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La voix d'Electre

Paris
Salle Pleyel
03/12/1998 -  et 15 mars 1998
Richard Strauss : Elektra
Hildegard Behrens (Electre), Reinhild Runkel (Clytemnestre), Elisabeth Meyer-Topsoe (Chrysothemis), Franz Grundheber (Oreste), Klaus König (Egiste), Giselle Fixe (Page de Clytemnestre, Surveillante, 4ème servante), Pei-Min Yu (Confidente de Clytemnestre, 5ème servante), Frédéric Goncalves (Précepteur d'Oreste, Vieux serviteur), Eric Huchet (Jeune serviteur), Ariane Stamboulides (1ère servante), Patricia Fernandez (2ème servante), Karine Ohanyan (3ème servante)
Orchestre de Paris, Semyon Bychkov (direction)

Hildegard Behrens n'a rien perdu de ses extraordinaires moyens vocaux. Nettement plus à l'aise avec cette partition qu'elle ne l'était lors de son enregistrement public (1), elle est sans doute la plus grande Electre actuelle. Soutenue par la direction de Semyon Bychkov, elle aborde ici le rôle de manière moins chaotique, plus concentrée et lyrique, sans y perdre sa phénoménale présence dramatique. Le rôle d'Electre, qui trouve difficilement son interprète idéale, semble avoir été écrit pour son timbre cuivré auquel toutes les possibilités sont offertes, de l'émission la plus pure à celle d'une voix presque cassée. Ses aigus savent se faire tantôt suaves et cristallins, tantôt perçants et agressifs (combien de chanteuses actuelles ont une telle attaque ?). Son registre grave très expressif trouve ici son plein emploi. Sa puissance vocale lui permet d'affronter sans risques une version de concert de cette oeuvre à la dynamique impressionnante, lui laissant, jusque dans les moments les plus puissants, la marge qui lui permet encore de faire de la musique. Son style si particulier s'empare du rôle pour lui donner une véritable incarnation. Son Electre est habitée de la calme certitude de la nécessité du meurtre de cette part d'elle-même qui l'empêche de vivre - certitude qui devient violence à chaque nouvelle confrontation. Jouant sur tous les registres, de la douceur à l'ironie, puis à la furie, elle est d'une présence extraordinaire, jusque dans son irrévérence à l'égard de la partition - et de la justesse, parfois.

L'orchestre invitait les chanteurs à des lignes vocales mélodiques et souples, à moins de cris. La direction de Semyon Bychkov, à la respiration large (les tempos sont souvent lents), sait profiter des instants de chaleur de l'oeuvre, de son orchestration extrêmement riche, tout en jouant les excès dramatiques de l'écriture. La distribution était presque à la hauteur du rôle titre et de la direction. Franz Grundheber est un Oreste extraordinaire, tant vocalement que dramatiquement, Reinhild Runkel, une Clytemnestre terrifiante à souhait. Elisabeth Meyer-Topsoe, à la Chrysothemis très lyrique et féminine, et Klaus König, Egiste manquant du ridicule qui convient au personnage, furent desservis par leur manque de puissance sonore.

Une salle entière s'est levée pour cette Electre unique, que l'on aimerait avoir plus souvent l'occasion d'écouter à Paris (pourquoi faut-il se rendre salle Pleyel pour entendre une chanteuse aussi exceptionnelle, loin de la scène qui lui donnerait toute sa dimension ?), et une version de concert d'Elektra qui se hausse au niveau des plus grandes.

(1) Avec Seiji Ozawa, en 1988.


Gaëlle Plasseraud

 

 

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