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Dimanche concertant Paris Opéra Comique 04/10/2011 - et 31 mars 2011 (La Ferté-Bernard) Ludwig van Beethoven : Concertos pour piano n° 2, opus 19, et n° 1, opus 15
Orchestre Poitou-Charentes, Jean-François Heisser (piano et direction)
J.-F. Heisser (© Thierry Chapuzot)
Durant le «festival» entourant les représentations, jusqu’au 17 avril à l’Opéra Comique, du Freischütz dirigé par John Eliot Gardiner dans sa version française et berliozienne, Beethoven tient une place centrale, qui correspond à celle que le mouvement romantique parisien lui reconnaissait, au-delà même des cercles musicaux – il suffit de penser à des figures aussi importantes que Balzac ou même Delacroix, bien qu’un peu plus rétif à son style. La salle Favart programme deux intégrales: avant celle des Trios avec piano par le Trio Elégiaque, en quatre étapes tout au long de la semaine du 11 avril, c’est celle des cinq Concertos pour piano – cinq, et pas six ou sept, puisqu’elle exclut un concerto de prime jeunesse et, surtout, l’étrange adaptation, par Beethoven lui-même de son Concerto pour violon.
Quitte à rester dans une thématique wébérienne, quitte à inviter Jean-François Heisser, qui a enregistré ses Sonates, il aurait été intéressant de l’entendre dans les deux Concertos et même dans le Konzertstück, qui n’est plus si souvent joué que cela. Toujours est-il qu’avec l’Orchestre Poitou-Charentes, dont il est le directeur musical depuis mars 2000, c’est à lui que cette entreprise beethovénienne a été confiée. Si certains répartissent la charge sur deux ou trois jours, elle est ici concentrée en un seul dimanche et en trois temps (11 heures, 14 heures 30 et 17 heures): les concertos ont été regroupés deux à deux, par ordre chronologique, le Cinquième étant précédé de l’Ouverture de Coriolan. Deux heures trois quarts: un «marathon», comme on dit généralement dans ce cas-là tout en enfonçant une porte largement ouverte, mais plus que jamais, la métaphore ne s’impose pas, car le pianiste français, dos au public, partition sous les yeux et restant sagement assis durant les tutti, n’est pas du genre à rouler des mécaniques.
Présentant successivement le Deuxième (1795) puis le Premier (1798), dont le numéro traduit simplement une publication antérieure à celle de son prédécesseur, le concert du matin confirme que Heisser n’est pas homme à céder facilement aux effusions, le cas échéant jusqu’à la sévérité et à l’intransigeance. Mais son jeu, fondé sur une technique rarement prise en défaut, n’en conserve pas moins une grande liberté et un souci de diversité: s’il n’est jamais décoratif et toujours très pensé, le propos avance sans temps mort, depuis des mouvements initiaux très enlevés, particulièrement celui du Premier, jusqu’à des finales mordants et spirituels, en passant par des mouvements lents qui, sans traîner, ne renoncent pas à l’expression et à la poésie. L’absence de couvercle, évidemment destinée, dans cette configuration inhabituelle, à permettre à tous les musiciens de voir le pianiste, réduit quelque peu la projection du son, mais a pour avantage de favoriser la fusion entre le soliste et l’orchestre. Celui-ci, sans se montrer toujours à son avantage, a au moins le mérite, malgré son effectif relativement réduit (trente et une cordes) de ne pas singer les ensembles sur instruments d’époque.
Le site de Jean-François Heisser
Le site de l’Orchestre Poitou-Charentes
Simon Corley
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