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Docteur Jekyll

Paris
Salle Pleyel
12/11/2010 -  
Gustav Mahler: Symphonie n° 2

Anastasia Kalagina (soprano), Olga Borodina (mezzo)
Chœur de Radio France, Matthias Brauer (chef de chœur), Orchestre du Théâtre Mariinsky, Valery Gergiev (direction)


O. Borodina


Après la Huitième à la rentrée, voici venu le deuxième temps de l’intégrale des Symphonies de Mahler que Valery Gergiev, en cette saison qui marque les cent cinquante ans de la naissance du compositeur (1860) puis le centenaire de sa mort (1911), dirige à Pleyel avec deux des formations dont il a la charge. Comme pour le dernier volet, fin mars, avec l’Orchestre symphonique de Londres, le programme est à la hauteur de sa réputation de boulimique: au menu de l’Orchestre du Théâtre Mariinsky cette fois-ci, pas moins de cinq symphonies en trois jours, deux des concerts proposant des couplages véritablement gargantuesques – Première et Cinquième le dimanche après-midi, Quatrième et Sixième le lundi soir.


Tel n’est cependant pas le cas du premier, le samedi soir à guichets fermés, «seulement» consacré à la Deuxième (1894) et commencé avec une demi-heure de retard, les «perturbations du trafic aérien» ayant entraîné un décalage dans les répétitions. La Résurrection n’était pas apparue comme le meilleur moment de l’intégrale discographique de Gergiev (LSO Live), d’un intérêt fort inégal (voir ici). Restait toutefois l’espoir qu’avec son orchestre pétersbourgeois, le chef russe, jamais avare de surprises, ravive le souvenir des Mahler atypiques et attachants d’un Svetlanov, soit au disque avec son Orchestre d’Etat de la Fédération de Russie, soit au concert – comment oublier ainsi la Septième qu’il donna en mars 2000 avec le National?


Une fois de plus, ce diable de Gergiev n’est pourtant pas là où on l’attendait: lui qui, d’un soir à l’autre, bienfaisant Docteur Jekyll ou fâcheux Mister Hyde, peut tour à tour enthousiasmer ou horripiler par sa démesure et sa fougue offre ici une lecture d’une impeccable tenue, presque sévère, plus spirituelle et réfléchie, moins bouillonnante et juvénile que celle de son successeur à Rotterdam, Yannick Nézet-Séguin, en septembre dernier au Théâtre des Champs-Elysées (voir ici). Moins soucieux de spectaculaire que de vérité, il est d’emblée parfaitement fidèle à l’indication portée en tête du premier mouvement, «D’un bout à l’autre avec une expression grave et solennelle». Il conduit sans baguette ni podium un effectif relativement réduit (moins de soixante cordes) serré de façon compacte autour de lui, pour ériger cette «cérémonie funèbre» en un portique plus intimidant que tragique, néanmoins parfois terrifiant. Contrôlant fermement un orchestre de bonne qualité, guère plus féminisé que le Philharmonique de Vienne mais où l’on se régale tout particulièrement des sonorités si caractéristiques des excellents cuivres russes, il prête attention aux détails – il suffit de voir le soin apporté aux trois dernières notes du premier mouvement – et ménage de formidables coups de rein qui relancent sans cesse le discours.


Bien loin de respecter la «pause d’au moins cinq minutes» demandée par le compositeur, il enchaîne rapidement sur le deuxième mouvement, plus viennois que nature, avec toute la naïveté et la fraîcheur requises. Le troisième mouvement, avant lequel les deux solistes font leur entrée sur scène, paraît tout aussi réussi, à la fois fluide, léger et truculent. Les voix puissantes d’Anastasia Kalagina et, plus encore, d’Olga Borodina dans «Urlicht», chaleureuse et d’un volume impressionnant, sans jamais forcer, ne pâtissent pas de leur placement inhabituel, derrière l’orchestre, côté cour. Le Chœur de Radio France, qui chantera de nouveau l’œuvre avec Michael Tilson-Thomas et son Orchestre de San Francisco le 31 mai prochain à Pleyel, confirme son remarquable niveau actuel, dans un Finale tendu et visionnaire, que Gergiev construit admirablement jusqu’à la péroraison.


Une entrée en matière dont il serait tentant de penser qu’elle augure bien de la suite de ce marathon mahlérien si Gergiev n’était pas tellement imprévisible...


Le site de l’Orchestre du Théâtre Mariinsky



Simon Corley

 

 

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