About us / Contact

The Classical Music Network

London

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Prom 58 : Fantaisies tchèques

London
Royal Albert Hall
08/29/2010 -  
Antonín Dvorák : Symphonie n °8, opus 88 – Karneval, koncertní ouvertura, opus 92
Bohuslav Martinů : Symphonie n° 6 «Fantaisies symphoniques», H. 343
Edvard Grieg: Concerto pour piano, opus 16
Leos Janácek : Ballada blanická, JW VI/16

Lars Vogt (piano)
Ceská filharmonie, John Eliot Gardiner (direction)


J. E. Gardiner (© BBC/Chris Christodoulou)


Loin du désert de son homologue française, la capitale britannique continue de faire briller les astres de la musique classique dans le cadre des Proms, dont l’édition 2010 s’est ouverte le 16 juillet dernier et s’achèvera le 11 septembre prochain à l’issue de près d’une centaine de concerts (lire ici, ici et ici). Après une absence de six ans, l’Orchestre philharmonique tchèque fait son grand retour au Royal Albert Hall pour sa cinquième apparition aux Proms depuis 1969. Quant à John Eliot Gardiner (né en 1943), qui le dirige pour l’occasion, c’est un habitué des lieux puisqu’il s’y est produit à plus de quarante reprises depuis 1968. Il y reviendra d’ailleurs, le 10 septembre prochain, pour diriger les Vêpres de Monteverdi lors de l’avant-dernier concert du festival.


Rien d’étonnant à ce que le programme fasse la part belle à Dvorák, compositeur avec lequel la Philharmonie tchèque entretient des liens privilégiés et qui dirigea le tout premier concert de cette formation, le 4 janvier 1896 au Rudolfinum de Prague. Ces liens permettent à l’orchestre de mettre le pilote automatique dans la Danse slave donnée en bis tout comme dans l’ouverture Carnaval (1891), qui bénéficie de la sonorité ronde et charnue des cordes (bien que, dans la section centrale, le premier violon soit par trop timide) et d’une direction pleine d’entrain et de bonhomie. Quel dommage, en revanche, que la rigueur de la mise en place obtenue par le chef anglais soit compromise par l’acoustique excessivement imprécise et ouverte de la salle!


Est-ce pour cela que l’Allegro con brio de la Huitième symphonie (1889) manque à ce point d’élan et de force? Sa finesse et son charme en sont pourtant indéniables et, si l’engagement des cordes est plus irréprochable que celui de cuivres plutôt routiniers, on se délecte du miel qui coule de la flûte expérimentée de Radomir Pivoda. Bien que l’exécution manque par moments d’épaisseur, l’Adagio réunit, dans une même réussite, les cordes et tout le fond d’orchestre, faisant honneur à la musicalité reconnue de la Philharmonie tchèque. En revanche, l’Allegretto graziosocomme le Finale (Allegro ma non troppo) souffrent d’une battue un peu lente, de la fatigue perceptible de certains pupitres et d’une sonorité qu’on aimerait plus dense. De même, dans le bref – et moyennement inspiré – poème symphonique La Ballade de Blaník (1920) de Janácek, l’interprétation pourrait être plus fervente et plus convaincue (les cuivres surtout, les vents également).


En 1969 déjà, l’Orchestre philharmonique tchèque (avec Václav Neumann) offrait au public londonien les Fantaisies symphoniques (1953) de Martinů. Cette partition est peut-être celle du programme qui s’accorde le plus mal avec l’acoustique réverbérée du Royal Albert Hall, d’autant plus gênante que l’œuvre elle-même offre déjà une atmosphère vaporeuse et évanescente. Du coup, la belle cohérence du Lento. Allegro perd en impact (notamment le solo du premier violon), même si les appels répétés des trompettes – d’une douceur inquiétante – conservent leur caractère obsédant. Le chef fait surtout merveille dans un fascinant Poco allegro, créant un climat d’une étrangeté toute berliozienne, qui rappelle à la fois les origines de la partition (initialement conçue par Martinů comme une «nouvelle "Symphonie Fantastique"») et les affinités naturelles de John Eliot Gardiner avec le compositeur français. Enfin, avec ses deux flûtes qui se cherchent et ses trois trompettes à l’unisson, le Lento conclusif respire, comme il se doit, l’amour obsessionnel que l’implacable pulsation rythmique vient sans cesse figurer, jusqu’à l’élégie finale, sobre et émouvante.


Seule vraie «fausse note» de la soirée: un Concerto pour piano (1868, rév. 1907) de Grieg, dont on se demande bien ce qu’il vient faire dans ce panorama de la musique tchèque, où aurait eu toute sa place une œuvre concertante de Martinů ou Dvorák, ou – plus audacieux encore – de Válek, Pálenícek ou Ullmann. D’autant que l’interprétation de Lars Vogt (né en 1970) – cherchant à rapprocher le concert de sa thématique slave avec un délicat Nocturne de Chopin en bis – n’est pas aidée par un instrument qui sonne comme une casserole dans l’antre du Royal Albert Hall. Si le pianiste allemand (résidant à Londres) agace quelque peu par ses options stylistiques dans l’Allegro molto moderato (élans brisés pour mieux créer des effets pas toujours probants), il intéresse davantage dans la cadence (bien conduite, plus sobre aussi) comme dans l’Adagio (où point n’est besoin de minauder pour émouvoir) et convainc même franchement dans un Allegro moderato molto e marcato bien charpenté et adroitement musclé.


Le site de l’Orchestre philharmonique tchèque
Le site de Lars Vogt



Gilles d’Heyres

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com