credo, d’une délicatesse et d’une douceur incroyables), le London Symphony Chorus a sans aucun doute été le principal triomphateur de cette soirée.


Quel chœur mais également quel orchestre, bien évidemment. C’est désormais un poncif que de qualifier l’Orchestre symphonique de Londres comme étant l’une des toutes premières phalanges du monde: il l’a encore prouvé ce soir. Bénéficiant de pupitres de cordes étoffés (une soixantaine) et de vents superbes, il a répondu présent à chaque instant. Même si la justice voudrait presque que l’on mentionne le nom de chaque musicien, contentons-nous de souligner le timbre presque surnaturel de la flûte solo de Gareth Davies dans le «Qui tollis peccata» (au sein du Gloria), la perfection de la petite harmonie accompagnant les solistes dans le passage «Qui propter nos homines» (Credo), la force sous-jacente du pupitre de violoncelles dans l’introduction orchestrale du Sanctus, qui ont été autant de moments de pur bonheur. Comment, naturellement, ne pas mentionner Gordan Nikolitch (dont la gestique, pour une fois, a été sobre pendant la presque totalité du concert), impérial dans le redoutable solo de violon du Benedictus: là encore, la justesse (notamment dans les aigus) et la finesse de son jeu ont été au diapason de la performance globale même si l’on peut regretter, par moments, qu’il se soit fait un peu trop couvrir par les chanteurs.


Assis sur une chaise pouvant pivoter à loisir vers tel ou tel pupitre, Sir Colin Davis dirige l’ensemble avec bonhomie mais sans pour autant céder à la désinvolture. Si certains passages auraient mérité d’être pris plus rapidement (la fin du Gloria, la lenteur suscitant d’ailleurs quelques légers décalages entre voix et instruments, ou la deuxième partie de l’Agnus Dei, qui a véritablement manqué d’élan), force est de constater que sa direction aura généralement été idoine, chanteurs et orchestre répondant de la façon la plus juste à la moindre de ses inflexions.


Paradoxalement, ce sont peut-être les voix solistes qui, dans la Missa Solemnis apparaissent secondaires tant, sur le strict plan vocal, la prépondérance du chœur est évidente dans cette partition. Pour autant, celles-ci doivent être excellentes et, sans jamais tirer la couverture à elles, parfaitement se fondre dans l’ensemble imaginé par le chef: cela aura été le cas ce soir. Sans être exceptionnels, les quatre chanteurs ont tout de même très bien tenu leur place, notamment Matthew Rose au début de l’Agnus Dei. Si Helena Juntunen a connu une légère difficulté à bien tenir son «Amen» (à la toute fin du Credo) et si Paul Groves a parfois du pousser un peu sa voix (dans le passage «Et homo factus est», au sein, là encore, du Credo), ils ont chanté avec une très grande justesse chacune de leur partie, l’alto Sarah Connolly se révélant particulièrement excellente.


Sir Colin Davis et ses forces londoniennes ont déjà enregistré la Messe en ut majeur de Beethoven dans la collection LSO Live qui compte également, par les mêmes, Le Messie de Händel, le Requiem de Verdi ou, tout récemment, Les Saisons de Haydn. Nul doute que la Missa Solemnis devrait bientôt les rejoindre: si l’enregistrement choisi reflète fidèlement le concert entendu ce soir, on peut d’ores et déjà y voir une référence. Pour les amateurs, signalons en outre que Sir Colin Davis sera présent à la tête de l’Orchestre national de France dans deux programmes respectivement consacrés à Mozart (le 31 mai et le 2 juin 2012 au Festival de Saint-Denis) et à Beethoven et Dvorák (le 7 juin, au Théâtre des Champs-Elysées).


Le site du London Symphony Chorus
Le site de l’Orchestre symphonique de Londres
Le site d’Helena Juntunen
Le site de Sarah Connolly



Sébastien Gauthier

 

 

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