About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Quand même

Paris
Salle Pleyel
03/13/2011 -  
Boris Blacher : Variations sur un thème de Paganini, opus 26
Serge Rachmaninov : Concerto pour piano n° 4, opus 40
Ludwig van Beethoven : Symphonie n° 3 «Héroïque», opus 55

Nikolaï Lugansky (piano)
Rundfunk-Sinfonieorchester Berlin, Marek Janowski (direction)


M. Janowski (© Felix Broede)


Pour sa seule venue à Paris cette saison, Marek Janowski, comme en 2008 et en 2009, se produit avec l’Orchestre symphonique de la Radio de Berlin («RSO Berlin»): nommé en 2008 «directeur musical à vie» de cette formation où il est en fonctions depuis 2002, l’ancien patron du Philhar’ a délaissé ses autres responsabilités – à Dresde, Monte-Carlo et, tout dernièrement, Genève – pour se consacrer exclusivement à cette phalange qui se présente comme le plus ancien orchestre radiophonique d’Allemagne (à ne pas confondre avec l’Orchestre du RIAS, celui de Ferenc Fricsay, devenu depuis lors «DSO» et confié à Ingo Metzmacher). Le RSO effectue actuellement une tournée de cinq concerts, quatre en Allemagne (deux en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, deux en Bavière) et ne consent qu’à la France un petit détour par l’étranger à la faveur d’un dimanche après-midi déjà presque printanier.


Boris Blacher (1903-1975) se maintient au répertoire essentiellement grâce à ses Variations sur un thème de Paganini (1947): le succès de ce mini-concerto pour orchestre ne se dément pas, car il offre aux orchestres une séduisante carte de visite au travers d’une revue de détail de leurs pupitres et d’une mise à l’épreuve de leur cohésion d’ensemble. Avec son humour pince-sans-rire et sa grande difficulté de mise en place, c’est une pièce idéale pour Janowski, qui l’a déjà fait travailler en son temps au Philhar’ puis à l’Orchestre français des jeunes: nerveuse et sûre à la fois, sa direction fait une fois de plus merveille dans cette œuvre, d’autant qu’elle peut se fonder sur un orchestre qui confirme sa grande solidité.


Au cours de cette tournée, l’orchestre a invité à trois reprises par Nikolaï Lugansky et, pour les deux dernières dates, Jean-Yves Thibaudet: le Français a choisi le Concerto de Grieg, tandis que le Russe a choisi Rachmaninov. Dès lors, la Rhapsodie sur un thème de Paganini semblait s’imposer au centre d’un programme qui donne déjà par ailleurs une large place à la variation. Mais c’est le Quatrième Concerto (1926) qu’il interprète, comme le précise la présentation très complète de Jean-François Boukobza, dans sa «version originale» expurgée, si l’on peut dire, des coupures opérées par le compositeur lui-même en 1928 puis en 1941, et éditée voici seulement dix ans. Quelle que soit la version, ce concerto demeure assez rare par rapport aux deux précédents et Lugansky, qui se trouve ici dans son répertoire d’élection, reste égal à lui-même, visage aussi impénétrable que son jeu, techniquement inattaquable, net et sans fioritures, mais semblant toujours aussi rétif à sortir de ses gonds – ce qui n’est pas nécessairement un mal dans Rachmaninov. De ce point de vue, l’accompagnement se situe dans le même esprit, carré et sans concessions. L’option est défendue avec conviction et cohérence, jusque dans un bis – la Septième des huit Etudes-Tableaux de l’Opus 33 (1911), toujours en sol – qui permet d’apprécier à nu un clavier somptueusement maîtrisé.


En seconde partie, c’est l’une des très nombreuses occasions d’entendre cette saison la Troisième Symphonie (1804): après Dohnányi, Jurowski, Thielemann et Haitink, avec des bonheurs divers, avant Krivine et Barenboim dans les semaines qui viennent, Janowski parvient à tirer son épingle du jeu. Recourant à un effectif renforcé (soixante cordes, bois doublés), il en tire des effets de puissance tout en évitant un épaississement excessif de la pâte sonore, notamment, et conformément à son habitude, grâce à des tempi allants. L’Allegro con brio initial (avec sa reprise) s’élance ainsi de façon décidée, avec des attaques mordantes, un ton péremptoire et un climat volontiers dramatique. D’une sobre grandeur, la «Marche funèbre» privilégie le recueillement sur l’extériorisation des sentiments. Vigueur et animation caractérisent le Scherzo, suivi attaca, comme dans le même souffle, d’un Finale à variations sans cesse relancé, avec un infatigable dynamisme. Sans se poser comme ambition de révolutionner l’histoire de l’interprétation beethovénienne, voici une «Héroïque» qui, sans narcissisme aucun, n’en porte pas moins clairement la marque du chef.


«C’est Berlin, quand même», tentait de se rassurer cette spectatrice découvrant en début de concert, peut-être avec une pointe de déception, que ce n’était pas de la prestigieuse Philharmonie qu’il s’agissait. Le RSO ne peut certes rivaliser avec la confortable texture des Philharmoniker – ou avec la patte inimitable de la Philharmonie de Vienne dans le Troisième Entracte de la musique de scène pour Rosamonde (1823) de Schubert, offert en bis – mais voilà quand même une bien belle formation et un immense directeur musical, qu’on se réjouit déjà de retrouver le 6 mars 2012 dans un programme Webern/Wagner/R. Strauss, avec Nina Stemme en soliste.


Le site de l’Orchestre radio-symphonique de Berlin



Simon Corley

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com