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Un Vaisseau toutes voiles dehors

Toulouse
Halle aux grains
11/18/1997 -  
Richard Wagner : Le Vaisseau fantôme
Nokolai Putilin (Le Holandais), Larissa Gogolevskaia (Senta), Stanislav Schwets (Daland), Konstantin Plujnikov (Erik), Evgeny Akimov (Le Timonier), Olga Markova-Mikhailenko (Mary)
Chœur et Orchestre du Théâtre Mariinsky de Saint Petersbourg, Valery Gergiev (direction)

Gergiev et le Kirov dans Wagner, voilà une affiche sur laquelle il était difficile de ne pas fonder beaucoup d'espoirs et dont on attendait tout, sauf la banalité ! Sur ce rapport, la soirée n'aura déçu personne, même si ce grand capitaine a été trahi par une partie de son équipage.

En effet, quel que soit le désir de Gergiev de ne pas enfermer sa troupe dans le seul opéra russe, et malgré la grande qualité de nombre de voix qui en sont issues, le plateau offert pour ce concert n'appelait guère de louanges. On pouvait passer sur une Mary à peu près inaudible, après tout le rôle est très anecdotique et souvent mal servi ; un Timonier qui donnait l'impression de chanter l'Innocent de Boris était déjà plus génant ; un Daland à la voix engorgée et sans projection qui se perdait à tout instant dans l'orchestre et nous voilà à la limite de l'acceptable ; limite franchie par un Erik franchement mauvais, au timbre nasal et ouvert, évoquant un Jon Vikers en bout de course et braillant son duo avec Senta d'une voix épuisée. De la voix, Senta n'en manquait assurément pas, mais malheureusement, ce n'était pas la bonne ! Caricature de soprano wagnérienne surpuissante et hululante, Larissa Gogolevskaia n'incarnait guère une jeune fille amoureuse, mais plutôt une cantatrice tâchant de canaliser une voix débordante, certainement pas déshonorante, mais à l'aigu fixe et parfois douloureux. Le Hollandais s'en sortait somme toute mieux car Nikolai Putilin offrait un chant propre, puisant et contenu mais guère émouvant, avec un timbre convenant peut-être plus à Alberich qu'à ce Hollandais torturé dont il n'a pas su rendre les tourments.

En fait le grand triomphateur de la soirée, le seul qui ait su nous faire vibrer et nous émouvoir, c'était Gergiev. Par sa conception anguleuse, parfois brutale du drame wagnérien, n'hésitant pas à souligner les dissonances de l'écriture, il a fait de son orchestre le seul personnage de l'opéra. Cela était particulièrement manifeste dans le premier acte où, dès l'ouverture, la poigne du chef nous a saisi dans un maelström sans répit, dans une tempête dont la violence éclatait dans les accents des cuivres omniprésents (mais pas infaillibles), dans un climat d'angoisse qui ne s'est pas imposé un instant. La raideur des choeurs sans nuances ajoutait même à ce climat oppressant. Le deuxième acte, plus retenu et laissant une plus grande part aux chanteurs, a montré les limites de l'approche expressionniste du chef et en a paru d'autant plus plat. Mais le troisième acte offrait un terrain à nouveau propice à la furia du chef qui y retrouvait un élan irrésistible, notamment dans un choeur des marins fantômes lugubre et inquiétant à souhait, avant de conclure l'opéra dans un crescendo proprement tétanisant.

Quel qu'ait été le fort impact émotionnel de ce Vaisseau, et ce malgré les écueils habituels de l'opéra en version de concert, il évoquait davantage quelque Boris maritime que l'oeuvre de Wagner s'inspirant encore de Weber ou de Meyerber, mais on se dit aussi qu'avec des chanteurs d'une autre qualité Gergiev serait allé encore plus loin dans sa conception atypique mais passionnante.



Laurent Marty

 

 

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