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L’abbé et le militant

Paris
Cité de la musique
03/11/2011 -  
Franz Liszt : Mazeppa – Concerto pour piano n° 1
Luigi Nono : Musica-manifesto n° 2: non consumiamo Marx – Variazioni canoniche sulla serie dell’op. 41 di Arnold Schönberg

Jean-Frédéric Neuburger (piano), André Richard (projection du son)
Brussels Philharmonic – het Vlaams Radio Orkest, Michel Tabachnik (direction)


M. Tabachnik


Fidèles à la Cité de la musique, où ils s’étaient déjà produits en septembre dernier, le «Brussels Philharmonic – het Vlaams Radio Orkest» (en anglais et en flamand dans le texte) et Michel Tabachnik, qui en est le «chef titulaire» et directeur musical depuis la saison 2008-2009, apportent leur concours à l’avant-dernier des cinq concerts qui, avec un colloque «Franz Liszt et la France» et une conférence, constituent le cycle «Liszt/Nono» présenté porte de Pantin du 5 au 12 mars.


Nul ne peut désormais ignorer que 2011 est consacrée à des célébrations lisztiennes, mais l’association avec Luigi Nono (1924-1990) n’a rien à voir avec quelque «anniversaire» que ce soit: depuis Bach/Berio et Beethoven/Stockhausen voici déjà sept ans, on sait en effet que la Cité aime jouer de l’effet de surprise résultant de rencontres qui, sur le papier, évoquent celle de la carpe et du lapin et, dès lors, paraissent davantage appeler la confrontation que le parallèle. Dans son texte introductif au programme de salle, Grégoire Tosser parvient cependant à fédérer les deux compositeurs autour d’une caractéristique commune, celle d’une existence mue par un idéal, religieux pour l’un, politique pour l’autre, bref, l’abbé et le militant.


Les deux œuvres de Liszt données en première partie sont toutefois bien antérieures à son ordination romaine. Dans Mazeppa (1851/1854), c’est ainsi l’inspiration littéraire et historique qui prédomine, encore qu’Angèle Leroy révèle dans la note de présentation que le thème de la dernière partie est emprunté... à un Chœur de travailleurs. Dès les premières mesures, le chef français, plus efficace que subtil, entre dans le vif du sujet et mène cette chevauchée fantastique avec conviction et sans arrière-pensées, au premier degré et en force, quitte à ce que le son sature comme trop souvent dans cette salle. Dans le Premier Concerto (1849/1856), Jean-Frédéric Neuburger n’a pas de mal à faire oublier la très décevante prestation de Daniel Barenboim voici dix jours à Pleyel. Le jeune Français, lui, ne triche ni avec la lettre – les traits sont précis et l’articulation toujours claire – ni avec l’esprit de cette musique: déployant la bravoure et la virtuosité requises, il parvient en même temps à garder ses distances avec l’esbroufe et à conserver une certaine sobriété, à l’image d’un Quasi adagio évoquant quelque Nocturne de Chopin. En bis, il interprète avec un esprit et une acuité idéaux la Bagatelle sans tonalité (1885), offrant du même coup une opportune transition vers la modernité, celle de la seconde partie de la soirée.


En principe, la Musique-manifeste n° 2: ne consommons pas Marx (1969), pour bande seule, doit être diffusée en même temps que la Musique-manifeste n° 1, pour voix, soprano et bande, l’ensemble étant dédié au poète cubain Carlos Franqui (1921-2010), qui venait de faire dissidence du régime castriste. Quoi qu’il en soit, dans la N° 2, esthétiquement spatialisée par André Richard, une voix de femme énonce (en français), sur fond de magma sonore, un condensé de la vulgate de l’époque: graffiti et slogans de Mai 1968 (y compris la phrase d’où la pièce tire son titre), plus ou moins intelligibles et complets selon les moments – «L’imagination prend le pouvoir», «La poésie est dans la rue», «Sous les pavés, c’est la plage», «Plus je fais l’amour, plus j’ai envie de faire la révolution» (et vice versa). Une véritable machine à remonter le temps, à l’égard de laquelle, à l’issue de ces dix-huit minutes, quelques auditeurs manifestent bruyamment leur hostilité.


Avant de se marier avec Nuria, fille de Schönberg (et nièce de Kolisch), Nono avait épousé la cause de la musique sérielle, comme en témoigne son «opus 1», les Variations canoniques sur la série de l’Opus 41 de Schönberg (1950/1985) pour orchestre de chambre (quatorze cordes, quelques bois et cuivres, avec un saxophone soprano très en avant, et percussion). L’écriture hérite de Webern une arachnéenne parcimonie et de Varèse une prédilection pour la percussion (sept exécutants) et les puissants agrégats sonores, mais à vingt-six ans, le compositeur italien y mêle un lyrisme et un raffinement déjà éminemment personnels.


Le site de Michel Tabachnik
Le site du Brussels Philharmonic
Le site de la Fondazione Archivio Luigi Nono



Simon Corley

 

 

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