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Don José de la Monnaie

Bruxelles
La Monnaie
05/04/2010 -  et 5, 6, 7, 8, 9, 11, 12, 14, 16*, 18, 19 mai 2010
Jules Massenet : Don Quichotte
José van Dam*/Vincent Le Texier (Don Quichotte), Werner Van Mechelen*/Lionel Lhote (Sancho Panza), Silvia Tro Santafé*/Jennifer Larmore (La Belle Dulcinée), Julie Mossay (Pedro), Camille Merckx (Garcias), Gijs Van der Linden (Juan), Vincent Delhoume (Rodriguez), Bernard Villiers (chef des bandits), Gerard Lavalle, Jacques Does, Aldo De Vernati, Pascal Macou (bandits), Marc Coulon, André Grégoire (valets)
Chœurs de la Monnaie, Martino Faggiani (chef des chœurs), Orchestre symphonique de la Monnaie, Marc Minkowski/Nicholas Jenkins* (direction)
Laurent Pelly (mise en scène, costumes), Barbara de Limburg (décors), Joël Adam (éclairages), Jean-Jacques Delmotte (costumes)




José van Dam n’a pas débuté sa carrière à la Monnaie et il n’y effectuera pas non plus ses adieux. Après ce Don Quichotte (1910), dernier spectacle auquel il prête son concours, quelques engagements doivent encore être honorés – La Veuve joyeuse à Genève en décembre et Ariane et Barbe-Bleue à Barcelone l’année prochaine. Que ses admirateurs se rassurent, le baryton continuera à se produire en récital et au concert, pas plus tard, d’ailleurs, que le 23 mai pour un concert « surprise » (« José van Dam & Friends ») inscrit dans le cadre de son soixante-dixième anniversaire et de ses cinquante ans de carrière dont presque quarante dans le théâtre bruxellois. Les archives indiquent pour ses débuts un Leporello pendant la saison 1970/1971 mais van Dam y a endossé ses plus grands rôles dès Don Carlo en novembre 1981, notamment Boris Godounov, Don Giovanni, Falstaff, Golaud, Hans Sachs, le Hollandais, Jochanaan, Méphistophélès de La Damnation de Faust, Simon Boccanegra et Lindorf/Coppelius/Docteur Miracle /Dapertutto. Un double album récemment paru chez Cyprès rappelle opportunément cette tranche d’histoire.


Le choix de cet opéra de Massenet s’avère judicieux à plus d’un titre : le chanteur ne l’avait pas encore interprété sur cette scène alors qu’il connaît depuis longtemps ce rôle gratifiant – un enregistrement réalisé en 1992 sous la direction de Michel Plasson en témoigne chez EMI – et, voilà qui tombe décidément à pic, l’ouvrage a été créé à Monte-Carlo il y a cent ans puis repris à la Monnaie quelques semaines après, le 14 mai. José van Dam assure, en alternance avec Vincent Le Texier, huit des douze représentations, l’occasion d’admirer une fois de plus l’autorité avec laquelle il incarne ses personnages (intériorité, naturel) ainsi que ses proverbiales qualités vocales, au premier chef un legato onctueux et une diction exemplaire. Laurent Pelly a imaginé un Don Quichotte d’une classe aristocratique et aux allures de vieux fou qui lui sied à merveille ; la façon dont l’interprète regarde, perdu dans ses rêves, les jeunes gens et sa Dulcinée, lève les yeux pour contempler le ciel (« Quand apparaissent les étoiles ») et meurt debout illustre un travail d’acteur de premier ordre. Inutile, sans doute, de le préciser : les saluts de José van Dam, seul, après les derniers accords déclenchent une juste ovation et suscitent l’émotion.


Le reste du plateau ne démérite pas, même si l’attention se focalise naturellement sur le personnage principal. Portant sans complexe son embonpoint et touchant lorsqu’il s’amuse avec une tête d’âne en papier, Werner Van Mechelen compose un Sancho Panza peureux mais empli de bonté et de loyauté. Une prestation remarquable qu’il serait intéressant de confronter avec celle de Lionel Lhote, talentueux comédien, qui incarne l’écuyer pour quatre représentations. Jennifer Larmore et Silvia Tro Santafé se partagent La Belle Dulcinée. La soprano espagnole émet des aigus lumineux et des graves corsés qui lui donnent des airs de Carmen mais la prononciation française n’est guère heureuse. Cette production permet à quatre apprentis de la Chapelle musicale Reine Elisabeth de connaître les planches avec un résultat probant (Julie Mossay, Camille Merckx, Gijs Van der Linden et Vincent Delhoume, tous en habit de soirée pour jouer Pedro, Garcias, Juan et Rodriguez) tandis que quelques membres des Chœurs de la Monnaie incarnent les bandits et les valets.


Marc Minkowski, qui n’avait jamais collaboré avec José van Dam, dirige un Orchestre symphonique de la Monnaie fidèle à sa réputation (bois fruités, graves charnus et profonds) malgré quelques furtives épaisseurs. Son assistant, Nicholas Jenkins, qui reviendra avec le chef français l’année prochaine pour d’inattendus Huguenots, assure trois représentations dont celle de ce dimanche après-midi. L’intérêt particulier qu’il porte aux opéras français s’en ressent : le geste, énergique, un peu trop dans le prélude du premier acte, mais capable de nuances trouve matière à s’exprimer dans une partition contrastée, finement écrite et se parant çà et là de savoureuses couleurs ibériques, que les musiciens s’emploient à souligner. A noter que pendant le précipité entre les premier et deuxième actes, deux morceaux des Scènes pittoresques ont été exécutés, « Fête bohème » et « Angélus », ce dernier en même temps qu’une projection d’un extrait du roman de Cervantès. Laurent Pelly, qui privilégie une ligne de conduite clairement lisible, manifeste quant à lui des affinités avec le papier : sa Fille du régiment londonienne évoluait sur des cartes d’état-major, son Don Quichotte doucement poétique, et comportant juste ce qu’il faut de sentimentalité, se déroule sur un parterre et une montagne de papier, rejoignant, au premier acte, le balcon de Dulcinée et en partie carbonisée au cinquième. Autant de livres et de lettres d’amour lus et écrits par un Don Quichotte qui laissera un vif souvenir.



Sébastien Foucart

 

 

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