About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Cantiques d’amour

Paris
Salle Gaveau
11/20/2010 -  
Franz Liszt : Harmonies poétiques et religieuses

Brigitte Engerer (piano), Daniel Mesguich (récitant)


B. Engerer (© Anton Solomoukha)


Indéniable succès, la folle idée du label Mirare – organiser deux folles journées à Paris, baptisées «La Folle Nuit à Gaveau» – est une initiative d’autant plus follement appétissante qu’à huit euros la place, elle réunit un public varié, décontracté et intéressé. René Martin a invité à se produire une brochette de pianistes (parmi lesquels Jean-Claude Pennetier, Zhu Xiao Mei et Luis Fernando Pérez) pour douze concerts en deux jours et un programme assez éclectique (Chopin, Schubert, Schumann, Brahms, Bach, Granados, Chabrier...).


Par leur incompréhensible rareté, par le génie musical qu’elles véhiculent, les Harmonies poétiques et religieuses de Liszt auraient mérité de remplir complètement la salle. Les absents pourront néanmoins se rattraper en écoutant le disque récemment gravé par Brigitte Engerer (voir ici): ils n’y trouveront pas les poèmes de Lamartine – lus par un Daniel Mesguich beau diseur, quoiqu’inégalement impliqué – mais se satisferont à n’en pas douter d’une interprétation intensément vécue et véritablement émouvante. En ce sens, le concert ne trahit pas le disque (... si l’on ose dire) et, bien que l’exactitude technique ait parfois fait défaut à la pianiste salle Gaveau (une moindre finition des accords, une pédale par moments violentée, quelques fausses notes dans les instants d’emportement), l’inspiration y a semblé tout aussi élevée.


Trop souvent réduit à «Bénédiction de Dieu dans la solitude» voire à «Funérailles», ce cycle ne se révèle pourtant que dans son entièreté. Ainsi regrette-t-on l’interruption d’une demi-heure après «Pensées des morts», pour une pause certes récupératrice (vus l’exigence des moyens techniques requis et une pianiste peut-être refroidie par une toux qu’elle ne parvient pas toujours à contenir) mais qui se traduit par une baisse d’inspiration et de concentration à la reprise (un «Pater Noster» trop sonore, un «Hymne de l’enfant à son réveil» ne gagnant que progressivement en douceur).


Pour le reste, on avoue avoir senti passer le souffle de l’émotion et de la passion, sous les doigts d’une Brigitte Engerer qui semble vivre intensément ces harmonies sonores. C’est un piano puissant et noir qui fait tonner la chevauchée des basses dans «Funérailles» et perler des larmes silencieuses dans l’aigu de l’«Andante lagrimoso», un piano qui sait exprimer la tendresse infinie de l’«Hymne de l’enfant» comme de l’«Ave Maria» pour mieux ouvrir la bouche des Enfers dans les passages de grande véhémence, conduisant la «Bénédiction de Dieu dans la solitude» vers des sommets d’émotion.


Adoptant une allure globalement allante, recherchant la plénitude du son avec sa frappe puissante et riche, la pianiste française maîtrise tempos et nuances comme savent le faire les lisztiens authentiques, ayant éprouvé leurs émotions sur scène comme dans les épreuves de leur vie, portant un regard lucide sur la souffrance et la perte, la douleur et la foi. Brigitte Engerer remercie un public conquis en prolongeant cette intime et touchante soirée de correspondances musicales et littéraires par deux bis (une transcription par Liszt de mélodies de Schubert et d’Aliabiev).



Gilles d’Heyres

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com