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Passion laïque

Paris
Salle Pleyel
04/01/2011 -  
Samuel Barber : Concerto pour violon, opus 14
Michael Tippett : A Child of Our Time

Nemanja Radulovic (violon), Indra Thomas (soprano), Nora Gubisch (mezzo), Kim Begley (ténor), Jonathan Lemalu (basse)
Chœur de Radio France, Alan Woodbridge (chef de chœur), Orchestre philharmonique de Radio France, Steuart Bedford (direction)


I. Thomas


Tel qu’annoncé en début de saison, ce traditionnel concert du vendredi soir de l’Orchestre philharmonique de Radio France à Pleyel devait être dirigé par Leonard Slatkin et associer en un très copieux triptyque anglo-américain intitulé «Paix sur la terre» des œuvres composées au début de la Seconde Guerre mondiale. Il n’en reste finalement que deux: tant pis pour la Sinfonia da Requiem de Britten, alors que Steuart Bedford, remplaçant le chef américain, est l’un des spécialistes du compositeur anglais, dont il créa le dernier opéra, Mort à Venise.


C’est donc directement avec le Concerto pour violon (1939) de Barber que débute le programme: du pur nanan avec Nemanja Radulovic (né en 1985) en soliste. Dégaine tzigane et abondante crinière, il peine à tenir en place et a du charisme à revendre, mais derrière ce look et ces attitudes de rock star, c’est du sérieux, du solide: une ligne de chant qui conserve une tenue impeccable, une puissance qui déjoue les pièges des volumes souvent insidieux de Pleyel, une finesse qui livre notamment des aigus parfaits, une virtuosité étincelante dans le mouvement perpétuel final, un jeu qui ne manque pas de couleur sans pour autant ajouter du sucre ou de la crème à cette musique qui en contient déjà suffisamment. Et son entente avec un Philhar’ un tantinet trop généreux sous la baguette de Bedford est optimale: c’est d’ailleurs accompagné du violoncelle solo Daniel Raclot et des cinq chefs de pupitres des cordes qu’il offre son premier bis, restant dans la thématique de la soirée: un extrait de la musique de John Williams pour le film La Liste de Schindler (1993), interprété avec sensibilité mais sans sensiblerie. Le jeune violoniste, après avoir fait mine de s’interroger à haute voix – «J’hésite toujours entre Bach et Paganini» – opte pour le second, dominant avec humour le Treizième des Vingt-quatre Caprices (1817), ce «Rire du diable» comme en écho à son disque et à sa tournée «Les Trilles du diable».


Premier des trois grands oratorios de Tippett (The Vision of Saint Augustine, The Mask of Time), dont on ferait bien de programmer plus souvent les opéras (The Midsummer Marriage, King Priam, The Knot Garden, ...) et la musique instrumentale (Symphonies, Fantaisie concertante, Quatuors, Sonates pour piano, ...), A Child of Our Time (1941), sorte de Passion laïque, n’est pas déplacé à l’approche du temps de Pâques. Egalement auteur du livret, le compositeur a trouvé son inspiration dans une actualité tragique: cet «enfant de notre temps» (titre emprunté à Horváth) est en effet un jeune juif polonais, dont la famille venait d’être expulsée de Hanovre et qui assassina un diplomate allemand en poste à Paris, événement qui servit de prétexte au déclenchement de la «Nuit de cristal» (9 novembre 1938). La narration n’occupe que la deuxième partie proprement dite de la partition, les première et troisième s’employant à tirer les enseignements tant éthiques que psychanalytiques de cet acte de vengeance: des ténèbres naissent la lumière, le printemps succède à l’hiver et chacun est invité à découvrir la part d’ombre qu’il porte en lui-même.


Si son compagnon Peter Pears prit part à la création, la musique n’évoque pas Britten mais ne témoigne pas encore de la maturité (tardive) de Tippett. Unifiant des influences très diverses, de la Renaissance anglaise au jazz – avec les cinq fameux spirituals – en passant par Bach et Haendel, elle se caractérise par sa sobriété et même par une certaine économie de moyens: si l’ensemble dure soixante-cinq minutes, les numéros se succèdent rapidement et l’effectif orchestral, point trop gigantesque, est parfois même employé avec une grande parcimonie, comme ces deux flûtes simplement associées à l’alto dans la première partie puis au cor anglais dans la troisième. Sans forcer la note dramatique, Steuart Bedford transmet sa ferveur à des forces vocales et instrumentales très convaincantes: préparé par Alan Woodbridge, le Chœur de Radio France s’engage pleinement, et le quatuor soliste ne manque pas d’atouts, soprano et ténor d’un côté du chef, mezzo et basse de l’autre. Indra Thomas domine les spirituals et Kim Begley phrase avec émotion, tandis que Nora Gubisch explore les profondeurs insondables de l’âme et que Jonathan Lemalu est un récitant au timbre caverneux mais au vibrato un peu excessif.


Le site de l’Association des amis de Samuel Barber
Le site de la fondation Michael Tippett
Le site de Nemanja Radulovic
Le site d’Indra Thomas
Le site de Jonathan Lemalu



Simon Corley

 

 

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