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Ferveur mahlérienne

Paris
Théâtre du Châtelet
06/10/2011 -  
Gustav Mahler : Symphonie n° 8
Erin Wall, Melanie Diener, Kerstin Avemo (sopranos), Christine Knorren (mezzo-soprano), Marie-Nicole Lemieux (contralto), Nikolai Andrei Schukoff (ténor), Detlef Roth (baryton), James Morris (basse)
Chor der Sächsischen Staatsoper Dresden, Pablo Assante (directeur musical), Chœur de Radio France, Matthias Brauer(directeur musical), Maîtrise de Radio France, Sofi Jeannin (directrice musicale), Orchestre national de France, Daniele Gatti (direction)


E. Wall (© Alexander Vasiljev)


Lors des précédents volets de cette intégrale débutée en octobre 2009 (lire ici), Daniele Gatti confirmait son affinité comme son amour pour Mahler sans susciter toujours l’adhésion, en raison d’une approche souvent épaisse et étouffante – parfois même laborieuse. La Symphonie des Mille (1907) confirme en partie cette impression. La faute à une salle inadéquate, le Châtelet n’offrant pas davantage que Pleyel, en début de saison, l’écrin sonore dans lequel une telle œuvre peut trouver sa respiration sans s’asphyxier – nous conduisant à redire l’importance et l’utilité pour la capitale de la construction d’un auditorium de grande dimension. L’exécution du Veni, Creator Spiritus n’évite ainsi pas l’écueil du vacarme, l’organisation retenue par le chef (solistes tout devant, chœurs tout derrière) échouant à étaler les plans sonores et à satisfaire la remarque de Christian Wasselin dans le programme du concert («... comme toutes les partitions subtiles, elle exige d’abord un effectif en phase avec la dimension du lieu où elle est jouée, et ce afin que chaque effet sonore et dynamique prenne tout son éclat. Y entendre la voix de la surenchère est ne rien comprendre à la volonté de Mahler de faire chanter les mondes. Car rien n’est jamais forcé ni crié dans cette symphonie qui est au moins autant l’œuvre d’un ciseleur que celle d’un statuaire»). De même, le choix de placer deux groupes de cuivres de part et d’autre du premier balcon (à la fin de chacune des deux parties) n’est pas du meilleur effet acoustique et génère, inévitablement, des décalages dans les attaques.


On ne peut, en revanche, que saluer l’enthousiasme des interprètes (galvanisés par une affluence des grands soirs) – à défaut de louer la perfection d’une exécution parfois approximative (faute – pour le National – d’une fréquentation suffisante de cette partition remplie de pièges et – pour trois ensembles choraux pas forcément habitués à travailler ensemble – de la rigueur adéquate). Comme souvent, la distribution des rôles de solistes est inégale. Si Detlef Roth est à la peine (un timbre sec mais un investissement d’une grande rigueur), James Morris est franchement à la dérive. De leur côté, Christine Knorren manque d’assurance et Marie-Nicole Lemieux de projection... de même d’ailleurs qu’une Kerstin Avemo à la voix charmante mais bien trop lointaine pour s’élever vers les «höheren Sphären». Dans la première partie comme dans les habits de Magna Peccatrix et de Pénitente, la ferveur du chant d’Erin Wall et la beauté du timbre de Melanie Diener marquent bien davantage. Quant à cet artiste singulier qu’est Nikolai Andrei Schukoff, il s’empare d’un rôle de ténor dont il ne possède pas les moyens naturels, pour livrer une prestation remarquablement habitée, volontiers rieuse ou badine (n’hésitant pas à diriger l’orchestre de la tête ou à murmurer le texte chanté par d’autres). Soutenu au-delà du raisonnable par un chef qui lui offre des tempos et des nuances sur-mesure, le Doctor Marianus de Schukoff – aux aigus étranglés mais à l’identité vocale marquante – émeut par ses graves solennels et son attention au texte... malgré une prononciation pas toujours académique.


On apprécie surtout la cohérence que cherche à donner Daniele Gatti aux deux blocs formant cette symphonie, ici presqu’enchaînés l’un à l’autre alors qu’ils sont trop souvent traités de manière distincte et disparate. Par son geste mobile et intensément mahlérien, par l’absence de chute de tension, le chef italien privilégie une approche pastorale de l’œuvre, cherchant à réunir la nature et la foi... tant dans le Veni, Creator Spiritus que dans la scène de Faust. Voilà une interprétation qui, pour convaincre véritablement, demanderait à être remise sur le métier par des instrumentistes et des choristes qui semblent encore un peu «verts» pour la magnifier pleinement.



Gilles d’Heyres

 

 

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