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Facéties Le Mans Abbaye de l’Epau 05/28/2011 - Antonin Dvorák : Danses slaves, opus 46 et 72 (extraits)
Serge Rachmaninov : Romance, opus 11
Robert Schumann : Etudes en forme de canon, opus 56 (arrangement Claude Debussy)
Johannes Brahms : Danses hongroises (extraits)
Franz Liszt : Rhapsodie hongroise n°15 « Marche de Rákóczi » (arrangement August Horn)
Bedrich Smetana : Rondo pour deux pianos à huit mains
Carl Maria von Weber : Die Aufforderung zum Tanz, opus 65, J. 260 (arrangement Gabriel Marie)
Johann Sebastian Bach : Choral « Durch Adams fall ist ganz verderbt », BWV 637 (arrangement György Kurtág)
Franz Schubert : Grandes Marches, D. 819 n°1 et n°2 – Marche militaire, D. 733 n°1
Wolfgang Amadeus Mozart : Sonate pour deux pianos, K. 448: Andante Bertrand Chamayou, Romain Descharmes, Natacha Kudritskaya, Adam Laloum, Jean-Frédéric Neuburger, Frédéric Vaysse-Knitter, Vanessa Wagner, Simon Zaoui (piano)
Dans le cadre de sa vingt-neuvième édition, achevée le dernier week-end de mai et dédiée à la mémoire de son fondateur Michel d’Aillières, le Festival de l’Epau a réussi l’exploit de réunir pour toute la journée du samedi 28 huit pianistes appartenant à peu près à la même génération. Assurant l’après-midi même une série de petits concerts gratuits dans le centre-ville du Mans, Bertrand Chamayou, Romain Descharmes, Natacha Kudritskaya, Adam Laloum, Jean-Frédéric Neuburger, Frédéric Vaysse-Knitter, Vanessa Wagner et Simon Zaoui se sont retrouvés le soir à l’Abbaye de l’Epau. Dans le programme de salle, la direction « décline toute responsabilité pour les extravagances qui pourraient survenir... » et ajoute non sans humour « Bon courage à tous ». De ce fait, Pierre-Jean Larmignat, directeur artistique, apparaîtra à plusieurs reprises sur scène pour apporter des précisions sur le cours des événements : œuvres prévues à l’origine passant à la trappe, bouleversement de l’ordre du programme et autres surprises. Bref, le ton est volontairement à la décontraction et à la complicité, ce qui change de ces concerts sérieux voire compassés.
Les jeunes gens jouent ainsi dans diverses configurations et se mélangent volontiers. Se produisant en duo depuis quelques années (voir ici), Adam Laloum (né en 1987) et Natacha Kudritskaya (née en 1983) ouvrent les festivités avec des extraits de Danses slaves à quatre mains de Dvorák qui placent d’emblée la barre très haut : tempi allant de soi et vitalité de bon aloi, ils parviennent à jouer ces pages décidément irrésistibles en déclinant des couleurs proches de celles de la version pour orchestre, conçue, il s’agit de ne pas l’oublier, dans un second temps. La pianiste d’origine ukrainienne revient ensuite sur l’estrade en compagnie de Jean-Frédéric Neuburger (né en 1986) et de Vanessa Wagner (née en 1973) pour une Romance de Rachmaninov sur... le même instrument. Malgré le surnombre des interprètes, le niveau d’achèvement est de nouveau élevé, une constante, d’ailleurs, relevée durant toute la soirée. Bertrand Chamayou (né en 1981) entre ensuite en action (en duo avec Neuburger) dans les Etudes en forme de canon de Schumann, arrangées pour deux pianos par Debussy – jeu propre, net et spirituel. Son partenaire s’éclipse au profit de Frédéric Vaysse-Knitter (né en 1975) dans quelques Danses hongroises de Brahms – certaines sont ensuite interprétées par Chamayou et Laloum.
Au tour de Simon Zaoui (né en 1980) d’apparaitre, en l’occurrence dans la Quinzième Rhapsodie hongroise de Liszt (arrangée par August Horn) et dans le Rondo de Smetana pour deux pianos et huit mains (avec Chamayou, Vaysse-Knitter et Neuburger) : une initiative bienvenue puisqu’à l’instar de celle de Dvorák, l’œuvre pour piano de ce compositeur souffre d’un relatif oubli. Enfin, Romain Descharmes (né en 1980) arrive aux côtés de Wagner, Laloum et Kudritskaya pour L’Invitation à la valse de Weber adaptée pour deux pianos à huit mains par Gabriel Marie et durant laquelle une bonne partie des spectateurs, par ailleurs disciplinés, applaudissent avant les accord finaux. Inutile de s’attarder sur la transcription du choral Durch Adams fall ist ganz verderbt de Bach effectué par Kurtág, d’une brièveté toute webernienne, surtout que Simon Zaoui et Bertrand Chamayou cisèlent ensuite avec finesse quelques Marches de Schubert. Il aurait été agréable d’en entendre davantage, de même que d’écouter toute la Sonate pour deux pianos de Mozart, au lieu du seul Andante, joué avec goût et finesse par Vanessa Wagner et Romain Descharmes.
La soirée touche à sa fin mais les spectateurs ont droit à deux surprises à commencer par une Chevauchée des Walkyries de Wagner enlevée comme il se doit par Adam Laloum, Natacha Kudritskaya, Simon Zaoui et Romain Descharmes. Un tel concert sans blague gentiment potache serait en quelque sorte dépourvu de piment : alors que Adam Laloum, Frédéric Vaysse-Knitter, Simon Zaoui et Romain Descharmes entonnent (sur le même piano, bien sûr) la Marche nuptiale de Mendelssohn, les quatre autres joyeux drilles réapparaissent comme s’ils allaient se marier. Ils se partagent le second piano afin d’achever l’exécution de cette célèbre page, Jean-Frédéric Neuburger n’hésitant d’ailleurs pas à taper du poing sur le piano dans le but, sans doute, de réaliser un maximum de bruit. Mais comme l’acoustique du dortoir des moines s’avère impeccable, cela ne provoque aucun désagrément. Et puis, les musiciens se sont bien amusés, comme le public : voilà l’essentiel.
La prochaine édition du festival sera en principe consacrée à la musique
française, avec un hommage rendu à Jean Françaix, né justement au Mans en
1912.
Sébastien Foucart
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